Les beaux discours du nouveau gouvernement à la COP 21 ainsi que la signature de l’Accord de Paris permettaient une euphorie chez les environnementalistes. Malheureusement, face à un Canada grand producteur de pétrole de la planète, ce fut une erreur de baisser les bras ! Nous en avons la preuve aux lendemains pénibles de la COP 27.
Certes, M. Trudeau a redonné le droit de parole en public aux scientifiques et a respecté notre consensus social contre les projets de pipelines Énergie Est et GNL Québec. Cependant, nous aurions dû nous méfier d’un État accro au pétrole. En effet, dans les jours précédant le scrutin de 2015, nous avons appris que M. Dan Gagnier, co-président de la campagne électorale des libéraux, avait envoyé des courriels compromettants aux promoteurs de l’oléoduc Énergie Est. Pris en flagrant délit d’aider clandestinement les lobbyistes des sables bitumineux, M. Gagnier a été contraint de démissionner.[1] Ce double-jeu aurait dû nous mettre la puce à l’oreille.
Tout en continuant ses beaux discours, le gouvernement Trudeau a mis la table pour que les sables bitumineux prennent de l’expansion. Pour favoriser l’accès aux marchés internationaux de ces énergies fossiles ayant un taux de recouvrement énergétique (TRE) exécrable, il a permis à l’industrie de faire la promotion d’Énergie Est et de Keystone XL. Comme si ce n’était pas suffisant, il a acheté l’oléoduc Trans Mountain pour 4,5 milliards de dollars et a englouti un autre montant de 21 milliards de nos impôts pour en tripler la capacité. Malgré l’avis de l’Agence internationale de l’énergie contre tout nouveau projet d’énergie fossile, ce gouvernement supposément pro-climat vient d’autoriser le projet Bay du Nord au large de Terre-Neuve.
Pour ce qui est du gaz (majoritairement du gaz de schiste, donc beaucoup plus polluant que le gaz naturel classique !), ce gouvernement a autorisé la construction d’un terminal sur la côte du Pacifique et du gazoduc Coastal GasLink. De même, nous ne pouvons pas oublier la saga de Goldboro en Nouvelle-Écosse, ni celle du gazoduc de 780 km de GNL Québec et de l’usine de liquéfaction de gaz naturel sur les rives du Saguenay.
Quant à la COP 27 qui vient de prendre fin en Égypte, M. Trudeau n’a pas cru bon de s’y rendre ; il aurait eu des choses plus importantes à faire. Pendant les deux premières semaines de la conférence, les négociateurs du Canada étaient de mèche avec l’industrie des énergies fossiles. Ils refusaient de parler d’une réduction des hydrocarbures et encore moins de la nécessité d’y mettre fin. Ce qui a mis le Canada en porte-à-faux « avec la science climatique crédible, ainsi que l’Union européenne, les États-Unis, l’Inde, et plusieurs autres nations... ». [2] Cependant à la toute fin, en période de prolongation, ils ont ouvert la porte pour que le communiqué final puisse utiliser des mots comme « réduction » des énergies fossiles. Cela a évité que la conférence soit un échec, mais pour un pays qui de targue d’être un leader en environnement, ça laisse pantois ![3]
Le gouvernement Trudeau avait promis de réduire nos GES lors de son adhésion à l’Accord de Paris ; l’exploitation effrénée des sables bitumineux et du gaz de schiste est incompatible avec ces objectifs. Pourtant, il avait déchiré sa chemise lorsque le Président Trump s’était retiré de l’Accord de Paris : « Le Premier ministre qui s’était dit « profondément désappointé » lorsque le Président Trump s’est retiré du traité de Paris le bafouait lui-même en catimini. »[4] Et à Charm el-Cheikh, pourquoi l’Alliance nouvelles voies, qui représente 95% de l’industrie pétrolière canadienne, a-t-elle été invitée à présenter son projet de capture du carbone dans le pavillon du Canada ?[5] Pour réduire nos GES, la capture du carbone est loin de faire l’unanimité dans les milieux scientifiques.[6] L’industrie pétrolière espère que ce projet de 21 milliards sera financé à 85% par les contribuables ! En invitant ces « pyromanes du climat » à son pavillon, le Canada en a-t-il fait ses alliés en faveur des dérèglements climatiques ?[7]
Coudonc ! Le Canada serait-il de retour aux conférences des parties (COP) comme un état pétrolier de l’époque du Premier ministre Harper ?
Gérard Montpetit
membre du CCCPEM (Comité des citoyens et citoyennes pour la protection de l’environnement maskoutain)
le 25 novembre 2022
4] The Petroleum Papers par Geoff Dembicki, 2022, Greystone Books, 285 pages.(citation à la page 187)
The prime minister who said he was « deeply disappointed » in President Trump for trashing the Paris climate treaty was quietly trashing it.
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