Édition du 19 novembre 2024

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Logement

Crise du logement : Front commun contre le financement du privé

QUÉBEC, le 28 oct. 2021 - Une semaine après le discours inaugural qui ne plaçait pas la situation préoccupante du logement dans les priorités de la session parlementaire, l’Association des groupes de ressources techniques du Québec (AGRTQ), la Confédération québécoise des coopératives d’habitation (CQCH), la Fédération des locataires de HLM du Québec (FLHLMQ), le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) et le Réseau québécois des OSBL d’habitation (RQOH) interpellent le gouvernement Legault, avec l’appui des porte-parole en habitation des trois partis d’opposition, Marie-Claude Nichols, députée de Vaudreuil (PLQ), Andrés Fontecilla, député de Laurier-Dorion (QS) et Véronique Hivon, députée de Joliette (PQ).

Alors que la majorité des villes du Québec sont aux prises avec une sévère pénurie de logements locatifs, dont les effets s’ajoutent à ceux de la spéculation immobilière, et qu’on assiste à l’effritement du parc de logements locatifs encore abordables, les 5 regroupements impliqués dans le développement du logement social et communautaire craignent que les problèmes de logement vécus par les locataires ne s’intensifient si le gouvernement du Québec n’annonce pas rapidement des fonds supplémentaires. Ils pressent Québec de le faire dès la mise à jour financière prévue cet automne.

Malgré des appels répétés, le logement social et communautaire — le seul de propriété collective dont on a la certitude qu’il sera abordable de façon pérenne — continue d’être réalisé au compte-gouttes. Depuis l’élection de la Coalition avenir Québec, à peine 3750 ont été bâtis, malgré la promesse d’en livrer 15 000. Résultat : les logements hors marché privé représentent un faible pourcentage des logements construits ces dernières années, et il y a de moins en moins d’alternatives pour les locataires qui cherchent à se loger décemment. Les logements privés récemment construits s’avèrent hors de prix, ne répondant pas aux besoins de la majorité des ménages locataires du Québec, dont le revenu médian est de 37 392$, encore moins à ceux des ménages à revenus faibles et modestes, s’inquiètent les regroupements.

Pour répondre aux besoins urgents, Québec a pourtant un programme pour assurer le développement de logements sociaux et communautaires. Or, celui-ci est sous-financé et malgré des consultations tenues il y a cinq ans, les améliorations demandées par les groupes communautaires pour accélérer le développement se font toujours attendre. De plus, les regroupements constatent que le gouvernement travaille à une autre révision de son programme, cette fois en catimini. Ils souhaitent être consultés et sonnent l’alarme avant que les travaux ne soient trop avancés.

Selon les regroupements et les partis d’opposition, plusieurs indicateurs, dont les propos publics de la ministre de l’Habitation, laissent croire que Québec voudrait ouvrir son programme dédié au développement du logement social et communautaire au secteur privé à but lucratif, reprenant ainsi le modèle des programmes fédéraux, dont les résultats ont été décriés entre autres par le Directeur parlementaire du budget. Cela serait complètement inacceptable aux yeux des groupes.

L’amendement surprise récemment apporté par la ministre à son projet de loi 49, qui autoriserait les municipalités à subventionner des promoteurs privés sans garanties d’abordabilité ou de pérennité, a alarmé les organisations qui craignent que cela soit précurseur de la suite. Pour l’AGRTQ, la CQCH, le FRAPRU, la FLHLMQ et le RQOH, les fonds publics ne doivent pas servir à financer des projets dont l’abordabilité n’est aucunement garantie à moyen ou long terme et qui pourront éventuellement être revendus à des fins spéculatives.

D’une seule voix, les 5 organisations rappellent que le seul logement abordable pérenne, c’est le logement social et communautaire, qu’il soit public et à loyer modique, coopératif ou sans but lucratif. Elles insistent par ailleurs sur le fait que les 3 formules sont nécessaires pour répondre à la diversité des besoins actuels : ceux des familles à modestes revenus qui ne trouvent pas de logements de taille suffisante, des femmes victimes de violence conjugale, des personnes aînées, des personnes en situation d’itinérance, des Autochtones vivant en milieu urbain, etc.

