Mais au-delà de ce jeu à propos des termes, cette décision laisse de côté le fait que le gouvernement a peu de marge de manœuvre pour déterminer la hauteur de la facture d’électricité des ménages. En effet, c’est plutôt la Régie de l’énergie qui détermine les tarifs pour toutes les catégories d’utilisateurs (à l’exception des contrats secrets). Le seul facteur contrôlé par l’Assemblée nationale est le tarif du bloc patrimonial. Viennent ensuite s’ajouter les coûts de l’énergie achetée en sus de ce bloc, les frais de transports, d’entretiens des lignes, les projets d’économie d’énergie, le coût de la main-d’œuvre, etc. Ainsi, lorsque le gouvernement parle de hausser, de geler ou même de baisser le coût de l’électricité, il ne parle que de la variation d’une seule composante de ce qui sera chargé aux clients.
Comme nous l’avions démontré en décembre dernier, le coût de l’électricité suit déjà l’inflation grâce aux hausses autorisées par la Régie de l’énergie. Toute variation au prix du bloc patrimonial s’ajoutera ainsi aux hausses des autres facteurs, ce qui laisse envisager des augmentations bien au-delà du coût de la vie. Par ailleurs, s’il est vrai que les kWh du bloc patrimonial sont vendus au prix unique très bas de 2,79¢, il est également vrai qu’il permet de générer des bénéfices nets appréciables : pour l’année 2011, Hydro-Québec parlait de 1,2G$, seulement pour le bloc patrimonial, ce qui représente 44% de l’ensemble des profits.
Ainsi, la voie choisie par le gouvernement Marois diffère seulement quantitativement de celle entreprise par le gouvernement précédent. Dans son principe, on garde la même optique : les Québécois·es doivent payer plus cher leur électricité non pas parce qu’elle coûte plus cher à produire, non pas parce qu’il faut des sommes supplémentaires pour investir dans des projets d’économie d’énergie, mais simplement parce que le gouvernement souhaite voir la somme que lui transfère Hydro-Québec augmenter.
Dans une note socio-économique, l’IRIS a montré que la consommation d’électricité n’est pas très « élastique ». C’est-à-dire qu’une augmentation de son prix fait peu varier la consommation, surtout pour les ménages les plus pauvres. Pourquoi ? Parce qu’il est souvent impossible de diminuer leur consommation d’électricité sans faire des réparations majeures à un logement qui n’est souvent pas le leur, ou qui leur coûterait trop cher sur le coup. Que dit le gouvernement aux ménages qui ne pourront se payer cette hausse de tarif et qui ne pourront pas non plus réduire leur consommation ? Il répond : tant pis.