Édition du 18 juin 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Québec

Politiques d’immigration à deux vitesses : les petites phrases réactivant les frontières qui divisent

Le coup d’éclat de Paul St-Pierre Plamondon, déclarant le 5 novembre dernier qu’une « crise sociale sans précédent » menace le Québec à cause du nombre d’immigrants, a fait long feu. Cependant, de petites phrases en petites phrases, les dirigeants politiques sur le spectre de droite construisent lentement mais sûrement une figure du bouc-émissaire en la personne de « l’immigrant ». Ainsi, la déclaration de St-Pierre Plamondon surenchérissait sur celle du ministre Jean Boulet qui avait lancé une fake news à l’automne 2022, en disant que « 80% des immigrants ne travaillent pas, ne parlent pas français, ou n’adhèrent pas aux valeurs de la société québécoise ». Il avait dû se rétracter, mais il est resté ministre, passant de l’Immigration au Travail. Après tout, lui-même ne faisait que s’inscrire dans les pas de son Premier ministre, François Legault, qui avait déclaré au printemps 2022 que l’on se dirigeait vers une « louisianisation » du Québec à cause des immigrants allophones.

Par Carole Yerochewski et Cheolki Yoon, membres du Centre des travailleuses et travailleurs immigrants (CTTI), respectivement sociologue et professeur adjoint à l’Université St-Paul

Cette politique du bouc-émissaire que ne dément pas le gouvernement Trudeau – celui-ci a aussi rendu l’immigration responsable de la pression sur les capacités d’accueil et la crise du logement –, n’est peut-être pas destinée à fermer les portes du Canada comme les États-Unis l’avaient fait en 1921, plongeant dans le désespoir les européens et notamment les Allemands étranglés par leurs dettes de guerre. C’est à présent l’attitude de l’Union européenne, qui laisse périr en Méditerranée des milliers et milliers de migrants, aggravant dans les pays du Sud global les crises sociales et humanitaires qui résultent d’économies défaillantes et de la multiplication des conflits – des conflits qui sont souvent alimentés par les puissances occidentales. Mais le Canada peut-il se passer de l’immigration ?

Cependant, on ne peut pas ne pas s’inquiéter de voir se multiplier les petites phrases. Non qu’il faille croire que le « peuple » va se laisser berner et venir gonfler l’extrême-droite : il n’est pas si ignorant des ressorts de la pénurie de logements sociaux ou de celle de l’inflation ou des raisons du déclin du français, délaissé par de jeunes francophones abonnés aux diffuseurs d’images, de musiques et de jeux plus souvent anglophones. Il n’est en outre pas prouvé que la montée de l’extrême-droite en Europe repose sur les classes populaires ; celles-ci ont plutôt tendance à s’abstenir massivement faute de se sentir représentées.

En revanche, les classes aisées et dirigeantes, qui vont chercher des appuis partout, ne rechignent pas à passer des compromis avec ces personnages politiques peu ragoutants que sont les Giorgia Meloni, Rikka Purra, Geert Wilders conduisant des gouvernements ou y siégeant en Italie, Finlande, Pays-Bas, ou à accepter comme le ministre Darmanin en France des amendements d’extrême-droite dans un énième projet de loi sur l’immigration (trente en trente ans !). Car ni les unes ni les autres ne sont prêtes à perdre la main sur les politiques d’immigration : le contrôle des flux de main d’œuvre est au cœur du capitalisme, au risque sinon de déstabiliser les rapports de force entre les travailleurs et travailleuses et le Capital, comme Marx l’avait déjà bien souligné, en parlant de surpopulation et d’armée de réserve industrielle parmi un prolétariat n’ayant plus d’autre possibilité pour survivre que de vendre sa force de travail.

Ce que Marx n’avait pu anticiper, c’est que, compte tenu du colonialisme et des rapports de domination entre le Nord et le Sud, qui se sont approfondis au cours du 20ème siècle, l’armée industrielle de réserve s’est surtout concentrée dans ces pays du Sud global. Si bien que sa circulation de plus en plus importante vers les pays du Nord, en particulier vers le Canada, bouscule les fondements des politiques d’immigration construites au cours du 20ème siècle.

