Alors que des millions de personnes sont en grève et manifestent dans les rues du pays pour défendre le droit à la retraite, le gouvernement se répand dans la presse sur une prétendue menace terroriste, incitant la population à serrer les rangs.
La menace terroriste brandie récemment par plusieurs membres du gouvernement et relayée par de hauts responsables de la police ne cesse d’intriguer. Trois jours avant la mobilisation en défense des retraites, le 23 septembre, Hortefeux déclare « la menace d’attentat est réelle, la vigilance est renforcée ». Les déclarations de Péchenard, le directeur général de la police nationale, allant jusqu’à dire, la veille de la manifestation, que « le pic de menace est incontestable » et du patron de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), Bernard Squarcini, sur le danger imminent et bien réel ressemblent à une mise en scène de la part de ces trois proches de Sarkozy. Un responsable des services de renseignement a même été jusqu’à déclarer à l’AFP : « on ne sait pas quand et où l’attentat aura lieu, mais on sait qu’il aura lieu ». On ne saurait être plus précis.
Les services de renseignement envoient régulièrement des alertes mais celles-ci ne sont pas rendues publiques. Il faut savoir que le plan Vigipirate, en vigueur actuellement, a plusieurs niveaux d’alerte en fonction du risque encouru. L’alerte rouge est l’avant-dernière en termes de dispositif et prévoit la surveillance renforcée des lieux publics, des grands magasins, la fermeture des gares, métros, aéroports et l’arrêt des transports. Mais ce niveau avait été déclaré depuis plus d’un mois sans que l’opinion publique soit prise à témoin.
La cote de Sarkozy est au plus bas, sa contre-réforme des retraites est impopulaire, sa politique à l’encontre des Roms suscite l’opprobre générale de la part de dirigeants européens et jusque dans son propre camp. Alors, entretenir un climat de peur au lendemain de la prise d’otages au Niger, apparaît comme une solution pour détourner l’attention de la population. Oui, les clignotants sont au rouge mais c’est parce qu’il y a une véritable crise du régime.
Il faut alors entretenir un climat d’inquiétude voire de peur permanente, en laissant courir des informations comme celle de l’existence d’une femme kamikaze chargée de commettre un attentat – information qui s’est révélée farfelue – ou en fermant les gares comme celle de Reims ou la gare Saint-Lazare à Paris. Cette stratégie s’accompagne d’une médiatisation de tout incident susceptible d’entretenir ce climat : tout bagage sans propriétaire immédiatement identifié devient un colis piégé potentiel, les images des attentats notamment celui du RER B à Saint-Michel, en 1995, sont de nouveau diffusées.
Politique de la peur
Une fois instillée la suspicion, l’État peut jouer les protecteurs en mettant en avant sa maîtrise des dispositifs et en affirmant qu’il a déjoué des attentats. Mais personne ne saura jamais quelle est la part de vérité.
Cette politique de la peur a été pratiquée pendant quatre ans par George W. Bush aux États-Unis entre 2002 et 2005, avec comme fonction de faire remonter la popularité du président dès qu’il était dans une passe difficile pour lui et son clan. Si le gouvernement français joue avec cette peur, c’est qu’il n’a pas réussi à endiguer le ras-le-bol de ceux et celles qui rejettent sa politique.
Le mystère qui entoure ces « informations » venues aux oreilles des services de renseignement laisse une forte impression de manipulation politique. Entretenir la peur pour reprendre la main : tel est l’objectif de Sarkozy et du gouvernement.