Par cette loi, le Gouvernement entrave outrageusement l’activité syndicale, brimant de manière injustifiée le droit à un processus véritable de négociation collective des débardeurs du port de Montréal. N’eut été de celle-ci, les débardeurs auraient déjà un contrat de travail adapté aux réalités modernes des débardeurs et dont la nouvelle mouture refléterait la nécessaire prise en compte de la conciliation travail-famille.
Amputés de leur droit aux moyens de pression, les femmes et les hommes débardeurs du port de Montréal voient leur rapport de force déséquilibré par cette loi qui empêche la conclusion d’un contrat de travail équitable et librement négocié. En effet, la Loi spéciale force la main d’un arbitrage de différends s’étirant depuis maintenant près d’un an. L’association patronale met du sable dans l’engrenage et se montre peu disponible aux audiences d’arbitrages. À titre d’exemple, les parties devaient fournir leurs disponibilités à l’arbitre pour la période s’étalant du mois de mai 2022 jusqu’au 15 juillet 2022. Le Syndicat a fourni 67 jours de disponibilités. L’Employeur 5 jours…. La Loi prévoyait à l’origine un délai maximal de 90 jours pour aboutir à une nouvelle convention collective.
Les travailleuses et travailleurs du port de Montréal et leur Syndicat dénoncent cette ingérence éhontée du gouvernement dans la négociation du renouvellement de leur convention collective. Ingérence qui continue malgré la vive contestation de la constitutionnalité de cette loi actuellement devant les tribunaux. Le Syndicat soutient que la Loi spéciale est invalide et illégale notamment eu égard à la Charte canadienne des droits et libertés de même que des engagements qui lient le Canada au Droit international.
D’ailleurs, les débardeurs ne sont pas les seuls à s’être vu privés de leur droit constitutionnel à la négociation au cours des dernières années. Par exemple, en 2013, l’Organisation internationale du travail (OIT), une institution de l’ONU, a jugée injustifiée l’adoption de la loi de retour au travail imposée aux employés de Postes Canada. En 2020, l’OIT a rappelé au gouvernement fédéral que l’arbitrage obligatoire pour mettre fin à un conflit collectif du travail est contraire aux principes de la liberté syndicale (sauf s’il est constitué à la demande des parties ou en cas de services essentiels, au sens strict du terme).
PENDANT CE TEMPS UNE ASSOCIATION PATRONALE VENGERESSE
Menottés par cette Loi spéciale, les 1125 débardeurs du port de Montréal croulent sous des milliers de jours de mesures disciplinaires par année et 15 congédiements depuis l’entrée en vigueur de la Loi spéciale (23 en comptant les employés occasionnels et les candidats à un poste de débardeur). D’un seul coup de crayon on condamne des débardeurs et leur famille à une mort sociale, à l’anxiété voire à la dépression. On nous fait chèrement et injustement payer l’exercice du droit de grève légale de 2020 et 2021.
Une association patronale multimillionnaire, OSBL de surcroit, composée d’un Conseil d’administration où siègent des représentants de compagnies maritimes mondiales qui engrange des profits pharaoniques, la pandémie aidant. Une association qui dilapide des millions de dollars pour faire vivre des avocats embauchés avec l’unique but d’attaquer le Syndicat et ses membres plutôt que faire de véritables relations de travail. Une association créée artificiellement par l’article 33 du Code canadien du travail, composée de conseillers en relations industrielles pour négocier au nom des membres du Conseil d’administration. Des gestionnaires de ressources humaines ayant très peu de considération pour ceux et celles qui ont fait et font le succès du port de Montréal, les débardeurs.
Ainsi, le Code du travail impose une structure où jamais à une table de négociation les véritables décideurs (les compagnies maritimes et les opérateurs portuaires membres du Conseil d’Administration) sont assis en face de nous. Le Ministre du travail fédéral devra un jour jeter un coup d’œil sur cette obligation du Code du travail et la modifier afin que les négociations des conventions collectives s’effectuent avec ceux qui prennent réellement les décisions et non avec leurs messagers.
Aujourd’hui, 1er mai, malgré ce triste anniversaire de la Loi spéciale du Gouvernement Trudeau, les femmes et les hommes débardeurs sont toujours là, debout ! Et ils seront là pour des décennies à venir.
En leur nom, le Syndicat des débardeurs joint sa voix aux travailleuses et travailleurs du monde entier pour dénoncer l’injustice des gouvernements envers les ouvriers et ouvrières et réclamer le respect et la liberté d’exercice des droits relatifs au travail pour toutes et tous.
Solidairement
Michel Murray
Conseiller syndical pour le Syndicat des débardeurs, SCFP 375
et débardeur pendant 24 ans.
Un message, un commentaire ?