Édition du 17 décembre 2024

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Afrique

Le conflit en Côte d'Ivoire, les femmes prises à partie

La violence ne cesse de s’intensifier en Côte d’Ivoire. Le président battu, selon la communauté internationale, M. L. Gbagbo refuse toujours de quitter le poste. Celui qui a gagné cette élection en novembre dernier, M. A. Ouattara, reconnu par la communauté internationale, attend toujours avec son entourage dans un hôtel d’Abidjan de pouvoir exercer ses fonctions. [1]

Dans cette situation, les deux camps s’affrontent par divers moyens alors que, de l’extérieur de multiples tentatives ont lieu pour obliger le perdant à partir. L’Union Africaine multiplie les ambassades, l’ONU qui est présente sur le terrain, continue d’exiger le respect du résultat des urnes et a mis en place des sanctions envers M. Gbagbo et son entourage. Les gouvernements occidentaux font pression, Paris et Washington n’étant pas les moindres.

Escalade sur le terrain

Depuis février toutefois, il y a une escalade des moyens du côté du perdant. M. Gbagbo est entouré depuis longtemps, de diverses milices dont Les patriotes, groupes de jeunes extrêmement violents complètement inféodés à sa cause. Malgré un embargo sur les achats d’armes décrété par l’ONU, il en entre encore dans le pays et les troupes Gbagbo sont bien équipées. Il semble aussi que l’armée ivoirienne lui soit encore fidèle, ses troupes opèrent au su et au vu de tous. Tous ces éléments terrorisent les populations, principalement celles qui sont reconnues partisanes de M. Ouattara. Dans Abidjan, des quartiers sont étiquetés selon les allégeances politiques des habitants.

Celui d’Abobo est reconnu pour son support à M. Ouattara. Sa population y subit, depuis plusieurs semaines, les incursions des troupes de M. Gbagbo de nuit ou au petit matin. Ils tirent à mitraillette, au fusil et lancent des grenades même dans les maisons. Tous sont terrorisés et le sommeil devient impossible.

La population s’implique

La population ne reste pas impassible devant ce qui lui arrive. La peur du retour de la guerre civile est bien présente.

Fin février, les femmes d’Abobo ont organisé une manifestation pour exiger la fin des violences et une solution pacifique à la situation en demandant le respect des résultats de l’élection de novembre. Cette manifestation s’inscrivait dans le rappel d’une semblable, tenue au cours de la guerre pour l’indépendance, et qui avait été décisive dans la tournure des événements.

Elles étaient une centaine de femmes avec des enfants à défiler quand les chars de l’armée ont tiré sur leur cortège avec des mitrailleuses lourdes 12.7. Six manifestantes ont été tuées sur le coup et nombre d’autres ont été blessées. Jusque là, jamais les troupes n’avaient tiré sur des manifestants, surtout pas des manifestantes. Même l’ancien colonisateur, la France n’y a jamais employé un tel moyen. Antérieurement l’armée ou les groupes à la solde de L. Gbagbo se contentaient de tirer dans les airs pour provoquer la dispersion des manifestants. Pas cette fois.

De son côté le journal Le temps, pro-Gbagbo, faisait état, presque au même moment, d’une autre manifestation de femmes, un sit-in, devant les locaux de l’ONUCI. Il semble qu’elles supportaient le candidat défait dans sa lutte contre la présence de l’ONU sur le territoire et de la radio onusienne dont il a exigé la fermeture. Ces manifestantes n’étaient ni attaquées à la mitrailleuse ni frappées de quelque manière que ce soit.

Certains soutiennent que les femmes sont instrumentalisées dans la guerre que se livrent les deux protagonistes dans la situation. Il est assez gênant de penser que les femmes ivoiriennes se laisseraient manipuler et ne prendraient pas position de leur propre initiative. Chose certaine elles tentent d’influencer le cours des choses dans la mesure de leurs moyens. La situation devenant de plus en plus intenable.

Conclusion

Laurent Gbagbo est de plus en plus agressif dans sa lutte pour se maintenir en place en dépit de tout et de tous. Les attaques auxquelles se livrent les troupes qui lui sont loyales se multiplient, sont organisées et d’une violence toujours plus importante. Il a aussi coupé l’alimentation électrique dans le nord où une majorité de la population a voté en faveur de M. Ouatara. Ayant nationalisé la compagnie productrice en novembre dernier, il peut maintenant en contrôler les activités. Devant de telles attaques, les partisans d’Alassan Ouatara se défendent. Le cycle de la guerre civile semble bien reparti.

L’Organisation des États africains qui tente de faire débloquer la situation n’y arrive pas. Certains militent pour une intervention armée pour déloger L. Gbagbo de la présidence. C’est la position du Nigéria alors que l’Afrique du Sud s’y opposerait. Elle possède des intérêts dans l’économie ivoirienne et voudrait les protéger.

Tous les jours des réfugiés se présentent aux frontières des pays voisins pour échapper à la violence et à l’insécurité. Ils seraient des centaines de milliers selon l’Office des réfugiés de l’ONU, entre autre au Burkina Fasso.


[1Il n’est pas facile de trouver des informations fiables sur la situation des femmes et leurs actions dans ce pays perturbé. Cet article repose sur 2 articles : celui du Dr. Dieth Alexis sur connectionivoirienne.net le 6 mars courant et une courte nouvelle dans International Herald Tribune du 3 mars courant.

Alexandra Cyr

Retraitée. Ex-intervenante sociale principalement en milieu hospitalier et psychiatrie. Ex-militante syndicale, (CSN). Ex militante M.L. Actuellement : membre de Q.S., des Amis du Monde diplomatique (groupe de Montréal), animatrice avec Lire et faire lire, participante à l’établissement d’une coop. d’habitation inter-générationnelle dans Rosemont-Petite-Patrie à Montréal. Membre de la Banque d’échange communautaire de services (BECS) à Montréal.

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