Grosso modo, au Canada, ces politiques reposent d’un côté sur une voie d’accès vers la résidence permanente et donc une forme de citoyenneté, surtout utilisée jusqu’il y a trente à quarante ans par des européens ou des francophones recherchés par le Québec (comme le montrent les données des recensements de Statistiques Canada) et, d’un autre côté, sur des programmes de permis temporaires qui se divisent en deux principaux volets : le Programme de mobilité internationale qui inclut différents cas de figure dont le déplacement de salariés entre filiales, les jeunes de certains pays signataires d’accords avec le Canada ou des situations spécifiques qui sont utilisées, dans bien des cas, pour des emplois considérés hautement qualifiés et principalement pourvus par des travailleurs du Nord ; le programme des travailleurs étrangers temporaires (TET) incluant les programmes restrictifs de permis temporaires qui s’adressent essentiellement aux populations du Sud global, car dépendants d’accords bilatéraux entre le Canada et certains pays comme les Philippines, le Mexique et le Guatemala. Les permis sont particulièrement restrictifs, ou dits « fermés », parce qu’ils sont émis pour un employeur unique, qui a le pouvoir de le rompre unilatéralement et donc de faire perdre le statut migratoire, ce qui mène en conséquence au renvoi dans leur pays des travailleuses et travailleurs qui demandent le respect de leurs droits. Jusqu’en 2002, ces programmes restrictifs de travail temporaire étaient principalement destinés à apporter de la main d’œuvre saisonnière dans l’agriculture, ou à fournir des aides familiales ; celles-ci, car il s’agit majoritairement de femmes, étaient les seules à avoir accès à la résidence permanente, mais devaient cependant attendre avant de pouvoir faire la demande et se faisaient (se font) entretemps durement exploiter (et d’autant plus que jusqu’en 2014, elles étaient obligées de vivre chez le particulier employeur qui abusait fréquemment de la situation).

Ce système de migration peut être qualifié d’héritage colonial. Il s’est perpétué au Canada avec notamment la création en 1966 d’un programme pilote destiné à faire venir de la main-d’œuvre jamaïcaine de Porto Rico en Ontario, pour répondre aux besoins des fermiers, tout en s’assurant que ces personnes ne resteraient pas au pays. Il n’est pas spécifique au Canada. D’autres pays du Nord recourent à la main d’œuvre du Sud selon le même schéma. Ces programmes bilatéraux ont été dénoncés à maintes reprises à l’issue de travaux de recherche pour leur sexisme et racisme car ils servent à mettre à la disposition des employeurs une force de travail (physique, émotionnel, etc.) choisie selon son sexe et sa nationalité, ces critères servant à attribuer des « compétences » auxquelles la main d’œuvre doit se conformer. Au Canada, cette forme d’exploitation genrée et racisée a connu un essor particulièrement important à partir de 2002, lorsqu’a été élargi aux emplois dits peu spécialisés le volet programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET) d’abord réservé aux emplois qualifiés ou à certains emplois marqués par la rareté de la main-d’œuvre. En 2008, en incluant les étudiants étrangers qui sont aussi de plus en plus nombreux à venir des pays du Sud global, mais qui appartiennent dès lors à des classes sociales ayant les moyens de payer les frais d’inscription, le nombre d’entrées au Canada de personnes migrantes ayant un statut temporaire a dépassé le nombre d’entrées par la résidence permanente.

Depuis, la croissance des entrées de travailleuses et travailleurs temporaires ne s’est pas démentie, et ce malgré différentes interventions dont celle au Québec de la Commission des Droits de la Personne et des Droits de la Jeunesse, qui a clairement exprimé dès 2012 que ces programmes entretiennent la discrimination systémique à l’égard des populations migrantes en raison de leur sexe, de leur langue, de leur condition sociale, de leur origine et de leur « race » – la majorité des personnes occupant des emplois dits peu spécialisés proviennent du Guatemala, du Mexique et des Philippines. Même, le recours à ces programmes destinés à exploiter mais aussi à contrôler les flux de main-d’œuvre venant des pays du Sud global, a encore été facilité depuis le gouvernement Harper, en simplifiant les démarches des employeurs pour obtenir des autorisations à procéder à de tels recrutement ou en les en dispensant dans certaines conditions. Parallèlement, alors que les personnes issues des pays du Sud global constituent depuis plusieurs décennies la majorité des candidats empruntant la voie de la résidence permanente, les raisons d’être de cette politique ont a été en quelque sorte dénaturées à la fin des années 2010, tant par le gouvernement Trudeau que celui du Québec, puisque l’accès n’est plus ouvert à toutes et tous citoyens, mais a été restreint aux personnes dont l’intérêt pour travailler au Canada correspond aux besoins prioritaires de secteurs d’activité dans l’année où s’effectue la demande.

