Réunies en conférence de presse, les porte-parole des trois organisations ont voulu rappeler au gouvernement qu’il ne peut plus laisser la situation se détériorer et qu’il faudra plus que des réparations de fortune pour mettre fin à la crise. C’est de mesures structurantes que le Québec a besoin, ont-elles rappelé. Le Collectif pour un Québec sans pauvreté, le FRAPRU et le RAPSIM en ont plusieurs à proposer et, à quelques jours de la mise à jour économique, ils ont tenu à les rappeler au ministre des Finances, Eric Girard.
Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM) : Annie Savage, directrice
« Les membres du RAPSIM notent une augmentation de l’itinérance chronique, mais également une augmentation de la détresse par des personnes qui ne sont pas connues du milieu et qui viennent dans leurs ressources (femmes ainé.es, familles, personnes migrantes à statut précaire). Pour 2023-2024, le gouvernement de la CAQ a annoncé 20 M $ pour répondre aux besoins immédiats en itinérance partout au Québec. Or, à Montréal seulement, c’est minimalement le double qu’on a besoin, juste pour maintenir l’offre de réponses qu’on sait insuffisantes.
« Pour prévenir et réduire l’itinérance, l’ensemble des ministères doivent s’engager dans des investissements à long terme. Nous nous attendons à ce que l’argent annoncé en matière d’itinérance soit investi dans des mesures pérennes et adaptées à la réalité du terrain, résultant d’une réelle concertation entre les ministères québécois. Nous réitérons également la nécessité d’investir dans le développement et la rénovation d’infrastructures pour permettre l’émergence de réponses adaptées aux besoins des communautés et sortir une fois pour toutes d’une logique d’urgence. Pour un réel soutien aux Montréalais.es en situation d’itinérance, le gouvernement du Québec doit agir dans une approche globale. »
Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) : Véronique Laflamme, porte-parole
« Les besoins de logements sociaux sont connus. 129 000 ménages locataires du Québec consacrent plus de la moitié de leur revenu pour se loger avec un revenu médian annuel de 16 800 $. Ces besoins ne sont pas nouveaux, mais ils s’accentuent avec la pénurie généralisée qui s’est installée, la hausse rapide du coût des loyers sur le marché privé et la spéculation qui contribue à la multiplication des évictions.
« Depuis l’arrivée au pouvoir de la Coalition Avenir Québec, on demande des investissements plus importants et récurrents dans le logement social. On les attend toujours. La lenteur du gouvernement à réagir à la crise du logement contribue à la précarisation d’un bon nombre de locataires, et à la hausse de l’itinérance.
« On espère que la mise à jour économique prévoira enfin un financement suffisant et un objectif de développement du logement social sur plusieurs années pour que le plan d’action en habitation promis par la ministre ait une colonne vertébrale. Il faut aussi un programme gouvernemental pérenne, qui se suffit à lui-même pour que la construction ne se fasse pas attendre et que les ménages les plus pauvres et ceux victimes de discrimination ne soient pas constamment exclus. C’est le gouvernement qui a choisi d’abandonner AccèsLogis au lieu de l’améliorer comme il l’avait promis. Maintenant il doit proposer une vraie solution de rechange. C’est inconcevable que le Québec n’ait pas un programme adéquat de logement social. »
Collectif pour un Québec sans pauvreté : Virginie Larivière, porte-parole
« Quand le dernier Bilan-Faim nous apprend qu’en 2023, une personne sur dix a eu recours aux services des banques alimentaires au Québec, c’est le gouvernement lui-même qui devrait tirer la sonnette d’alarme. Des gens n’arrivent pas à manger à leur faim au Québec. Cela devrait devenir une priorité nationale. Ce ne sont pas un financement accru des banques alimentaires ou des appels à la charité qui régleront le problème. Ce ne sont pas non plus de nouvelles aides ponctuelles, qui ne font que freiner momentanément l’appauvrissement des gens, sans leur permettre d’améliorer leurs conditions de vie.
« Il faut reconnaître que les nombreuses crises qui secouent le Québec - logement, itinérance, insécurité alimentaire - ont un dénominateur commun : l’insuffisance de revenu. Les personnes en situation de pauvreté doivent être mieux soutenues, dès maintenant. Pourquoi tolérer que la majorité des personnes assistées sociales, par exemple, reçoivent de l’État à peine de quoi couvrir la moitié de leurs besoins de base ? Pourquoi une telle négation de leurs droits ?
« L’augmentation du revenu des personnes en situation de pauvreté peut évidemment passer par la hausse du montant des prestations d’assistance sociale, mais aussi par celle du salaire minimum ou du crédit d’impôt pour solidarité, ou même par l’élargissement du crédit d’impôt pour soutien aux aîné.es à l’ensemble des aîné.es. Il est de la responsabilité du gouvernement d’assurer au minimum la couverture des besoins de base. C’est une simple question de respect de la dignité et des droits des personnes en situation de pauvreté. »
Conclusion
En terminant, le Collectif pour un Québec sans pauvreté, le FRAPRU et le RAPSIM ont tenu à rappeler que de simplement répondre à quelques urgences ne réglera pas les problèmes. Le gouvernement doit selon eux s’assurer que les mesures annoncées lors la mise à jour économique contribueront durablement à lutter contre la pauvreté et l’appauvrissement. Et il ne s’agit là que d’une première étape.
Au-delà de la mise à jour économique, le gouvernement doit déjà penser au prochain budget et au 4e plan de lutte contre la pauvreté, qui est attendu en 2024. Voilà une belle occasion de doter le Québec d’un plan d’action cohérent et ambitieux, qui visera la sortie de la pauvreté de l’ensemble de la population.
Pour sa part, le Plan d’action gouvernemental en habitation attendu incessamment devra absolument contenir des mesures structurantes comme le financement suffisant et pluriannuel du logement social, incluant celui d’un programme d’habitations à loyer modique pour répondre aux besoins des locataires les plus pauvres, soutiennent les trois organisations qui espèrent une cohérence avec les objectifs du plan de lutte contre la pauvreté et ceux de la Politique nationale de lutte à l’itinérance.
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