Édition du 17 septembre 2024

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Syndicalisme

Un camp de formation syndicale prend ses marques

À sa deuxième édition, le camp de formation syndical et militant de LUTTE COMMUNE tenue à Montréal les 16, 17 et 18 février dernier, indique que ce regroupement militant commence à prendre ses marques. C’est en effet un tour de force de réunir pour une seconde fois sur des bases autonomes et de multiples provenances plus d’une centaine de militant.e.s qui ont à cœur le développement et l’enracinement du syndicalisme au Québec.

Qu’ont en commun ces militant.e.s de provenances diverses ? Une soif de savoir, de partage de connaissances, d’expériences où sont mis à l’avant-scène des principes de démocratie, de combativité et de solidarité. Pour ce faire, il réunissait des panélistes membre de plusieurs syndicats et organisations : AFPC, APTS, FTQ, CSQ, CSN, FAE, FIQ, FTQ, IWW, SCFP, Coalition Main rouge, Comité de lutte en santé de la clinique communautaire (Pointe-St-Charles), Centre des travailleurs immigrants et Centre international de solidarité ouvrière.

En amorce à cette rencontre, LUTTE COMMUNE participait conjointement avec les Nouveaux cahiers du socialisme, au lancement de la 19e revue du Collectif d’analyse politique, Syndicalisme : institution ou mouvement ? Cette revue porteuse du questionnement qui a cours dans le mouvement syndical en panne de projet politique, était une collaboration opportune qui a servi de mise en bouche aux questionnements et réflexions qui ont eu cours tout au long de ce camp de formation.

Loin d’être un lieu de complaisance où tous se réunissent dans la grande chapelle d’un syndicalisme surdimensionné ou un lieu de dénonciation accusateur du syndicalisme qui a cours, le camp de formation a permis de soulever maints questionnements qui méritent d’être clarifiés, voir approfondis.

Ainsi alors que dans un atelier on établissait plus aisément une convergence quant à l’« État du syndicalisme au Québec » à partir des travaux du Comité intersyndical du Montréal métropolitain (CIMM) et un portrait de la situation dans le secteur privé, dans « Bâtir des solidarités entre syndiqué-e-s des services publics et usagers », des divergences étaient mises sur table entre des membres d’organismes communautaires en lutte pour la défense des soins de santé et la défense de l’école publique et des militant.e.s syndicaux. Comment bâtir une solidarité réelle entre les salarié.e.s des services publics et les usager.e.s ? Comment ne pas instrumentaliser le soutien apporté aux luttes menées dans ces secteurs à des fins corporatistes ?

Deux ateliers ont particulièrement interpellé les syndiqué.e.s qu’ils soient ou non expérimentés. Ce sont les ateliers « Préparer les négociations du secteur public 2020 » et celui sur « Le syndicalisme hors-la-loi ».

Dans le premier, une mise au jeu de ce qu’est et devrait être une négociation dans le secteur public, complétée par des présentations de syndicalistes en provenance des cégeps et de la santé ont permis de saisir le désarroi des militant.e.s de la base à la conclusion de la derrière ronde de négociation dans le secteur public. Certaines des questions soulevées concernant la démocratie syndicale mériteraient d’être largement débattues : Où sont les lieux de décisions délibératifs autres que les syndicats locaux en période de négociation ? Qui prend les décisions quant aux compromis consentis ? Les porte-paroles sont-ils des représentants élus qui n’auront à terme à rendre des comptes qu’à la prochaine élection dans leur instance ou peuvent-ils être les délégué.e.s de leurs mandataires et porter un mandat ferme ? Comment utiliser les normes imposées par les services essentiels au profit des services à donner aux usagers, au désavantage des potentats locaux ? Un plancher d’emploi pour tous les groupes de salariée.s ne peut-il être une avenue ?

Dans le second, une présentation des balises et limites du cadre juridique actuel entourant le droit du travail associée à l’expérience des coursiers à vélo hors du cadre de l’accréditation syndicale et celle d’un syndicat de base de la SAQ où l’éducation syndicale et la résistance se vit au quotidien ont soulevé l’enthousiasme des participant.e.s. Il en ressort que la contestation active des conditions de travail doit aller de pair avec une révision de l’encadrement législatif du droit au travail. Le Code du travail du Québec ne répond pas aux modifications qui se sont produites dans le monde du travail et bon nombre de salarié.e.s tel les femmes embauchées par les agences locatives de travail en témoignent. Un syndicalisme hors accréditation syndicale tissé sur la solidarité et la politisation d’une équipe de travail semble pouvoir se développer en complémentarité avec les syndicats accrédités. C’est un dossier à suivre.

D’autres ateliers tout aussi intéressants tels celui portant sur le racisme et un autre sur la solidarité internationale, n’ont pas été très courus. Faut-il pour autant en conclure les militant.e.s ne s’y intéressent pas ? C’est peu plausible. Toutefois les questions entourant le rôle des syndicats dans la lutte contre le racisme, la lutte à mener pour bâtir des espaces de socialisation des travailleuses et travailleurs immigrants ne sauraient rester sans réponses.

Une solidarité internationale à enraciner dans les milieux de travail ne saurait se réaliser sans une éducation politique sensible des contradictions et complémentarités qui existent entre les travailleuses et travailleurs du Québec et d’ailleurs.

C’est un exploit de réussir en dehors des calendriers syndicaux établis à mobiliser une centaine de personnes. La qualité des échanges entre les personnes ressources qui ont partagé leurs expériences et connaissances avec les militant.e.s réunis ces trois jours de la mi-février laisse entrevoir des avancées vers un syndicalisme de mouvement en devenir. Une intersyndicale militante de la base se développe. On ne saurait que souffler sur les braises de cette expérience militante pour qu’elle se répande et s’élargisse.

Ghislaine Raymond
2018/02/26

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