Célébrée depuis le 1er mai 1890, la Journée internationale des travailleurs prend racine à la fin du XIXe siècle à travers les luttes du mouvement ouvrier pour obtenir la journée de huit heures. L’industrialisation battait alors son plein, les travailleurs faisaient des journées de 10 à 15 heures, les enfants travaillaient dans des conditions exécrables et la misère sévissait au quotidien.
Plus d’un siècle plus tard, tous sont à même d’apprécier le chemin parcouru depuis cette époque. Cependant, la pandémie de COVID-19 amène un lot très important de perturbations inédites dans le monde du travail. Elle fait apparaître la nécessité de revoir les modes de fonctionnement.
Pour de nombreux travailleurs – surtout ceux qui exercent des activités qui ne peuvent se réaliser qu’au bureau, notamment en raison de l’équipement nécessaire ou des interventions auprès de la clientèle – le retour sur les lieux du travail est envisagé. Ce retour sera tout sauf banal en raison de l’implantation de nombreuses mesures visant la protection de la santé et de la sécurité des employés (distanciation, désinfection, nettoyage des stations de travail, etc.).
Plusieurs employeurs, dont le gouvernement, ont pu maintenir leurs activités au moyen du télétravail grâce à un redéploiement de leurs ressources humaines d’une ampleur qui aurait été inconcevable il y a à peine quelques semaines. Cependant, ce vaste redéploiement s’est réalisé dans un contexte de crise, parfois sans la planification, la formation et la réflexion stratégique et tactique qui accompagnent habituellement de tels changements. Les employeurs portent le lourd fardeau d’agir pour éviter que la poursuite de leurs activités entraîne des conséquences négatives (pour la santé, au premier titre), des différends ou des revendications de la part de leurs employés, mais aussi de leurs clientèles et partenaires.
Au Québec, des milliers d’employés utilisent actuellement de nouveaux outils technologiques à domicile, souvent sans supervision. Le contexte de crise vient ainsi masquer l’importance d’adapter les façons de faire et les politiques de ressources humaines. La frontière entre la vie privée et le travail n’a jamais été aussi poreuse. Il apparaît donc nécessaire d’éviter l’apparition de problématiques associées à l’exécution de la prestation de travail à distance.
Toutes ces inquiétudes, bien que légitimes, ne doivent pas occulter une réalité beaucoup plus sombre pour des milliers de travailleurs. Ils sont nombreux à avoir perdu leur travail et ils sont tout aussi nombreux à risquer de le perdre si l’économie tarde à se remettre en marche. Sans parler de ceux qui, au quotidien, mettent leur santé en péril pour venir en aide aux plus vulnérables.
Au-delà des bouleversements profonds qu’elle introduit dans la vie de chacun, cette pandémie propulse au-devant de la scène toute la considération des travailleurs sans qui nous serions privés de services essentiels. Elle met en évidence la place du travail dans nos vies et l’importance de notre organisation sociale pour soutenir le travail. Elle nous fait aussi apprécier la présence ’d’un État fort qui nous rassure, nous protège, nous soigne et garantit un revenu à toutes et à tous.
Certes, la pandémie provoque une panoplie de drames inimaginables. Cependant, mille et un gestes d’entraide et de solidarité apparaissent chaque jour, offrant ainsi un effet protecteur et apaisant contre la détresse psychologique. Le moment n’est pas encore aux bilans, mais espérons que la crise puisse servir de catalyseur pour revoir, repenser et réorganiser le travail afin qu’il soit plus respectueux des gens et de leurs besoins.
Line Lamarre
Présidente
Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec
7, rue Vallière, Québec (Québec) G1K 6S9
Un message, un commentaire ?