Enfin, les regroupements pressent le premier ministre d’annoncer dans son mini budget du 25 novembre des investissements supplémentaires immédiats pour permettre à des projets de démarrer. Cela est nécessaire selon eux pour que les milliers de logements qui sont actuellement dans les cartons puissent démarrer et que les municipalités puissent atteindre les objectifs qu’elles se sont fixés. Dans son discours d’ouverture, le premier ministre a réaffirmé qu’il allait tenir les engagements que son gouvernement a pris en 2018 ; il doit donc respecter celui de livrer les 15 000 logements promis avant la fin de son mandat. De plus, il doit prévoir les investissements nécessaires pour construire minimalement les 5 000 nouveaux logements sociaux et communautaires annuellement, dont le besoin fait consensus parmi les intervenants, les municipalités et les partis d’opposition. Et enfin, on demande à ce que l’ensemble des parties prenantes soient consultées sur le nouveau programme avant son adoption.

Citations

« Le sous-financement du développement de logements sociaux et communautaires bafoue les obligations du gouvernement du Québec, qui s’est engagé par le passé à mettre en œuvre progressivement le droit au logement. La rareté de logements locatifs et la spéculation immobilière entraînent des hausses de loyer faramineuses et des évictions souvent illégales, laissant sur le carreau un nombre croissant de locataires. Des dizaines de milliers de ménages locataires sont ainsi forcés de vivre dans des logements totalement inadéquats, insalubres, trop chers ou encore non-sécuritaires ; condamnés à couper mois après mois dans d’autres besoins essentiels pour payer leur loyer. » - Véronique Laflamme, porte-parole du FRAPRU.

« Un dollar investi dans le logement communautaire, ce n’est pas la même chose qu’un dollar investi dans le privé. Les investissements dans le logement coopératif ont des retombées sociales et économiques importantes dans toutes les régions. Le logement coopératif est une des formules incontournables pour permettre à des familles à modestes revenus d’avoir accès à un logement adéquat » - Jacques Côté, président de la Confédération québécoise des coopératives d’habitation (CQCH).

« L’ouverture du financement public pour des promoteurs privés contenue dans le projet de loi 49 est une ouverture sans précédent. Le secteur privé ne peut pas développer du logement réellement abordable dans le temps et pour qu’il soit réellement abordable pour les ménages à faibles et modestes revenus, ça prendrait des investissements publics considérables, qui ne laisseront rien aux communautés. Utiliser les fonds publics pour du logement privé, c’est du gaspillage » - Alain Marcoux, président de l’Association des groupes de ressources techniques du Québec (AGRTQ)

« On voit bien avec ce qui se passe au fédéral que les programmes qui comptent sur les promoteurs privés pour construire du logement "abordable" ne fonctionnent pas. Des loyers à 2 225$ par mois, ça n’a rien d’abordable pour monsieur et madame tout-le-monde ! Le gouvernement de la CAQ doit préserver le modèle québécois et réserver son programme au logement social et communautaire, qui seul peut garantir l’abordabilité et la pérennité des logements et des investissements publics » - André Castonguay, président du Réseau québécois des OSBL d’habitation (RQOH)

« Beaucoup trop de locataires du Québec n’ont d’autres choix que de vivre dans des logements trop chers, trop petits ou insalubres, au détriment de leur santé physique et mentale. En date du 31 décembre 2020, 37 149 ménages étaient inscrits sur les listes d’attente des offices d’habitation dans l’espoir d’obtenir un logement social. Le temps d’attente moyen est d’aux moins cinq ans dans les principales villes du Québec. Ne pas faire de leurs besoins une priorité n’est pas une option » - Robert Pilon, coordonnateur de la Fédération des locataires de HLM du Québec (FLHLMQ)

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