tiré du site de la CSN
Des contradictions exacerbées
LA CRISE QUE NOUS VIVONS AURA MIS AU GRAND JOUR LES CONTRADICTIONS DE NOTRE SYSTÈME
Elle aura amplifié les failles béantes contre lesquelles nous nous battons depuis fort longtemps. Depuis des années que nous répétons que l’effondrement de notre système de santé est bien réel ; Que les effets hautement centralisateurs de la réforme Barrette entraîneraient une déresponsabilisation du gouvernement envers les bénéficiaires et les usagers du réseau de la santé ; Que sous-financés de la sorte, de nombreux milieux de vie de nos aîné-es étaient devenus invivables ; Que la rareté de main-d’œuvre dans le secteur public était bien réelle et que les bas salaires en étaient la principale cause, tant dans les services sociaux et en éducation qu’en petite enfance ;
Ça fait des années qu’on dit que les bas salaires en général minent la capacité de production de nombreux secteurs économiques tout en asservissant la classe ouvrière dans des conditions de pauvreté ; Que les trous béants de l’assurance-emploi devaient être colmatés pour assurer la protection des travailleuses et des travailleurs sans emploi ; Que le nombre d’inspecteurs de la CNESST est nettement insuffisant pour protéger nos milieux de travail ; Et qu’au moindre soubresaut… Eh bien, nous y voilà. Bien malgré nous. * * * * *
SUR LE FRONT ENVIRONNEMENTAL, LA COVID-19 AURA MALHEUREUSEMENT FREINÉ UN FORMIDABLE ÉLAN COLLECTIF.
Mais elle aura aussi permis une prise de conscience des liens serrés, intrinsèques, entre les risques de pandémie mondiale et les fondements de notre système économique planétaire basé sur les énergies fossiles, le déclin de la biodiversité, la croissance des échanges économiques et, bien sûr, l’exploitation des classes ouvrières de tous les continents. Une économie qui repose sur un systèmemonde de plus en plus imbriqué, un système qui explique comment un virus apparu dans la région de Wuhan, en Chine, a pu se répandre aussi largement en quelques semaines seulement. Après d’intenses travaux, de larges consultations et un travail de coalition important avec les groupes environnementaux, la CSN a adopté en 2018 sa Charte de l’environnement. Cette charte a guidé notre travail syndical dans de nombreux milieux de travail qui sont confrontés aux défis d’une transition énergétique juste.
ET C’EST SUR LA BASE DE CES PRINCIPES QUE NOUS N’AVONS PAS HÉSITÉ À PRENDRE LA RUE.
C’est la vigueur du mouvement environnemental dont nous faisons partie qui aura rendu possible le rassemblement d’un demi-million de personnes dans les rues de Montréal et partout au Québec lors de la venue de Greta Thunberg il y a un peu plus d’un an. C’est en s’appuyant sur les principes contenus dans cette charte que nous avons dénoncé la faiblesse des actions du gouvernement de François Legault, notamment le manque de sérieux, de rigueur et de cohérence du Plan pour une économie verte déposé par son ministre de l’Environnement en novembre dernier.
LA TRANSITION JUSTE QUE NOUS REVENDIQUONS N’EST PAS GAGNÉE D’AVANCE, J’EN CONVIENS.
Si la situation actuelle démontre bien une chose, c’est l’ampleur de la contradiction d’une économie basée sur les énergies fossiles — ainsi que la fragilité du monde dans lequel nous vivons. Voilà pourquoi on ne peut se permettre de baisser les bras sur ce front. À l’heure où bien des boss auront accès à différentes formes de subventions gouvernementales pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, en fonction d’objectifs déjà trop mal définis ; Quand on connaît les ratés et le laxisme des programmes gouvernementaux offerts aux entreprises ; On ne peut que revendiquer une plus grande transparence dans leur octroi et on ne peut qu’exiger l’implication de nos syndicats dans la mise en place des mesures visant à assainir la transition pour les travailleuses et les travailleurs, mais également pour l’ensemble de la société. J’invite le présent congrès à s’attaquer à cet enjeu, et ce, sur la base des principes contenus dans la Charte de l’environnement que nous avons adoptée.
Pas de démocratie sans droits
QUE CE SOIT EN TEMPS DE GUERRE, DE CRASH ÉCONOMIQUE OU DE PANDÉMIE, LES FONDEMENTS DES SOCIÉTÉS DÉMOCRATIQUES SONT RÉGULIÈREMENT ATTAQUÉS EN PÉRIODE DE CRISE.
Il en va de même aujourd’hui.
Partout sur la planète, des mouvements basés sur l’ignorance et la peur ont émergé. Ceux-ci remettent en question les fondements mêmes de notre vivre-ensemble, à savoir nos responsabilités en tant que citoyennes et citoyens. Les mouvements complotistes ne se contentent pas de nier le danger du virus, ils minent également tous nos efforts collectifs en matière de santé publique. Ils se drapent derrière de fausses prétentions que sont, dans ce cas bien précis, de supposés droits individuels. Les mêmes fausses prétentions qu’on retrouve derrière la défense du port d’armes, le renforcement des frontières ou encore la négation d’une information libre, indépendante et véridique. Le désengagement des puissants et des nantis envers ceux qu’ils ne considèrent pas être leurs semblables n’est malheureusement pas étranger à ce phénomène. Pas de fake news ici.
