Édition du 19 novembre 2024

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Luttes étudiantes

Victoire contre le lock-out au cegep St-Laurent

Le vendredi 24 février 2012 sera désormais une date presque mythique pour les étudiantes et étudiants du Cegep de St-Laurent. En effet, en ce 5e jour de boycott des cours, ceux-ci firent la plus grande démonstration de solidarité couronnée de succès face à une administration bornée et irrespectueuse, le tout dans une attitude de non-violence.

Le jeudi 23 février, trois jours après la levée des cours consentie par l’administration du collège, les étudiant-e-s recommencèrent les lignes de piquetage dures, suite au non-respect de la direction de la proposition de grève voté en assemblée générale. Celle-ci ne respectait pas les modalités d’accès aux locaux et demandait aux étudiant-e-s du programme de soins infirmiers de se présenter à leurs cours préalables aux stages dès le lendemain, sans l’accord du comité de négociation. De plus, elle refusait toujours d’accorder l’accès à certains locaux, notamment ceux d’arts plastiques, d’architecture et aux laboratoires, de même qu’elle refusait de garantir les cours préalables aux stages des autres programmes pendant la grève.

C’est dans ce contexte que 250-300 étudiant-e-s se présentèrent dès 6h jeudi matin pour empêcher quiconque d’entrer dans le collège, en signe de protestation. Après de courtes négociations avec l’administration, les membres du comité négo revinrent à l’extérieur annoncer qu’ils avaient refusé l’offre de celle-ci, qui ne nous accordait aucune de nos revendications. Par conséquent, elle décréta un « lock-out » pour la journée. Plus tard dans la journée, un message fut envoyé à tous le personnel et tous les étudiant-e-s annonçant que le cegep serait fermé vendredi également.

Peu de temps après, un conseil de grève fut demandé, dans lequel une proposition pour commencer le piquetage le lendemain dès 4h du matin, dans le but de bloquer tous membre de l’administration, fut adoptée à majorité.

Ainsi, malgré le froid et le sommeil, c’est plus d’une soixantaine de personnes qui étaient présentes dès 4h. À 4h30, nous étions déjà plus de 100 personnes. Une grande excitation régnait dans l’air, nous étions tous ébahies de constater le nombre de gens qui avaient répondu à l’appel. Lorsque l’autobus 368 arriva devant le cegep, entre 4h et 4h30, rempli d’étudiants et d’étudiantes, un grand cri de joie s’éleva. La solidarité était au rendez-vous.

C’est vers 5h30 que Paul-Émile Bourque, directeur général du collège, accompagné d’autres membres de la direction, arriva. Bien évidemment, l’accès à l’intérieur leur fut refusé, malgré leur demande pour y tenir des négociations. Les étudiant-e-s proposèrent plutôt de tenir les négociations dans un lieu neutre, tel qu’un café, ce que la direction refusa.

La situation en resta là pendant un long moment, jusqu’à ce que les policiers interviennent. Ceux-ci étaient déjà présents à l’arrivé de la direction, de même que certains médias. Pendant tout ce temps, ils restaient en retrait, surveillant le déroulement de la situation. Toutefois, c’est le directeur général qui se mit à sérieusement considérer la possibilité de les utiliser pour forcer la ligne de piquetage, malgré les protestations du syndicat des enseignants. Pendant un moment, nous pensions que ceux-ci avaient réussi à raisonner l’administration. Nous pensions qu’une intervention policière était peu probable, compte tenu du calme dans lequel se déroulait le tout. Néanmoins, nous nous y préparions tout de même, avec l’aide de Philippe Lapointe de l’ASSÉ qui nous fit quelques suggestions quant à ce qu’il importait de faire et de ne pas faire dans une telle éventualité.

Notre précaution fut payante, car 30 minutes après la rumeur qu’il n’y aurait pas d’intervention, une dizaine de policiers s’avancèrent avec leur matraque vers l’entrée principale. Celle-ci était bloquée par plusieurs dizaines d’étudiant-e-s, rapidement rejoints sur les côtés par deux autres groupes d’étudiant-e-s qui chantaient du Harmonium en faisant des signes de paix. Les policiers ont bien tenté de nous faire peur et de briser la ligne, mais rien n’y fit, pas même quelques coups avec la pointe de leur matraque. Après 20 secondes, ils furent obligés de se retirer, incapables de briser la chaîne humaine.

Suite à cette victoire, M. Bourque n’eut d’autres choix que de renvoyer la police et d’accepter de négocier en terrain neutre, soit dans les résidences. Deux membres de la direction y rencontrèrent trois membres du comité de négociation. La police elle-même envoya un communiqué indiquant qu’elle n’interviendrait plus et qu’elle ne tenterait plus de briser les lignes de piquetage, selon une enseignante présente sur les lieux.

Ainsi, une heure après le début des négos, les membres du comité arrivèrent avec cette proposition d’entente qui répondait positivement à toutes nos demandes, soit ;

1- Que l’administration s’engage à permettre la tenue des cours préalables aux stages.
2- Que les locaux de danse, de musique et d’art dramatique soient ouverts tel que convenu.
3- Que tous ces locaux normalement accessibles sans professeur restent accessibles selon les mêmes modalités qu’à l’habitude, sauf pour des raisons légales ou d’assurances, auquel cas on en rediscuterait mardi avec des preuves.
4- Que les activités intramurales se tiennent.
5-Que l’on lève les lignes de piquetage ferme.
6- Que 12 étudiants aient accès à la Grande Salle ce vendredi.
7- Que les cadres et la sécurité rentrent dans le Cégep aujourd’hui.
8- Qu’il y ait une levée de cours lundi, sauf pour l’AEC et la francisation. Que tout le personnel ait accès au Cégep.

Après quelques débats, cette proposition fut acceptée à majorité. Le comité de négo retourna aux résidences afin de finaliser l’entente et la signer.

Vers 11h30, le tout était conclu.

En cette journée désormais inscrite dans les annales de St-Laurent, nous, les quelques 250-300 étudiant-e-s présents au piquetage, avons réussi à faire plier l’administration qui, dans la perspective non-avouée de briser le mouvement étudiant, refusait de nous accorder nos demandes votés en assemblée générale. En effet, avec le vote de reconduction ayant lieu le lundi suivant, ils avaient tout intérêt à ce que l’AECSL n’obtienne pas ce qu’elle voulait. C’est en faisant preuve d’engagement, de solidarité et de fraternité que nous avons été en mesure d’aller chercher ces acquis qui profiteront à tous. Nous pouvons en être fiers ! Malgré tout, nous devrons rester vigilants, et nous attendrons de voir de quelle façon l’administration appliquera l’entente avant de crier victoire, car l’histoire nous enseigne que celle-ci n’est pas digne de confiance lorsqu’il est question de revendications étudiantes.

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