L’économie n’est plus seulement reliée à l’argent, à l’administration et aux choix budgétaires, elle applique les principes qu’elle promeut – le libre marché, la concurrence, l’individualisme, voire la cupidité – à tout ce qui existe. La gestion du budget familial comme celui de l’État, le savoir, l’art, la préservation de l’environnement et ce qui relève de l’intime doivent se plier à la loi de l’offre et de la demande ainsi qu’à la « rationalité » économique.
La valeur commerciale devient l’indice suprême. Elle s’affirme comme une puissante vérité. On évalue ce que pourrait rapporter une forêt, un milieu humide, la pollinisation par les abeilles, les services, l’amour, etc. Rien ne doit plus échapper à la marchandisation.
Un des grands exploits de l’âge économique est d’intégrer à son fonctionnement les domaines qui semblaient les plus rébarbatifs à sa logique et à ses exigences. Par exemple, l’art. Aujourd’hui, les différentes formes d’art sont évaluées en grande partie par une appréciation chiffrable. Même la vie intime, l’amitié, les émotions et les idées doivent obéir à la loi des chiffres. Collées à leurs écrans, bien des personnes se passionnent à suivre les hauts et les bas de leur vie sociale, grâce aux « amitiés virtuelles », aussi aléatoires que les cours de la Bourse.
La cupidité folle, l’incapacité totale d’arrêter d’accumuler, s’accompagne d’un net et indiscutable rejet de toute forme de redistribution de la richesse, sinon par le biais de fondations privées, qui donnent d’importants avantages fiscaux, tout en favorisant une générosité narcissique. De façon paradoxale, ce qui a causé la puissance de l’âge économique pourrait aussi provoquer sa perte. Le grand mal de notre époque est son incapacité de se reconnaître des limites : l’âge économique poursuit ses avancées comme une marche sans fin, sans tenir compte de la finitude de notre monde.
L’auteur
Essayiste, romancier, enseignant, conférencier, président d’Attac-Québec et membre du collectif de rédaction du magazine À bâbord !, collaborateur à différents magazines et revues (desquels est tiré en bonne partie ce livre), Claude Vaillancourt est, entre autres, l’auteur de L’empire du libre-échange et codirecteur de L’économie toxique (M Éditeur, 2014).
Table des matières
L’âge économique –Vivre en corpocratie – De la démocratie à la ploutocratie – Pourquoi l’avenir est-il à gauche ? – Le difficile retour de Robin des Bois – De la démocratie à la gouvernance – L’empire Facebook, privatisation de l’amitié et placement de produit – Le vent du populisme – Quelle sorte d’avenir « vert » voulons-nous ? – PKP, le choix de la confusion – Justin Trudeau, lotocrate – Tourisme – Avocasseries – L’épouvantail démographique –La philanthropie est rarement désintéressée– Utopistes de la première génération – Imaginer le pire – La disparition de l’intellectuelle : nouvel épisode – Culture – pour le meilleur et sans le pire – Que crèvent les artistes ! – La survie de la cigale – Dans l’étau de l’industrie culturelle – La littérature à la dérive – Les chefs d’État et la lecture – Dostoïevski et l’usage difficile de la liberté – Les Québécois à Hollywood, la langue conquérante du cinéma – Espace musique et Radio-Canada – La trilogie d’Alejandro González Iñárritu, le cinéma monde – Les noces de la musique et du silence – L’anoblissement du jazz
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