En Seine-Saint-Denis, dans les quartiers nord de Marseille, dans la banlieue lyonnaise... plus qu’au moment de la lutte contre la loi travail, les lycées des périphéries et d’enseignement professionnel ont été parmi les premiers à se mobiliser. Mais comment s’en étonner puisqu’il apparaît que les jeunes générations auront des conditions de vie plus difficiles que leurs parents ?
La jeunesse issue des classes populaires a bien du mal à se faire entendre, les médias ne retenant bien souvent que les incidents devant les établissements quand la colère légitime fait l’objet d’une répression particulièrement dure.
Tout le monde a en tête les images de ces jeunes de Mantes-la-Jolie agenouilléEs, mains sur la tête, pendant plusieurs heures sous la menace de la police et on ne compte plus les blesséEs. On n’insiste pas non plus assez sur le fait que l’on refuse systématiquement aux lycéen.nes de s’organiser en leur refusant la liberté de réunion et le droit d’expression alors que c’est leur avenir qui est en jeu. Une école qui n’éduque pas les jeunes dans la démocratie et dans une perspective d’approfondissement de la démocratie prend le risque de l’affaiblir. On oublie en effet que le désir de démocratie n’est pas naturel et qu’il peut s’altérer. C’est la raison pour laquelle une éducation émancipatrice ne peut faire autrement que de le cultiver. En réalité, la démocratie a progressé toutes les fois que les sans voix ont fait irruption sur la scène politique pour réclamer justice et dignité en leur propre nom.
Quand les autorités disent à la jeunesse "sois sage et tais-toi !", elle répond "no future !" et elle a ses raisons.
Pour ne prendre que l’exemple des lycées professionnels, parents pauvres de l’éducation, la réforme du bac pro a déjà provoqué une suppression impressionnante de postes et d’heures d’enseignement. La réforme qui s’annonce de la voie professionnelle aura le même effet et va de plus renforcer sa soumission aux employeurs. Parcoursup a laissé des milliers de lycéen.nes sans affectation à la rentrée et la réforme du lycée, du bac et des programmes n’est pas une réponse aux inégalités scolaires, le gouvernement n’a d’ailleurs pas annoncé des réformes allant dans ce sens. Après une augmentation honteuse des droits d’inscription pour les étudiantEs étranger/ères, il est maintenant question d’une augmentation générale des frais de scolarité qui fermerait l’accès à l’université aux classes populaires (1).
La colère des lycéen.nes et des parents qui se constituent parfois en collectif pour s’élever contre la criminalisation de leur mouvement est aussi la nôtre. C’est pourquoi nous devons nous élever contre la répression et toute action qui les empêcherait de s’organiser librement. Mais nous autres, éducateurs/trices et enseignantEs, nous devons les rejoindre dans la mobilisation parce que nous avons enfin la possibilité de dire dans l’action et avec force que nous sommes contre des réformes qui ne correspondent en rien aux aspirations à plus d’égalité sociale et au besoin de démocratisation de l’école.
C’est le moment de faire converger nos colères !
1. Voir Le Monde du 21 novembre 2018, La Cour des comptes préconise une hausse des droits d’inscription à l’université, https://www.lemonde.fr/education/article/2018/11/21/la-cour-des-comptes-envisage-une-augmentation-des-droits-d-inscription-a-l-universite_5386241_1473685.html.
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