Ainsi, que l’on considère l’une ou l’autre des voies d’accès au Canada, on ne peut que constater qu’elles réduisent les personnes migrantes à leur utilité économique, qui est le plus souvent de combler à moindre coût les postes délaissés pour leur salaire insuffisant et leurs difficiles conditions de travail. A ainsi été franchie la ligne qui sépare les personnes considérées comme des êtres humains et comme des citoyen-ne-s à part entière, des autres, dont la vie compte moins.

Nombre d’organisations communautaires et syndicales ne s’y trompent pas, qui réclament à présent l’abolition de ce système d’immigration à deux vitesses, source d’abus, de sous-salaires et d’heures supplémentaires non payées, de violences et harcèlements psychologiques et sexuels, et d’accidents du travail. Un rapporteur spécial de l’ONU, Tomoya Obokata, venu au Canada en septembre dernier pour enquêter à ce sujet a clairement conclu que le « permis fermé » ouvrait la porte à des formes d’« esclavage moderne ». Et pour cause : le statut migratoire dégradé agit auprès des employeurs, qu’on le veuille ou pas, comme un signal stigmatisant celles et ceux qui les occupent, les épinglant comme des sous-citoyennes et sous-citoyens.

Depuis la visite du rapporteur de l’ONU, le Comité permanent sur la Citoyenneté et l’Immigration de la Chambre des Communes s’est saisi de ce sujet ainsi que de celui des personnes sans papier, très nombreuses au Canada (estimé entre 500 000 et 600 000) en raison de ces politiques. Car ce système d’immigration produit à grande échelle des pertes de statut. Si la vie des employeurs a été simplifiée, celle des détenteurs de permis temporaires fermés ne l’a été en aucun cas, malgré l’ouverture, formellement, de l’accès à la résidence permanente. En pratique, les obstacles sont nombreux, si bien que très peu de personnes titulaires du permis fermé arrivent à obtenir le statut de résident permanent (1 sur 14 entre 2015 et 2022). Cette proportion n’est qu’une moyenne : au Québec, les personnes occupant des emplois peu spécialisés continuent à quelques exceptions de se voir interdire l’accès à la résidence permanente – même les aides familiales ont vu la porte se refermer de ce fait – et se heurtent à l’insuffisance des moyens disponibles pour la francisation et à la difficulté des tests de français, ce que le gouvernement québécois a fini par reconnaître. Par ailleurs, nombre de personnes fuyant des employeurs abusifs ne réussissent pas à obtenir ce « permis ouvert pour personnes vulnérables » prévu par Ottawa dans les cas d’abus, car les démarches sont extrêmement lourdes, ou elles n’arrivent pas à obtenir de nouveau un permis « fermé » à l’issue de la durée d’un an accordé avec ce permis ouvert.

Outre la perte de statut, en raison de la nature même des politiques d’immigration qui institutionnalisent la précarité comme moyen de gérer les flux de main d’œuvre en provenance du Sud global, on peut aussi se retrouver sans-papiers, quoique dans une moindre mesure malgré ce que laisse croire la large couverture médiatique du « chemin Roxham », à cause de l’ineffectivité ou de l’insuffisance des politiques humanitaires, qui accordent trop souvent au compte-goutte la résidence permanente et la refusent pour des raisons aberrantes (voir le documentaire l’Audience, où le juge refuse le statut de réfugié à un couple avec enfants considérant qu’il « magasine » le pays dans lequel il veut vivre !). Et c’est sans compter les restrictions apportées à des programmes comme le parrainage collectif, victime de son engouement auprès d’une population prête à accompagner financièrement pendant un an des demandeurs d’asile une fois arrivés au Canada. Il faut aussi rajouter au tableau les quotas annuels imposés par Québec, qui restreint même les entrées par regroupement familial, retardant du coup la réunion des familles des années durant – des conséquences guère différentes de celles résultant de la politique « tolérance zéro » édictée par Trump envers les réfugiés provenant du Mexique et qui avait abouti à séparer près de 4 000 enfants de leurs parents.

