Lancé en janvier 2002, le projet Réseau national intégré de radiocommunication (RENIR) devait initialement coûter 144 millions $ au gouvernement du Québec et être opérationnel dès 2008. Toutefois, 12 ans après les premiers investissements, RENIR ne répond toujours pas aux attentes initiales et il menace de franchir le cap du milliard de dollars, au grand bonheur des firmes de services-conseils associées à ce projet hors de contrôle. « Il y a pire : le Centre de services partagés du Québec, le plus grand donneur de contrats informatiques du gouvernement, ne connaît même pas avec exactitude l’ampleur des sommes investies depuis 2002 dans le projet RENIR », affirme M. Richard Perron.
Le SPGQ exhorte le gouvernement à mettre un frein à la sous-traitance en informatique et à rétablir une expertise interne qui pourra endiguer les ratés de ce secteur et pallier les défaillances observées par la protectrice du citoyen dans son rapport annuel 2013-2014. Dans ce dernier, Mme Raymonde Saint-Germain constate que les tares informatiques de l’appareil public entraînent des erreurs coûteuses qui ont des conséquences graves pour les citoyens. Traitements de dossier interrompus, versements de crédits ou de rentes bloqués, augmentation de l’inventaire de demandes en attente : telles sont les principales déficiences induites par ce qu’il convient d’appeler le « bordel informatique ».
« Le constat de la protectrice du citoyen est troublant. Il vient prouver que le « bordel informatique » est très loin d’être résolu. Pourtant, en 2011, l’ex-vérificateur général du Québec mentionnait dans son rapport que deux tiers des projets informatiques menés par le gouvernement connaissaient des dépassements de coûts, ne respectaient pas leurs échéanciers ou ne remplissaient pas leurs promesses », ajoute le président du SPGQ.
Le SPGQ déplore le modèle de gouvernance non fonctionnel de l’État québécois, délesté et n’ayant peu d’expertise interne en informatique et dépendant largement de consultants privés, souvent des fonctionnaires ayant été forcés de devancer leur retraite pour se joindre à des firmes de services-conseils. Des firmes qui, de surcroît, offrent à plus cher leur service à leur ancien employeur et rédigent les appels d’offres, faute d’expertise au sein de l’appareil gouvernemental !
Dans son mémoire déposé à la commission Charbonneau, le SPGQ observe que la valeur des contrats de service en sous-traitance dans les ressources informationnelles, et ce pour l’ensemble des ministères et organismes de la fonction publique québécoise, a grimpé de 218 millions $ à 778 millions $ entre 2003-2004 et 2012-2013, un bond spectaculaire de 257 %. « Ce cafouillage s’illustre à merveille avec deux projets informatiques sous-traités par le gouvernement : SAGIR, qui devait se terminer en 2007 au coût de 83 millions de dollars, pourrait plutôt dépasser le milliard de dollars, sans qu’une date de livraison soit avancée ; Dossier santé Québec, promis pour 2011 au coût de 543 millions $, devrait plutôt osciller autour de 1,6 milliard $ et sa livraison est reportée à 2021 », dénonce M. Perron.
Afin de favoriser l’avènement de l’ère de transparence promise par le premier ministre le soir de son élection, et aussi de permettre aux citoyens de débusquer la mauvaise gestion des contrats publics, le SPGQ a lancé le 16 octobre dernier Le ContrActuel. Ce site Web fait ressortir l’ampleur des contrats publics attribués non seulement par le gouvernement du Québec, mais aussi par les grandes municipalités et universités du Québec.
« La nouvelle ère de transparence tant souhaitée par le gouvernement se bute à de gros écueils, car, en juin dernier, lors d’une commission parlementaire sur l’informatique, les hauts fonctionnaires étaient incapables de répondre aux questions des élus qui voulaient savoir combien avait coûté l’informatique durant la dernière année. En ce domaine, il y a urgence de rebâtir l’expertise interne et de clore la culture de l’impunité ! », conclut M. Perron.