« Le projet de loi 106 aura un impact majeur sur le développement des énergies fossiles au cours des décennies à venir. Or, de nombreuses inquiétudes ont été formulées par l’opposition, par des groupes et par des citoyens. Elles n’ont trouvé aucune réponse satisfaisante. Le gouvernement aurait pu tout au moins scinder le projet de loi en deux pour en retirer les aspects controversés. Il a choisi de couper court à la discussion en imposant une adoption en bloc, par bâillon. C’est un déni de démocratie ! », déplore le président de l’AREQ, Pierre‑Paul Côté.
Des citoyens dépossédés de leur terre ?
L’AREQ partage de nombreuses objections formulées à l’égard du projet de loi par le Front commun pour une transition énergétique. Elle s’inquiète notamment qu’on y reconnaisse aux entreprises le droit d’acquérir diverses licences pour l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures dans le sous-sol québécois. Ces licences, qui couvrent déjà 60 000 km2 de territoire, donnent de réels droits à l’industrie, dont un droit d’accès aux terrains pour effectuer ses activités qui ne peut être aliéné. Les entreprises pourraient même bénéficier du droit d’exproprier tout propriétaire de terrain qui ferait obstruction à un projet.
« Nous sommes estomaqués qu’en vertu du projet de loi 106, des citoyens qui sont propriétaires de leur terrain depuis des décennies, parfois même depuis plusieurs générations, puissent être dépossédés de leur terre et de leurs biens par des entreprises qui n’ont en tête que le profit. On ne veut pas revenir cent ans en arrière », ajoute Pierre-Paul Côté.
D’autres projets comme Énergie Est ?
En outre, l’AREQ craint que l’adoption du projet de loi entraîne une prolifération des gazoducs et des oléoducs. En effet, la multiplication des projets d’exploitation des hydrocarbures créera une demande pour de nouvelles façons d’acheminer le pétrole aux raffineries, rendant nécessaire la construction de nouveaux oléoducs.
À cet égard, mentionnons que lors de son dernier conseil national, l’AREQ a publiquement dénoncé le projet Énergie Est « afin de protéger les terres agricoles, les cours d’eau, les sources d’eau potable de la majorité des Québécois et la santé de la population ». Ce projet, qui couvre au total 4 600 km depuis l’Alberta jusqu’au Nouveau-Brunswick, traversera neuf régions administratives au Québec et transportera 1,1 million de barils de pétrole par jour.
Autoréglementation et pouvoir règlementaire
Enfin, l’AREQ s’étonne qu’en vertu de ce projet de loi, le gouvernement s’en remette à l’industrie pour fixer ses propres normes pour assurer la sécurité des personnes et des biens ainsi que la protection de l’environnement. Aussi, le gouvernement se réserve de nombreux pouvoirs réglementaires, par exemple la capacité de déterminer par règlement les conditions de production des hydrocarbures, la reddition de comptes et la réhabilitation des sites.
« Ce projet de loi est non seulement un danger sur les plans de la santé et de l’environnement, mais aussi en matière de respect des droits des citoyens. Nous en appelons au sens des responsabilités des élus libéraux qui forment ce gouvernement. Le projet de loi doit être modifié pour tenir compte des préoccupations de la population. Il doit favoriser des mesures qui vont dans le sens de la transition énergétique, comme le stipule le premier volet du projet de loi et qui fait davantage consensus. Le débat ne doit pas être évacué à la veille du congé des Fêtes pour permettre au gouvernement de partir l’esprit tranquille », conclut Pierre-Paul Côté.