Les annonces début novembre des gouvernements fédéral et québécois sur la planification de l’immigration n’ont pas montré de volonté de corriger ces politiques perpétuant la domination des travailleuses et travailleurs du Sud global. Les seuils d’entrées de résidents permanents sont comme « gelés » pour des raisons évoquées par les « petites phrases » mentionnées au début de cet article, soit le fait que l’immigration serait responsable des tensions sur les capacités d’accueil, de la crise du logement et, au Québec, du déclin du français. Dans le débat public, le seuil d’entrée avec le statut de résident permanent fait cependant fonction de l’arbre qui cache la forêt des personnes au statut temporaire, qui habitent ici et se débrouillent pour parler l’anglais ou le français afin de s’intégrer – rêve de toutes et tous les immigrants. Or, les annonces ont été totalement muettes sur cet enjeu majeur que constitue le devenir des personnes sans-papiers et de celles ayant un statut temporaire.

Pourtant, ces dernières représentent au 4ème trimestre 2023 environ 2,5 millions de personnes au Canada, dont environ 528 000 au Québec seulement, car la croissance des entrées de travailleuses et travailleurs temporaires est de loin la plus importante par rapport au reste du Canada, grâce aux encouragements du gouvernement qui en a facilité le recours. D’ailleurs la ministre de l’Immigration n’a pu éviter de parler de ces travailleurs temporaires dont l’ampleur avait été révélée par des médias quelques semaines avant l’annonce de la planification. Elle a ainsi indiqué vouloir mettre une condition de maîtrise minimale du français à l’oral pour obtenir un renouvellement au bout de trois ans d’un permis temporaire, ce qui a paru totalement indécent aux yeux des organisations syndicales et communautaires œuvrant avec les personnes migrantes, ou pour faire respecter leurs droits humains, puisqu’on ne leur donne même pas la possibilité de s’installer au Québec avec un statut permanent ! Cela semble aussi ingérable par les employeurs, qui devraient assurer des heures de français sur le temps de présence au travail alors que bon nombre d’entre eux ne respectent même pas les droits du travail.

Il est vrai que le 14 décembre dernier, Marc Miller a donné une interview au Globe and Mail rappelant la promesse faite par Trudeau, il y a déjà deux ans, concernant l’adoption d’un programme de régularisation de grande ampleur. Cependant, l’interview montre que les objectifs sont restreints là encore aux secteurs d’activité pour lesquels les immigrants sont économiquement utiles, comme la construction et la santé, où ils sont jugés « indispensables », et le processus serait très long (s’étirant jusqu’en 2026) pour des raisons explicitées dans l’interview, qui se réfèrent à la montée d’un sentiment anti-immigrant parmi la population – un sentiment que les dirigeants politiques sont en réalité en train d’amplifier. Tout se passe donc comme si cette annonce visait surtout à rassurer des employeurs confrontés à des pénuries de main-d’œuvre en raison des mauvaises conditions de travail qu’ils offrent et qui ont besoin de conserver une main-d’œuvre qu’ils auront formée. Car les organisations communautaires ou syndicales qui se mobilisent pour obtenir la régularisation des personnes sans papier demandent de leur côté un programme véritablement inclusif.

Longtemps, face aux politiques discriminatoires d’immigration et à leurs conséquences parfois lourdes sur l’état physique et mental des personnes, des organismes tels que le Centre des travailleurs et travailleuses immigrants et le Réseau d’aide aux travailleuses et travailleurs migrants agricoles du Québec, ont œuvré de façon assez isolée dans leurs premières années, ne recevant un soutien que de la part d’autres organismes communautaires, puis, petit à petit, d’organisations syndicales. Mais avec la pandémie, qui a jeté une lumière crue sur toutes ces personnes migrantes, précaires ou sans-papier, qui ont dû continuer à travailler en s’exposant à l’épidémie, perdant parfois la vie, ces organisations de travailleuses et travailleurs migrants ont acquis une visibilité ou une reconnaissance indéniable, tandis que le sort de ces personnes alors qualifiées d’essentielles n’a pu rester dans l’ombre, et ce d’autant moins qu’elles ont été les premières à se mobiliser pour faire reconnaître leurs droits.

