Édition du 12 novembre 2024

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Afrique

Le Forum des peuples de Niono dit NON à l’accaparement des terres et OUI à la souveraineté des peuples !

La 10ème édition du Forum des peuples a débuté ce lundi 31 octobre 2011 dans l’après-midi par des danses et des chants traditionnels, suivis de discours des organisateurs et des autorités locales. La cérémonie d’ouverture a rassemblé un grand nombre de participant-e-s venu-e-s de l’Afrique (Mali, Burkina Faso, Niger, Guinée, RDC, Togo, Sénégal, Bénin, Tunisie...) et de l’Europe.

(Tiré du site du CADTM, 2 novembre 2011)

Dès le lendemain matin, le 1er novembre, les participant-e-s sont entré-e-s dans le vif du sujet, à travers différentes conférences plénières et ateliers. Au programme notamment, la question de la souveraineté des peuples, de l’accaparement des terres agricoles, de la lutte contre les partenariats public-privé, de l’exploitation des ressources minières et énergétiques, des crises de la dette en Europe et en Afrique et de la crise du système éducatif en Afrique.

Cette nouvelle édition du Forum des Peuples s’inscrit tout particulièrement autour des résistances contre l’accaparement des terres.

Une conférence populaire paysanne et d’autres prises de parole ont permis à tou-te-s de cerner à la fois les enjeux locaux et internationaux de cette question. Au Mali, et en particulier dans la région de Niono où se tient le Forum, l’accaparement des terres s’est accéléré depuis quelques années. Alors que la crise alimentaire a durement frappé la région en 2008, les paysan-ne-s sont exproprié-e-s et chassé-e-s de leurs terres.

Plus de 700 000 hectares de terre ont déjà été cédés par le gouvernement à des sociétés étrangères, à des États étrangers, ou encore à des « investisseurs » nationaux. Ce rapt organisé est en ligne directe des politiques néolibérales dictées par les Institutions financières internationales (FMI et Banque mondiale) depuis des décennies. Les cultures vivrières ont été détruites depuis la colonisation au bénéfice des cultures d’exportation, plus rentables pour les puissances dominantes. Puis, dans les années 80, pour soi-disant faire face à la crise de la dette, le FMI et la Banque mondiale ont imposé aux pays africains de renforcer les cultures de rente en abandonnant les cultures vivrières. Ces politiques meurtrières ont conduit à différentes crises alimentaires, dont celle qui a commencé en 2008.

Dans les années 2000, non contents de faire des bénéfices colossaux sur la famine, les vautours capitalistes ont jeté leur dévolu sur la terre. Nouveau placement rentable, les terres sont désormais aux mains des boursicoteurs. Résultat : des centaines de milliers de paysans sont aujourd’hui sans terre et des millions d’individus souffrent de la faim. Comble du comble, une grande partie de ces terres est destinée à la production des agrocarburants.

La lutte contre l’accaparement des terres est au centre d’un processus de réappropriation de la souveraineté populaire.

En 2009, le nombre de personnes souffrant de la faim a dépassé le milliard à travers le monde (alors que selon un rapport de la FAO, le tiers des aliments produits chaque année dans le monde pour la consommation humaine, soit environ 1,3 milliard de tonnes, est perdu ou gaspillé... ).

La lutte contre l’accaparement des terres est au centre d’un processus de réappropriation de la souveraineté populaire, d’abord parce qu’il s’agit de la survie de millions d’êtres humains, ensuite parce que les paysan-ne-s constituent la majorité de l’humanité. La question de l’accès à la terre cristallise de nombreux maux imposés par le système capitaliste. Les populations sont privées du droit de décision quant à la production nationale, quant aux politiques d’exportation et d’importation, et sont ainsi privées de protection de leur marché intérieur. Les productions des pays africains, se trouvent alors en concurrence sur les marchés intérieurs comme extérieurs avec des productions des pays du Nord, qui reçoivent des subventions à hauteur d’1 milliard de dollars par jour.

