Il déclara même que le régime réglementaire « est brisé », qu’« il est temps de l’examiner » et « c’est une urgente question d’intérêt national pour le Canada. »
Les lois environnementales « trop axées sur la protection de l’environnement »
À ce moment, nous ne savions pas qu’un mois auparavant, les présidents des quatre principaux lobbys du pétrole et du gaz écrivaient à Joe Olivier et au ministre de l’Environnement Peter Kent pour leur expliquer qu’ils avaient un problème. Selon eux, les lois environnementales étaient trop axées sur la protection de l’environnement et cela devait changer.
Dans leur lettre aux ministres (obtenu par Greenpeace grâce à la Loi d’accès à l’information), ils écrivaient :
Nous croyons que les approches de base dans la législation actuelle sont dépassées. Au cœur de la plupart des législations réside une philosophie d’interdiction de nuire ; la législation « environnementale » vise presque entièrement à prévenir l’avènement de mauvaises choses plutôt que de permettre des résultats responsables. Ceci se solde par une interdiction qui confronte, plutôt que de permettre de protéger en collaboration de manière à atteindre des buts communs. » (traduction libre)
La liste d’épicerie de l’industrie
Les associations industrielles pétrolières, gazières et pipelinières ont donné leur « liste d’épicerie » au gouvernement. Ils ont explicitement identifié la Loi canadienne sur les évaluations environnementales, la Loi sur les espèces menacées, la Loi de l’Office national de l’énergie, la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs et la Loi sur la protection des eaux navigables comme faisant partie de cette approche « dépassée »(pour en savoir plus sur l’approche qu’ils préconisent, voir ce blogue).
Le gouvernement Harper avait bien reçu la « commande » et, sans tarder, est allé « faire l’épicerie » pour l’industrie. Nous savions qu’il travaillait déjà étroitement avec l’industrie pétrolière, identifié comme « alliée » dans la Stratégie de plaidoyer paneuropéen sur les sables bitumineux (alors que les groupes environnementaux et autochtones étaient dans la colonne des « adversaires »), mais maintenant le gouvernement répondait même aux demandes de modification législative proposées par l’industrie.
Le gouvernement exécute la « commande » de l’industrie et charcute les lois environnementales
La Loi omnibus sur le budget (C-38, C-45) a amené les plus importants changements aux lois environnementales dans l’histoire du Canada avec, comme objectif, de faciliter l’approbation des projets des industries pétrolière et gazière.
Près des 3 000 évaluations environnementales ont été annulées, alors que de nouvelles règles ont été mises en place pour s’assurer qu’il y ait moins d’évaluations environnementales dans le futur (et de moins bonnes évaluations par le fait même).
La protection des poissons et de leur habitat était affaiblie, touchant la plupart des habitats des poissons d’eau douce. Ceci importe, car la perte ou la dégradation des habitats des poissons est l’un, sinon le facteur principal qui mène au déclin de la santé des espèces à travers le monde.
La Loi sur la protection des eaux navigables a été renommée la Loi sur la protection de la navigation et la protection fédérale des voies navigables a été limitée à 62 rivières et 97 lacs. Ceci était un cadeau du ciel pour des compagnies comme Shell qui propose de détourner la rivière Muskeg sur 21 kilomètres pour ouvrir une nouvelle mine de sables bitumineux, mais ne réjouissait guère les Premières Nations qui utilisent les voies navigables pour accéder à leur territoire pour exercer leurs droits constitutionnels de chasser, de pêcher et de trapper.
Le cabinet des ministres (c’est-à-dire les politiciens, plutôt que des agences « indépendantes » comme l’Office national de l’énergie) s’est vu octroyer l’autorité de décider ce qui est bon ou mauvais pour l’environnement.
La fonction publique qui applique les lois environnementales a subi d’importantes coupes budgétaires, tout comme les scientifiques (au grand désarroi de la communauté scientifique).
Le ministre de l’Environnement, Peter Kent, a également mentionné que les groupes environnementaux canadiens qui se préoccupaient de l’expansion des sables bitumineux étaient utilisés pour « blanchir de l’argent de l’étranger ». Cette accusation a été utilisée pour justifier les nouvelles règles du budget ainsi que les 8 millions de $ débloqués par le gouvernement pour effectuer une véritable chasse aux sorcières envers les organismes de charité (alors que des coupes drastiques avaient lieu).
Ces changements majeurs furent adoptés rapidement sans véritable débat démocratique au Parlement, cependant les modifications à la Loi sur la protection des eaux navigables ont été la bougie d’allumage de la campagne Idle No More.
Nouvelle approche du gouvernement : campagne de greenwashing à même nos taxes
Avec une opposition grandissante aux pipelines des sables bitumineux, et ce à travers le pays, et les objections à de nouvelles mines en Alberta, les attaques du gouvernement n’ont pas cessé, mais l’approche a été changée.
Le gouvernement a lancé une campagne de greenwashing monstre avec 9 millions de dollars de publicités sur le « développement responsable des ressources » et le Ministre Oliver a signalé qu’encore plus d’argent sera dépensé cette année.
Pendant ce temps, l’industrie pétrolière dépense des millions supplémentaires sur des publicités visant à revamper son image.
Malheureusement, la science ne cesse de contredire leurs « prétentions vertes », mettant en évidence que le gouvernement Harper n’a d’yeux et d’oreilles que pour l’industrie, délaissant ainsi sa responsabilité de protéger la santé et l’environnement des Canadiens et des Québécois.
Et nous en aurons pour des dizaines d’années à ramasser les pots cassés juste parce que le gouvernement Harper obéit à l’industrie…