C’est lugubre. Mais c’est pourtant ce que nous décrit Andrés Pavón, le président pour la défense des droits humains au Honduras (CODEH). [1]
Une atrocité.
Vérité, mensonge, qui sait. Des journalistes professionnels devraient enquêter sur place sur tous ces événements . Nos journalistes professionnels, ceux de Radio-Canada en tête, se gardent bien de nuire à la dictature.
Bien que ce fait lugubre reste à confirmer, d’autres assassinats sont prouvés.
La semaine dernière c’est le professeur (el maestro) Luis Gradis Espinal, 56 ans qui a été trouvé sans vie après avoir été séquestré par un groupe paramilitaire. [2]
Il était le dirigeant du Front National de Résistance Populaire de la localité de Nacaome, département de Valle, dans la zone sud du pays.
Monsieur Espinal se rendait dans la capitale pour retrouver un de ses enfants, quand il a été intercepté par un groupe armé sur un périphérique de Tegucigalpa.
Le Comité de Familles de Détenus Disparus au Honduras (COFADEH) a annoncé que "son corps sans vie a été trouvé, les pieds et les mains attachés, sur un chemin du village Las Casitas, au sud-ouest de la capitale, proche d’une zone où se trouvent plusieurs unités militaires".
L’organisation de défense des Droits de l’Homme du Honduras (CODEH) a dénoncé le fait que le syndicat des professeurs soit devenu un objectif militaire et policier. Ce syndicat lutte ardemment depuis cinq mois pour la restauration de la démocratie au Honduras.
Plusieurs de ses membres ont été assassinés pour avoir condamné le coup d’État et pour exiger le retour à l’ordre constitutionnel. Des centaines de professeurs (maîtres et maîtresses) ont été victimes de la brutale répression.
La COFADEH a aussi exprimé sa préoccupation pour le cas du professeur Marco Tulio Valdez, leader de la Résistance à San Lorenzo, Valle, "qui est fortement menacé par les autorités militaires qui ont pris le contrôle absolu de ce département".
Dans un communiqué, elle a rappelé que le meurtre de Luis Gradis Espinal s’ajoute à ceux de Roger Vallejo, Mario Contreras, Félix Murillo, Martín Barrientos et Tito Urquía.
Le Comité de Familles de Détenus Disparus au Honduras (COFADEH) ainsi que le comité pour la défense des droits humains au Honduras (CODEH) lance un cri d’alarme à la communauté internationale :
« Nous exhortons les communautés nationales et internationale pour qu’elles condamnent ces violations dont est victime le peuple hondurien par la dictature militaire, et réitérons à nouveau que les élections qui auront lieu le 29 novembre prochain est une action des militaires, des policiers et des paramilitaires ».
La communauté internationale.
Radio-Canada en fait partie. Le quatrième pouvoir jadis au service de l’information est aujourd’hui au service de la dictature néolibérale.
Au lieu de condamner ces exactions, on nous "normalisera" les élections frauduleuses du 29 novembre au Honduras.
J’ai porté plainte à l’Ombudsman de Radio-Canada, Mme Julie Miville-Dechêne, pour qu’elle enquête sur ces irrégularités dans la couverture de Radio-Canada sur ce Coup d’État hondurien.
Précisément sur la désinformation soutenue pendant plus de quatre longs mois qui visait à discréditer le Président élu et constitutionnel, M. Manuel Zelaya, victime d’un renversement militaire totalement hors des lois les plus élémentaires de la démocratie.
Mme Miville-Dechêne a refusé de donner suite à ma plainte, s’associant du même coup à Radio-Canada dans cette campagne de promotion de la dictature hondurienne.
Doit-on rappeler les atrocités des dictatures passées pour comprendre celle en cours depuis le 28 juin au Honduras ?
Rappelons simplement les escadrons de la mort qui sévissaient dans tous ces pauvres pays où des régimes sanguinaires et inhumains existaient.
Rappelons l’assassinat de Mgr Romero en pleine messe devant des centaines de fidèles. [3]]
Rappelons la torture et l’assassinat des sœurs Léonie Duquet et Alice Domon par la dictature argentine [4]].
Rappelons la vie de Sœur Yvonne Pierron, « Missionnaire sous la dictature »
[5]
Doit-on déterrer les fosses communes comme celles du Guatemala, ou de tant d’endroits où les dictatures, les escadrons de la mort ont éliminé tant de pauvres gens qui avaient osé élever la voix avant que nos médias ne dénoncent ces horribles exactions ?
Nous connaissons les atrocités commises sous les Pinochet, Vileda, Banzer, Arellano, Montt, Duarte, Somoza, Stroessner, Bordaberry et de tant d’autres.
Cette période dictatoriale à l’échelle du continent latino-américain a fait 40 000 morts et disparus. Des centaines de milliers de personnes ont souffert de la torture.
Comment est-ce possible alors que nous voyons, sous nos yeux se répéter l’horrible histoire, que nos professionnels ferment les yeux. Comment se fait-il que Madame Julie Miville-Dechêne, par son refus d’enquêter s’associe à ces atrocités ? Comment se fait-il que des journalistes, comme Jean-Michel Leprince, Ginette Lamarche ou Michel Labrèque, qui connaissent à fond ces histoires d’horreurs ferment les yeux sur cette répétition de l’histoire ?
Nos médias qui sont à l’affut de la moindre contestation en Iran, ferment les yeux sur les assassinats commis au Honduras. [6]
C’est une honte.
Le cirque médiatique de normalisation de la dictature de droite au Honduras est honteux.
On va nous parler de cette élection du 29 novembre comme d’un événement « démocratique » alors que près de deux cents candidats se sont retirés de l’élection.
Alors que le Président constitutionnel est gardé prisonnier dans son propre pays à l’ambassade du Brésil.
Alors que des milliers de citoyens sont terrorisés et confinés à leur demeure.
Alors que l’ONU n’enverra pas d’observateurs pour l’élection.
Alors que la grande majorité de la communauté internationale dénonce cette mascarade.
Nos médias vont nous présenter un résultat "de facto" comme un argument pour normaliser les conséquences de cette farce grotesque.
Comment comprendre cette attitude renversante de nos médias qui se gargarisent quotidiennement de démocratie et de droits humains pour justifier ou pour dénigrer à qui mieux mieux ?
Cette complicité médiatique qui supporte cette dictature est à la limite criminelle.
L’Histoire nous a clairement enseigné les rouages de ces atrocités, il est criminel de ne pas dénoncer ces affronts faits au grand jour contre la démocratie et les droits humains.
Serge Charbonneau
Québec
veliserdi@hotmail.com
P.S. : Pour ceux intéressés à approfondir cette complicité médiatique, entre autres de Radio-Canada en faveur de ce Coup d’État, je peux vous faire parvenir un dossier détaillé concernant la couverture médiatique des cinq derniers mois. (veliserdi@hotmail.com)