Édition du 17 décembre 2024

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Québec solidaire peut-il se réclamer du féminisme ?

Après le congrès tenu les 29-30-31 mai, nous pouvons répondre que Oui.
Comme parti politique. QS aurait pu se contenter d’élaborer une politique de l’égalité, parlant travail, place des femmes dans la société et violences faites aux femmes. Mais ces réformes auraient à peine écorché les mentalités dans notre société sans réellement changer la situation des femmes.

QS aurait pu aussi aller un peu plus loin en proposant simplement une reconnaissance des valeurs de la Charte des femmes. Un vœu pieux reste un vœux pieux.

Mais Qs a fait fi d’une démarche de base et a accepté d’aborder des sujets à polémique sans tenir compte des impacts sur les pourcentages de votes. QS a accepté d’être un allié du mouvement des femmes en situant les analyses dans une approche liant le patriarcat et le capitalisme et en reprenant la notion d’intersectionnalité.

Les documents produits et les propositions adoptées ont toutes été basées sur la Charte mondiale des femmes. Tout le processus menant au congrès a donc eu pour objectif d’inviter à reconnaître l’importance des cinq grandes valeurs (égalité, justice, paix, solidarité, liberté), à réfléchir sur des éléments d’analyse de systèmes patriarcal, capitaliste et intersectionnel (pauvreté et travail, femmes autochtones, pouvoir et démocratie) et à développer des politiques envers les familles et les personnes vivant les diversités sexuelles, de genre et corporelles.

Un congrès c’est toujours beaucoup de procédurites. Mais pour les thèmes de la prostitution/travail du sexe et des diversités de genre, les débats ont été des plus stimulants.

Concernant la prostitution/travail du sexe, les personnes « travailleuses du sexe » ont pris la parole pour inviter les personnes déléguées à éviter de faire la morale et à prendre en compte leur réalité. Une autre femme « survivante de la prostitution » a aussi témoigné de sa vision. Combien de partis politiques peuvent s’enorgueillir de témoignages des personnes prostituées/travailleuses du sexe durant leurs délibérations ? Ces personnes ont gagé sur Qs comme étant capable de les écouter. Elles ont marqué des points en fin de semaine, leur réalité est sortie du silence même s’il reste beaucoup de travail de conscientisation à faire. Finalement, la proposition préparée par le comité chargé de travailler sur l’ensemble de la thématique a rallié l’ensemble des congressistes. Les gens, pour marquer leur solidarité, ont même voté une proposition globale de l’asso. de Rosemont choisissant ainsi une troisième voie entre l’abolitionnisme et le travail du sexe.

Pour la thématique des diversités sexuelles, de genre et corporelles ; les congressistes ont reconnu les réalités des personnes intersexes, les droits des personnes à l’identification ou non à un sexe.

Les thématiques concernant les familles n’ont malheureusement pas pu être discutées. Elles ont été référées à la commission politique mais devront rapidement revenir devant l’ensemble des congressistes.

Un gros travail d’élaboration, de réflexion et de discussion vient donc de se terminer. Mais la conjoncture évolue, change, bouge, se transforme. Il faut déjà prévoir l’évolution de la situation des femmes. Et Qs devra bonifier ses réflexions des sujets suivants :

L’austérité devient un élément clé pour les femmes. L’appauvrissement n’est pas nouveau et demeure, mais maintenant avec les gouvernements Harper et Couillard ce sont des acquis qui sont remis en question : coupures dans les groupes de femmes, régimes de retraite sanctionnés, perte généralisée de rémunérations avec l’ensemble des coupures dans les programmes sociaux (garderie, frais en santé et en éducation etc…). Qs devra avancer des perspectives de lutte claires contre ces offensives. La situation internationale doit aussi apparaître dans le contexte. Ailleurs, les femmes luttent aussi pour leur autonomie économique. Des échanges, des discussions peuvent s’avérer intéressants. De plus, il va falloir penser à articuler un projet de revendications autour de la démission du gouvernement Couillard. Les Québécois et Québécoises n’ont pas voté pour ça. La lutte dans le secteur public va représenter un défi contre l’austérité et la notion de grève sociale va aussi revenir d’actualité dès l’automne. La journée du 1 mai doit se répéter et porter des fruits de mobilisation et d’espoir de victoires.

Sur l’intersectionnalité, les discussions devront se poursuivre en lien aussi avec le mouvement des femmes pour approfondir davantage les analyses. Les articulations entre les différents systèmes d’oppression doivent être mieux comprises.

Enfin la place des femmes dans le parti oblige à affiner la réflexion sur la parité dans les candidatures mais aussi dans les instances. Et ce questionnement devrait entraîner la reconnaissance que les femmes ont de s’organiser entre elles de façon non mixte d’où l’importance du mouvement des femmes pour lutter contre le patriarcat. Ce sont les liens de Qs avec les mouvements sociaux qui seront ainsi interrogés.

Ginette Lewis

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