Quelle est votre réaction à l’appel au dialogue lancé par la Jirga de la paix à Kaboul ?
Certains passages de la déclaration finale suscitent mon inquiétude. Comme par exemple l’appel à retirer les noms des chefs talibans de la liste de sanctions des Nations unies, à encourager leur présence officielle dans un pays tiers et à renforcer l’application de la loi islamique en Afghanistan. L’Afghanistan est déjà un pays islamique.
Quelle est selon vous la représentativité de cette Jirga ?
Les délégués ont été sélectionnés par le pouvoir. Ils sont pour l’essentiel issus de régions contrôlées ou influencées par les insurgés talibans. Par ailleurs, l’initiative de convoquer cette assemblée a été prise par des gens au palais présidentiel proches de l’idéologie des talibans. Le peuple a été laissé de côté. La base légale de cette Jirga est sujette à caution.
Êtes-vous hostile par principe à toute discussion avec les talibans ?
Toutes les femmes ont souffert ou souffrent encore de la guerre, et nous devons rechercher la paix. Mais la paix doit se combiner avec la justice. Il y a des valeurs sur lesquelles on a investi ces dernières années en Afghanistan, la démocratie, les droits de l’homme et les droits de femmes. On ne peut pas sacrifier ces valeurs au prétexte de vouloir atteindre la paix. Malheureusement, il y a un durcissement du climat à mesure que la rébellion des talibans s’étend. L’environnement politique et idéologique est beaucoup plus difficile qu’il y a quelques années, en particulier pour les droits des femmes. Le gouvernement ne semble pas montrer l’engagement nécessaire pour protéger les droits acquis depuis 2001. Mais, heureusement, la société afghane a changé, s’est transformée, évolue vers plus de modernité. Ce n’est plus l’Afghanistan que contrôlaient les talibans entre 1996 et 2001. C’est ce qui me donne de l’espoir.