Encore cette année, des organismes font face à de graves problèmes de financement, des refuges et ressources d’hébergement d’urgence doivent refuser des personnes par manque de places, le travail de rue demeure absent de nombreuses municipalités, les banques alimentaires reçoivent de plus en plus de demandes et il demeure difficile de développer suffisamment de logements sociaux. « Malgré l’adoption en 2014 d’un Plan d’action ambitieux mobilisant 10 ministères, les municipalités et les organismes de prévention et de lutte à l’itinérance, force est de constater que celui-ci peine toujours à se déployer » déplore Mathieu Frappier, coordonnateur du RSIQ.
À Montréal : Progrès, embûches et menaces
À Montréal, il y a une forte mobilisation pour que le Plan d’action se déploie, de la part des différents ministères, de la Ville et des membres du Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM). Des actions sur tous les fronts sont identifiées et menées et il y a des progrès, mais les fonds sont insuffisants, pour loger, accompagner, soutenir et favoriser la réinsertion.
Au niveau du logement social, 12 membres du RAPSIM sont à construire près de 400 nouvelles unités destinées à la lutte à l’itinérance. Les fonds pour le soutien communautaire, l’intervention nécessaire pour aider les personnes à se stabiliser en logement, font cependant défaut.
Les Habitations du Réseau de l’Académie qui existent depuis plus de 30 ans illustrent bien ce problème. En 1991, l’organisme recevait du gouvernement du Québec l’équivalent de 1000 $ par locataire en soutien communautaire. Depuis il a presque doublé son parc de logements, sans aide accrue, ce qui représente 540 $ par personne. « En juin, l’Académie prendra possession de 18 nouveaux logements, un beau projet en lien avec L’Itinéraire, mais cela baissera ainsi notre aide à 535 $ par locataire par an ! Québec doit régler ce problème de sous-financement et d’incohérence qui perdure depuis 30 ans », a insisté Robert Makrous, président du conseil de cet organisme.
Il a des incohérences et pire il y a aussi des menaces de reculs. Ainsi avec sa réforme de l’aide sociale et son parcours obligé vers l’emploi, les personnes qui ne pourront s’y inscrire sont menacées de voir leur prestation réduite. « Le gouvernement n’a toujours pas publié son règlement qui appliquerait cette mesure et il doit renoncer à cette dimension de sa réforme, à l’approche punitive », a tonné Pierre Gaudreau, coordonnateur du RAPSIM. Les organismes en itinérance sont fortement inquiets des conséquences qu’aurait la coupe du chèque de l’aide sociale, jusqu’à aussi peu que 399$. Aussi, le RAPSIM et plusieurs de ses membres seront d’une manifestation contre cette réforme qui aura lieu mercredi à Montréal.
La Politique de lutte à l’itinérance indique que « Si l’itinérance n’est pas seulement un problème de pauvreté, elle est toujours un problème de pauvreté ». Ainsi, il importe de soutenir des interventions spécifiques, mais aussi de s’attaquer directement aux sources de la pauvreté. Le budget actuel manque cruellement d’audace en cette matière. « Avec ses importants surplus, le gouvernement devait annoncer un plan de lutte à la pauvreté soutenu, rehausser immédiatement les revenus des plus vulnérables, s’attaquer à l’appauvrissement dû aux coûts grandissants des loyers et soutenir adéquatement les groupes communautaires ; il a plutôt concentré ses efforts sur la dette et les réductions d’impôts. » conclu Mathieu Frappier.
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