La portion RREGOP (Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics) des actifs de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) représente 41 milliards de dollars. De ce montant, 9,9 milliards sont investis au Québec. Et de cette dernière somme, 5,6 milliards sont investis dans le secteur privé dans un grand nombre d’entreprises d’ici, parmi lesquelles on trouve les suivantes : Cirque du Soleil, Domtar Corp, SSQ Vie, JA Bombardier, Gaz Métro et… Quebecor Media.
Un empire médiatique sans conscience journalistique
Dans sa campagne de dénigrement à l’égard des syndicats, des syndiqués et des travailleuses et des travailleurs du secteur public, l’Empire Quebecor bafoue un bon nombre de règles d’éthique journalistique pour arriver à ses fins, c’est-à-dire alimenter les préjugés sur les fonctionnaires et entretenir une jalousie malsaine entre le privé et le public ainsi qu’entre les jeunes travailleurs et les retraités.
De plus, par mauvaise foi ou par incompétence, s’appuyant notamment sur une étude biaisée du groupe CIRANO, les auteurs de ces reportages dépeignent une situation incomplète et donc erronée des régimes de retraite des employés de l’État, omettant par le fait même de remplir leur devoir à l’égard du droit du public à une information complète.
Outre le plaisir mesquin que trouvent l’Empire Quebecor et ses valets à casser du sucre sur le dos des employés de l’État, ces reportages nous apparaissent encore plus graves par l’irresponsabilité totale qui anime leurs auteurs. En effet, ceux-ci n’hésitent pas à noircir sans fondement la situation des finances publiques, accusant la trop grande générosité des régimes de retraite de secteur public d’en être responsable. Et comme si tout cela était fait exprès justement pour créer un certain sentiment de panique au sein de la population.
Un portrait bien différent
Mais la situation est loin d’être aussi sombre que l’on tente de nous le faire croire. En effet, la mise à jour de l’évaluation actuarielle du RREGOP au 31 décembre 2010 révèle des surplus de 4,453 milliards, ce qui représente 11,3 % de la valeur actuarielle des prestations acquises et payables de la caisse des participants.
Faut-il rappeler également que la rémunération des employés de l’État est globale, c’est-à-dire qu’elle tient compte du salaire et des avantages sociaux ? Strictement en matière salariale, la rémunération se situe bien en deçà de salaires versés dans plusieurs entreprises privées, comme le rappelait Jean-Robert Sansfaçon plus tôt cette semaine dans le journal Le Devoir. Le gouvernement du Québec a d’ailleurs peine à attirer des candidates et des candidats, il est aux prises avec des pénuries de main-d’œuvre dans toutes les catégories d’emplois des secteurs de la santé, de l’éducation et de la fonction publique.
Pas de cadeau pour les employés de l’État ?
La propagande de Quebecor laisse aussi supposer que les retraités de l’État « siphonnent » indûment la caisse de l’État sans autre considération que de se payer une retraite dorée au soleil. Pourtant, la rente moyenne versée aux retraités du RREGOP en 2010 est de 17 767 $, selon le Rapport annuel 2010 de la Commission administrative des régimes de retraite et d’assurances (CARRA). J’ajouterai qu’il ne faut pas perdre de vue que les employés de la fonction publique ont payé durant toute leur carrière pour accumuler ces rentes. Personne ne leur a fait de cadeau, pas plus du ciel que du gouvernement.
Une autre manipulation de ces reportages est de laisser croire que les salariés n’assument aucun risque alors que, dans la réalité, les cotisants au RREGOP partagent le risque, c’est-à-dire que les cotisations des participants s’ajusteront pour tenir compte des engagements du régime. Donc, lorsque le régime est en mauvaise santé financière, ce sont les travailleuses et les travailleurs qui assument la hausse de cotisation.
Des syndicats on ne peut plus responsables
Encore plus pernicieuse est cette tentative d’essayer de faire croire à la population que les « méchants » syndicats se moquent éperdument de l’état des régimes de retraite et, par la bande, des finances publiques. C’est totalement faux puisque nous suivons quotidiennement l’évolution de ces régimes et faisons des recommandations lorsque nécessaire.
C’est d’ailleurs dans cet esprit que, lors de la dernière négociation, nous avons modifié notre méthode de calcul pour ajuster le taux de cotisation afin de tenir compte de la réalité. Nous avons également mis en place des méthodes plus efficaces afin d’avoir une lecture plus actuelle de cette évolution, plutôt que d’attendre les évaluations actuarielles tous les trois ans, comme c’était le cas auparavant.
À l’inverse de ce que prétend la propagande de Quebecor, nous sommes préoccupés, comme toutes les citoyennes et tous les citoyens du Québec, par la situation financière mondiale et par l’état des finances publiques du Québec. Le RREGOP est un régime comparable à ce qui est offert dans les autres provinces, et à certains égards, notamment l’indexation des rentes, il est moins performant. Il a été établi et pensé dans une perspective à long terme. Il nous faut donc être patients. D’ici quelques années, les ajustements de marché seront complétés et les rendements seront possiblement de nouveau au rendez-vous.
Un débat public/privé qui n’a pas lieu d’être
Le plus malheureux dans ces articles, c’est qu’on essaie encore une fois d’alimenter un faux débat public/privé. Les employés du secteur privé font des choix différents de ceux du secteur public. Cependant, les uns comme les autres sont des citoyennes et des citoyens à part entière qui, au moment de leur retraite, continueront de contribuer à la vie économique québécoise par leurs dépenses dans l’économie.
Ces dépenses généreront des retombées qui profiteront à l’activité économique globale, qu’elle soit privée ou publique. Dans ce contexte, au lieu de tirer à boulets rouges sur les employés et les retraités du secteur public, l’Empire Quebecor ferait œuvre utile pour la société en menant une campagne, à nos côtés, pour le droit à un revenu décent pour tous les retraités du Québec.