Ainsi, Kim qui travaille en Outaouais nous a expliqué les difficiles conditions de travail des personnels de soutien de son territoire. Il y a plus de 80 corps d’emploi dans son unité d’accréditation. Seule exception à cette longue liste, les concierges. Ces derniers ne sont plus à l’emploi des commissions scolaires de la région. Ce sont des sous-traitants qui envoient des équipes faire l’entretien en début et fin de journée et les personnels de soutien en place suppléent à ces manques. Il faut aussi savoir que la précarité est la marque de commerce de ces salarié.e.s. En effet, elles (majoritairement des femmes monoparentales) ont des contrats qui se terminent au dernier jour de classe et sont renvoyées à l’assurance-emploi annuellement.
De plus, toutes les équipes de travail n’ont pas eu le même traitement au cours des dernières semaines. Certaines ont été mises à pied dès la fermeture des écoles (techniciennes en éducation spécialisée, surveillan.te.s de dîner,…), d’autres ont vu leurs heures réduites à 5h semaine alors que d’autres affecté.e.s aux services de gardes pour les travailleuses et travailleurs essentiels ont vu leurs heures augmentées. Plusieurs membres de son syndicat ont dû avoir recours aux banques alimentaires en attendant la PCU. Même avec la réouverture des classes depuis le 11 mai, la fréquentation scolaire oscillant entre 30% et 50%, le nombre d’heures à leur contrat a été diminué. Comment vivre avec un salaire de 20 heures semaines ?
Malgré ces difficultés, elles ont pu garder contact en établissant des liens avec chacun des 80 établissements du territoire. Elles ont même pu être impliquées dans les instances syndicales virtuelles de négociation que la CSQ a mis en place et Kim était bien au fait des tactiques du gouvernement Legault pour empêcher la négociation alors qu’il annonçait des avancées sur ce terrain en conférence de presse.
Alex, de son côté, nous a relaté l’expérience des plus intéressante qu’ils ont vécue au sein de son école primaire à Montréal. Alors que son syndicat local et sa fédération ne leur apportaient pas de soutien concret à la veille de la réouverture des écoles en mai dernier, les membres de son école se sont regroupés, toutes allégeances syndicales et corps d’emploi confondus dans un « zoom » d’une durée de 4 heures qui leur a permis d’établir 11 revendications locales présentées à la direction de leur école pour assurer un retour en classe sécuritaire tant pour le personnel que pour les enfants. Cette expérience encouragée par le collectif éducation de Lutte Commune montre les lacunes au sein des organisations syndicales quant à l’absence de vie sociopolitique et de travail en réseau intersyndical pour décupler la résistance à la base, dans les écoles. Pour trouver une réponse satisfaisante aux besoins telles les mesures sécuritaires en temps de pandémie, les mises à pied en formation professionnelle ou l’absence de suppléant.e.s, il faut s’auto-organiser.
La balle a été reprise au bond par Mélissa, enseignante au New-Jersey, qui nous a expliqué le parcours du combattant réalisé par les enseignant.e.s de UCORE, un caucus de gauche lié à Labor Notes qui travaille depuis plus de 10 ans pour la justice sociale, la démocratie syndicale, pour des organisations de base structurées, à la défense des parents et de la communauté, pour de meilleures conditions de travail, contre la privatisation des écoles publiques. Ce travail organisationnel initié à Chicago se développe à la grandeur du pays. Ils ont des représentants au sein des exécutifs syndicaux locaux à Los Angeles et y travaillent activement à New-York et Philadelphie. Au Massachusetts, ils ont réussi à mettre en place un caucus qui regroupe des enseignant.es de tout l’État.
Ces expériences syndicales à la base ont ouvert la porte à une réflexion sur l’opportunité de développer sur le terrain des alliances intersyndicales que ce soit au sein des établissements scolaires, d’un syndicat ou d’une région. Ce travail amorcé suite au camp de formation de Lutte Commune en février dernier et les webinaires organisés conjointement avec le comité intersyndical de QS Montréal doit se poursuivre et tel que l’indiquait Kim en fin de rencontre : « Il faut garder contact, se réunir autrement, aller de l’avant et définir ensemble ce que nous voulons et le faire. »
2020/06/11
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