Les répercussions de cet abandon des classes ouvrières, pauvres, immigrantes sont bien visibles dans la crise que vit aujourd’hui la société américaine.
On se réjouit — tout en retenant notre souffle jusqu’à l’assermentation de Biden mercredi — de l’éjection en bonne et due forme de Donald Trump par la volonté démocratique du peuple américain. Mais on ne peut nier les profondes fractures provoquées par les quatre années de son mandat. Quatre années d’efforts pour miner le travail des institutions démocratiques américaines, des scientifiques, des tribunaux et, surtout, des médias.
En plein milieu de la pire crise qui secoue la planète depuis la deuxième guerre mondiale, Donald Trump aura tout fait pour détruire jusqu’à la confiance même du peuple américain envers sa propre démocratie.
Dans le tumulte actuel, il y a tout à craindre d’une récupération politique, par la droite, des classes populaires appauvries et désinformées.
Si on peut se considérer chanceux que le mouvement complotiste et l’extrême droite n’aient pas fait plus de ravages au Québec au cours des derniers mois, nous ne pouvons baisser la garde pour autant.
Nous devons rester vigilants et poursuivre notre travail de défense de nos droits démocratiques, où le bien-être collectif et les droits des minorités et des groupes plus vulnérables doivent primer sur la vision parfois bien égoïste des droits individuels.
Et nous pouvons être fiers, comme mouvement CSN, du travail accompli sur ce terrain.
Notre travail visant une réforme du mode de scrutin au Québec s’est intensifié au cours du dernier mandat, notamment par notre implication avec le Mouvement démocratie nouvelle et la Coalition pour la réforme électorale maintenant ! Ce travail de fond a porté ses fruits. L’assemblée nationale doit adopter cet hiver le projet de loi sur la réforme du mode de scrutin. Le mode de scrutin proportionnel proposé par le gouvernement n’est pas parfait, nous en convenons. Mais les défauts du projet de loi ne doivent pas non plus occulter les avancées qui semblaient inaccessibles il y a quelque temps seulement, mais qui s’avèrent bien réelles quand on prend un peu de recul.
LES DERNIERS MOIS NOUS AURONT DÉMONTRÉ QUE LA LUTTE POUR LES DROITS FONDAMENTAUX DE PLUSIEURS DE NOS CONCITOYENNES ET DE NOS CONCITOYENS EST LOIN D’ÊTRE TERMINÉE.
C’est le cas des communautés autochtones qui doivent se battre tous les jours pour lutter : Contre la pauvreté dans laquelle elles sont confinées depuis des décennies ; Contre l’absence de considération des différents paliers de gouvernement par rapport aux impacts de certains projets lucratifs sur leurs territoires et leurs communautés — rappelons-nous la lutte menée par la communauté Wet’suwet’en en Colombie-Britannique ; Contre le racisme systémique bien présent au Québec, dont la mort de Joyce Echaquan représente une illustration des plus tragiques.
LE RACISME SYSTÉMIQUE EST UN FLÉAU SOURNOIS.
Intangible pour certains, mais bel et bien réel pour des milliers de travailleuses et de travailleurs québécois, dont des membres de la CSN. Pour combattre le racisme systémique, nous devons soutenir la pleine intégration de toutes et de tous au sein de notre société, de nos institutions et de nos milieux de travail. Cette intégration repose sur le respect des mêmes droits et sur l’accès au même filet social, aux mêmes services publics, que nous avons collectivement construits.
LA PANDÉMIE NOUS AURA FORCÉS À OUVRIR LES YEUX SUR DES MILLIERS DE TRAVAILLEUSES ET DE TRAVAILLEURS ESSENTIELS QUI, MALGRÉ L’ILLÉGALITÉ BIEN ABSTRAITE DE LEUR STATUT, N’ONT PAS HÉSITÉ À VENIR NOUS PRÊTER MAIN-FORTE DANS LES PIRES MOMENTS.
C’est notre déni collectif envers des milliers de travailleurs sans-papiers qui permet leur exploitation, des plus abominables, par des agences de placement dont les plans d’affaires se résument à l’exploitation sans scrupules de leur main-d’œuvre précaire. Tant Ottawa que Québec doivent trouver des solutions pour régulariser leur statut.
UNE SOCIÉTÉ DE DROITS REPOSE INÉVITABLEMENT SUR UN ACCÈS ÉQUITABLE À LA JUSTICE POUR TOUS ET TOUTES.
Elle repose aussi sur la pleine reconnaissance des droits fondamentaux de tous et de toutes. Personne ne souhaite vivre dans une société où chacun se fait justice, personne ne souhaite que cette justice soit assumée par l’humeur de l’opinion publique. Néanmoins, devant l’incapacité de notre système à faire régner cette justice dans de nombreux cas d’agressions et de harcèlement sexuels, nous devons analyser sereinement les avancées sociales réalisées par les vagues successives de dénonciation des comportements abusifs, qui n’ont pas sans raison gâché la fausse réputation ou la vie de célébrité des agresseurs, qu’ils soient riches et puissants ou pas. Je ne peux m’empêcher de saluer l’incroyable effort démontré par l’une de nos militantes, Annick Charrette, seule au monde avec son secret, qui nous a révélé la plus belle victoire dans la plus cruelle défaites.
Un exercice fort intime et difficile pour toi, mais combien libérateur pour nombre de femmes et d’opprimé-es, souvent seuls dans leur silence. Je ne peux, Annick, que t’en remercier personnellement .
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