Aujourd’hui, la dépendance des économies africaines aux produits d’exportation est dangereuse. Le Bénin dépend à 84%, le Mali à 47% et le Burkina à 39% de leur coton dans leurs revenus d’exportation. Le Sénégal et la Mauritanie dépendent respectivement de 25% et 54% de la pêche dans leurs revenus d’exportation. Ces exemples peuvent se multiplier pour l’ensemble des pays dits en voie de développement. Ce phénomène est une conséquence directe des politiques imposées par le FMI et la BM. 

Vers une nouvelle crise de la dette ?

Alors que ces pays n’ont pas de maîtrise du cours de ces matières premières et en dépendent, il est facile d’imaginer le risque que cela représente. Aujourd’hui le cours de ces matières premières est relativement élevé, notamment grâce à la demande chinoise et en conséquence de la spéculation dans les pays du Nord sur les matières premières, mais que va t-il se passer quand ces cours vont baisser ?

Autre phénomène à mettre en parallèle, les taux d’intérêt. L’Afrique est endettée, et le service de la dette est déjà l’un des premiers postes budgétaires pour de nombreux États. Aujourd’hui, avec la crise de la dette des pays européens, les taux d’intérêt des Banques centrales sont bas, mais au moment où ces taux vont augmenter, les pays africains vont voir le service de leur dette s’envoler. Si, dans le même temps, le cours des matières premières baisse, le continent sera plongé dans une nouvelle crise de la dette, comme celle qu’il a connue à partir de 1982. Les conséquences de cette crise seront dramatiques, car il est clair que, si les peuples ne retrouvent pas leur souveraineté, les créanciers vont imposer de nouvelles séries de mesures anti-sociales, qui enfonceront la population encore plus dans la pauvreté, là où celle-ci est déjà largement insupportable.

Des alternatives sont à mettre en place sans plus attendre

Les agricultures paysannes et familiales qui regroupent la majorité des agricultrices et agriculteurs du monde sont les mieux placées pour répondre aux besoins alimentaires, de la sécurité alimentaire à la souveraineté alimentaire. Cette priorité donnée aux circuits courts, et donc à la production locale, est la seule capable de nourrir l’ensemble de l’humanité tout en respectant la nature, du sol aux ressources naturelles, en passant par les semences et le respect de la biodiversité.

De plus, l’accaparement des terres constitue une violation des droits humains fondamentaux privant la population de la liberté de produire comme elle le souhaite. L’accaparement des terres aggrave les inégalités d’accès et de contrôle fonciers pour les femmes. La question de l’accès à la terre pour les femmes a été abordée lors des discussions. Les femmes souffrant d’une double oppression, celle du système capitaliste et celle du patriarcat qui usent des structures traditionnelles locales pour imposer domination et exclusion.

Il apparaît fondamental, pour la survie et le développement endogène des Africain-e-s, d’entreprendre une réforme foncière favorisant l’accès à la terre des petit-e-s producteurs et productrices en expropriant, sans indemnisation ou autre contrepartie, les multinationales et les pays étrangers qui détiennent de manière illégitime des terres. Cette réforme doit s’accompagner d’une politique de soutien aux productions locales grâce, notamment, à la mise en place de taxes douanières pour les importations des produits subventionnés des pays du Nord.

Il est également important de développer des initiatives d’intégration régionale qui renforcent la solidarité entre les peuples, à l’exemple de l’ALBA (Alliance Bolivarienne pour les Amériques) qui a vu le jour en 2003 et offre une alternative à l’ALCA (Zone de Libre-échange des Amériques).

Pour finir, il apparaît essentiel de rompre radicalement avec les politiques imposées par les IFI. Les peuples africains disent non à l’endettement, disent non au FMI et à la Banque mondiale et aux politiques d’austérités.

La colonisation a trop duré, fini le libre marché, l’Afrique libre est en marche !

Mots-clés : Afrique

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