À présent, au Québec en particulier, les organisations syndicales sont impliquées dans la campagne pour la régularisation des personnes sans-papier, qui rassemble une trentaine d’organismes communautaires d’envergure provinciale et même internationale (voir comme exemple la lettre ouverte parue dans La Presse du 18 décembre 2023). En outre, le contenu de la campagne a commencé à s’élargir pour prendre en compte la situation des travailleuses et travailleurs temporaires et réclamer l’abolition du permis fermé au profit d’un permis ouvert et d’un statut permanent. Les organisations syndicales, qui ont décidé de se coordonner sur ces sujets, ont publié un communiqué après la présentation de la planification des seuils d’entrée de résidents permanents par Québec, dénonçant clairement l’absence de ces mesures et le silence radio sur ces personnes migrantes.

Un bras de fer s’est véritablement engagé entre ceux et celles – personnes migrantes, organismes qu’elles ont créés ou œuvrant à leurs côtés, organisations syndicales - qui réclament la fin de ce système d’immigration discriminatoire et raciste, et les classes dirigeantes qui cherchent sans pudeur à travers les responsables politiques des appuis ou des voix jusqu’à l’extrême-droite. Bien sûr, une partie du patronat qui est en panne de main d’œuvre est aussi prête à soutenir l’accord d’un statut permanent aux personnes migrantes. Certains, dans les petites et moyennes entreprises, ont tout de même des valeurs humanistes. Mais en tant que classe, ils n’ont aucun intérêt à ce que les travailleurs et leurs organisations gagnent ce bras de fer qui remet en cause leur contrôle des flux de main-d’œuvre provenant des pays du Sud global. Car c’est tout un modèle économique qu’il s’agit de préserver et qui repose sur une main-d’œuvre flexible et à bas salaires, permettant de vendre les fruits et légumes cultivés au Québec moins chers, de faire de la province un espace d’entreprises logistiques à moindre coût, entre autres exemples.

Aussi, on peut faire l’hypothèse que toutes ces « petites phrases » qui se multiplient depuis la fin de la pandémie sont une réponse à la montée des contestations de ces politiques d’immigration qui reposent sur la colonialité du pouvoir et qui entretient le racisme systémique. Ce n’est pas un hasard si, pour gagner ce bras de fer, les élus politiques n’hésitent pas à faire implicitement référence aux représentations racistes latentes en faisant de « l’immigrant » la figure du bouc-émissaire face aux différents défis que traversent le Canada et tant d’autres pays occidentaux qui ont tant et si bien joué ce jeu dangereux que certains se retrouvent avec des partis d’extrême-droite au gouvernement. En tout cas, si tant le gouvernement fédéral que celui du Québec se défendaient de poursuivre des objectifs racistes ou inconsidérés, il n’en reste pas moins que transformer les personnes migrantes en bouc-émissaire est un moyen de tenter de les isoler, de leur faire perdre un pouvoir de négociation qu’elles ont durement acquis ces dernières années.

L’issue du bras de fer dépendra des mobilisations en cours et donc aussi de l’engagement des syndicats, notamment au Québec (mais pas seulement). Feront-ils de ces enjeux une campagne prioritaire, en formant leurs conseillers et leurs syndicats locaux à connaître et faire valoir les droits des travailleuses et travailleurs migrants, en en expliquant les enjeux et en les appelant à se mobiliser sur ces sujets ? Car les syndicats côtoient de plus en plus souvent ces travailleuses et travailleurs temporaires, telle cette préposée aux bénéficiaires dans une résidence privée syndiquée où pourtant elle ne touche que le salaire minimum et non celui de la convention collective…

De tels exemples prolifèrent. Aussi, on aurait tort de considérer anodines ces « petites phrases » qui échappent des interventions médiatiques des responsables politiques. Elles parsèment le paysage d’appels au resserrement « des citoyens de souche » contre « l’autre ». Elles jouent sur le racisme systémique qui nourrit des représentations sociales par définition inconscientes, non intentionnelles, qui ne conduisent pas nécessairement à voter consciemment pour l’extrême-droite, mais peuvent aboutir à faire passer le respect des droits des « immigrants » au second plan. C’est cela qui ne doit pas se produire.

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