Unissons-nous, nous femmes du Maroc, privées de nos droits : les femmes aux foyers, les ouvrières, les paysannes, les étudiantes, les chômeuses, les employées du secteur public, que nous soyons dans les villages ou dans les villes.
Si nous nous arrêtons toutes, le monde s’arrêtera.
Nous quitterons notre lieu habituel, le travail et la maison, et remplirons les rues le 8 mars 2019.
Le 8 mars est un jour remarquable dans l’histoire de la lutte des femmes du monde entier pour faire valoir leurs droits et imposer l’égalité. Les femmes continuent leur lutte dans le monde entier sous diverses formes pour mettre fin aux inégalités économiques et sociales et elles résistent quotidiennement contre l’injustice de la culture patriarcale qui prive les femmes de leur dignité et de l’égalité des droits dans tous les domaines de la vie.
En dépit des progrès réalisés par la lutte des femmes, leurs conditions d’exploitation n’ont pas changé radicalement et elles n’ont pas cessé de souffrir d’injustices économiques et sociales dans une économie capitaliste qui recherche le maximum de profits. Le refus de reconnaître le travail des femmes domestiques comme un travail salarial est une caractéristique de cette exploitation, toutes les tâches du travail domestique continuant de consommer la vie et d’épuiser les femmes.
Les conditions de vie des femmes se détériorent de jour en jour à cause de la violence des politiques libérales, qui visent à tout marchandiser, à abolir les lois sur la protection sociale et oblige les femmes à assumer le prix de la privatisation de l’éducation, de la santé et de la destruction des opportunités d’emploi. Le taux de mortalité des femmes enceintes est élevé car elles ne peuvent accéder aux services de santé. Les taux élevés d’analphabétisme chez les femmes indiquent la discrimination dont elles sont victimes depuis des décennies.
C’est cette discrimination qui cible les femmes dans tous les aspects de leur vie qui explique en grande partie leur statut inférieur en matière de travail et de salaires.
Ainsi, la plupart des femmes employées sont dans des secteurs de travail fragiles, aux contrats de travail temporaires. Leur syndicalisation est faible comparée à celle des hommes, ce qui permet à l’employeur de s’en débarrasser plus facilement. L’inégalité dans l’emploi s’étend même aux femmes titulaires de diplômes universitaires, leur taux d’emploi restant faible par rapport aux hommes. Leurs salaires sont en moyenne inférieurs à ceux des hommes dans la plupart des secteurs. Les conséquences de l’introduction de la vulnérabilité dans la fonction publique exacerberont la situation d’exploitation des femmes et augmenteront les inégalités, d’autant plus qu’elle a constitué depuis des décennies des secteurs essentiels de l’emploi des femmes.
Dans les villages, les terres agricoles sont extorquées et rapidement concentrées entre les mains des investisseurs locaux et étrangers. Les femmes rurales restent privées de leur droit à la terre, en raison de la domination persistante de la mentalité patriarcale sur le partage de la terre, l’utilisation de ses revenus et la progression de projets d’investissement sur ces terres. La montée de la lutte de Salaliyat (femmes des terres collectives) est l’une des formes de résistance des femmes contre le vol de leurs pleins droits à la terre et à ses richesses.
La destruction de l’agriculture de subsistance à cause de la prédominance du modèle industriel agricole orienté vers l’exportation affecte négativement les besoins alimentaires des femmes, parce que toute la production est dirigée vers les marchés étrangers et que l’on importe la majeure partie des aliments de base, privant ainsi les femmes de nourriture saine en raison des prix élevés sur les marchés intérieurs. À la suite de politiques de fixation des prix sanctionnés par l’État dans le cadre d’une politique d’ouverture libérale, les maladies associées à la malnutrition chez les femmes vont encore se multiplier.
Les femmes au Maroc, en particulier les femmes pauvres, ne bénéficient pas de la protection de leur dignité et de leur droit à la vie. La violence masculine fait de nombreuses victimes, parfois avec des pertes de vies humaines. La loi contre la violence à l’égard des femmes ne prévoit pas de mécanismes efficaces pour la protection des femmes et le suivi des auteurs de crimes violents, et ce malgré le fait que les femmes sont victimes de violences sexuelles. Les légers gains réalisés par les lois précédentes n’affectent pas l’essence de la culture patriarcale qui légitime l’infériorité des femmes. La discrimination à l’égard des femmes ne peut en aucun cas être éliminée sans éradiquer la source de l’oppression économique et sociale.
À toutes les femmes du Maroc et aux organisations de lutte syndicales et associatives, et à toute la dynamique de la lutte dans laquelle les femmes existent pour défendre la liberté et la dignité et la justice sociale, la démocratie et l’égalité :
Nous appelons toutes les organisations de lutte marocaines à s’impliquer activement dans le déclenchement d’une grève des femmes le 8 mars sous toutes ses formes possibles et à inclure sa reconnaissance en tant que jour férié dans la liste des revendications syndicales en l’honneur des sacrifices consentis par les femmes travailleuses qui ont sacrifié leur vie pour faire reconnaître les droits des femmes.
Manifestons-nous, femmes du Maroc, comme les femmes du monde, le 8 mars 2019 pour repousser toutes les violations par l’État des droits sociaux et économiques du peuple marocain et pour condamner toutes les formes de violence à l’égard des femmes.
Mobilisons-nous toutes le 8 mars, où que nous soyons. Nous sommes des femmes impliquées dans la lutte de notre peuple pour la défense de la liberté et contre l’oppression et la détention.
En ce jour, marchons, femmes solidaires, pour mettre fin à la destruction de notre planète, et l’empoisonnement de notre environnement et dénoncer les guerres, le racisme et le déplacement forcé de femmes.
Nous, femmes dans notre lutte et notre solidarité, sommes capables de créer une autre vie basée sur le respect de la nature, la liberté, la paix et la coexistence
Secrétariat national
26/02/2019
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