Ce forum était organisé par cinq organismes importants de la scène québécoise : l’Institut de recherche en économie contemporaine (IREC) ; le regroupement d’économistes de l’Économie autrement ; la coopérative : les Éditions Vie économique (EVE) ; l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS) ; le réseau pour un Changement de logique économique (CLE).
Le forum réunissait 250 personnes en provenance de divers horizons, représentant plusieurs citoyens de leurs organismes et associations. Après une présentation des divers thèmes, les participant-e-s étaient répartis en atelier d’une trentaine de personnes, pour débattre à partir des fiches proposées : trois l’avant-midi, et trois autres l’après-midi.
Chacune des fiches couvrait un aspect du discours dominant, celui qu’on entend jour après jour, ad nauseam, sur la plupart des tribunes. En voici quelques extraits :
– Trop lourd, trop endetté et inefficace. l’État ne peut plus, comme par le passé, constituer le moteur économique du Québec
– Le Québec souffre d’immobilisme
– Il faut remettre la responsabilité individuelle à la base de nos programmes sociaux
– Il est urgent d’atteindre l’équilibre budgétaire
– Il n’y a pas d’autres choix que de se retourner vers les tarifs et les taxes à la consommation pour financer les services publics. L’impôt décourage le travail
– C’est le recours au secteur privé qui sauvera les services publics
Face à ce discours dominant, une analyse était faite et des propositions concrètes étaient débattues permettant une économie plus solidaire.
En résumé l’esprit de ces propositions réaffirmait :
– Le rôle crucial et social de l’État dans nos sociétés
– La nécessité de la participation pleine et entière de la population et de la création d’un espace de dialogue social et de concertation, au coeur des processus de choix publics
– L’importance de la solidarité en opposition à l’individualisme, comme fondement de nos politiques sociales
– La possibilité d’atteindre l’équilibre budgétaire sur une plus longue période et ce, en préservant la stimulation de la relance par des investissements publics
– Le choix d’une fiscalité progressive
– Le choix politique de la société québécoise d’offrir des services publics.
Dans les divers ateliers, les participants ne commençaient pas leurs échanges en utilisant tous la même fiche ce qui favorisait l’étude de chaque proposition par plus de personnes, et si le temps le leur permettait ils pouvaient en couvrir une 2e et une 3e.
A la fin de la journée, lors de la plénière, un compte-rendu de chaque atelier fut présenté. Certains trouvaient que cela n’allait pas suffisamment loin. Exemple : concernant la fiscalité, plusieurs jugeaient la proposition faible. Au lieu d’un 4e palier d’imposition, certains en ont proposé au moins une douzaine comme cela se faisait dans les années 80. Dans certains ateliers, il y a eu échange sur certains aspects négatifs de l’économie sociale, qui parfois peut favoriser le « cheap labour » ce qui fait l’affaire du gouvernement. D’autres déploraient l’absence de la question d’équité par rapport au travail des femmes.
Malgré quelques critiques, l’ensemble des gens approuvaient l’esprit et l’orientation des propositions. Il est plutôt remarquable de constater qu’un groupe aussi imposant s’entende sur l’essentiel. Cela peut indiquer que les citoyens du Québec dans leur ensemble, correctement informés des enjeux, se porteraient garants de ces propositions.
Il n’est nullement étonnant que les médias de Desmarais et de PKP n’aient pas relaté ce Forum alors qu’ils avaient couvert en long et en large la rencontre initiale du groupe de droite : Réseau Liberté Québec, un des paravents de l’Institut économique de Montréal. Heureusement Radio-Canada a informé la population de ce Forum, cependant une couverture plus étendue aurait rendu davantage justice à cet important événement.
Un regroupement de cinq réseaux d´économistes
Il est encourageant que cinq organismes de réflexion et d’analyse économique, avec une solide expertise, se soient ainsi regroupés pour intervenir dans le débat public et organiser une journée d’études sur des propositions concrètes d’alternatives économiques. Le fait qu’ils aient réussi, sans moyens financiers importants (aucun n’est financé par les grandes corporations contrairement aux think tank de droite) à regrouper autant de personnes témoigne qu’existe une grande réflexion au Québec, un contre-poids important qu’on pourrait qualifier de « souterrain », parce qu’ignoré des médias qui entretiennent le discours dominant.
Le Forum s’est terminé avec la demande expresse des gens pour qu’il y ait une suite.