Édition du 17 décembre 2024

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Fonction publique

Sous-traitance gouvernementale - Une dérive coûteuse à l'effet démobilisant

QUÉBEC, le 25 avril 2023 - Loin de fondre comme neige au soleil, la sous-traitance prend du galon dans les officines gouvernementales du Québec. C’est ce qui ressort d’un sondage réalisé en décembre 2022 par le Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ) auprès de 3 225 expertes et experts de l’État.

« Parmi les faits saillants de ce sondage, nous constatons que 53,2 % des personnes sondées signalent que leur direction confie des contrats de service professionnel en sous-traitance. Du lot, l’informatique et les technologies de l’information et de la communication (TIC) ressortent de manière prépondérante, car pour 51,3 % des personnes, la part la plus importante du travail de supervision de la sous-traitance s’effectue dans ces domaines », indique Guillaume Bouvrette, président du SPGQ.

En outre, les membres du SPGQ ayant participé à l’étude observent que, sur 5 des 10 principaux domaines confiés en sous-traitance, les taux journaliers moyens chargés par les consultants sont environ deux fois supérieurs à ceux des ressources internes. Le gouvernement pourrait économiser environ 250 millions $ par an pour la seule catégorie des contrats de service en informatique s’il recourait à des effectifs internes.

« Souvent dénoncées par le Vérificateur général, certaines étapes névralgiques demeurent malgré tout confiées en sous-traitance. Il nous semble inconcevable qu’une étape comme la définition du projet puisse être réalisée par du personnel externe, comme le mentionne un répondant sur trois. Et il est encore plus choquant qu’une personne sur dix indique que l’appel d’offres du projet puisse être rédigé par des sous-traitants. Sans oublier que le transfert d’expertise du consultant vers le personnel interne est jugé inadéquat par un répondant sur deux », ajoute M. Bouvrette.

Par ailleurs, près de 75 % des personnes sondées observent que, depuis 10 ans au sein de leur direction, les activités confiées en sous-traitance provoquent une dépendance envers les ressources externes. Plus de 60 % croient qu’il devrait y avoir moins de sous-traitance. Environ 80 % de ces derniers jugent que 50 % ou plus des travaux en sous-traitance devraient être rapatriés à l’interne. Aussi, près de 35 % estiment qu’en comparaison avec les travaux réalisés à l’interne, ceux réalisés en sous-traitance sont moins ou beaucoup moins efficients.

Pour se convaincre de l’importance des effectifs externes au sein de l’administration publique, les Portraits de la main-d’œuvre et du recours à des consultantes et des consultants affectés aux ressources informationnelles apportent un éclairage complémentaire à l’étude du SPGQ. Dans son édition 2021, le gouvernement recense 4 833 ressources externes à l’emploi de l’administration publique alors qu’elles s’élevaient à 4 330 en 2020, une augmentation de 10 %. Toujours selon les Portraits, le nombre de postes vacants enregistre une hausse encore plus marquée entre 2020 et 2021, passant de 1 960 à 2 467, un bond de plus de 20 %.

« L’édition 2021 des Portraits révèle aussi qu’en informatique, la sous-traitance atteint des seuils alarmants dans certains ministères et organismes où plus d’une personne sur deux provient de firmes externes. Les entités gouvernementales les plus friandes de sous-traitance sont le ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (58,8 %), la Régie du bâtiment du Québec (57,6 %) ; la Société de l’assurance automobile du Québec (49,5 %), le ministère de la Justice (48,8 %), le Curateur public (45,8 %), le ministère des Transports (44,4 %) et le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs. (43,8 %) », mentionne Guillaume Bouvrette.

De ce sondage, le SPGQ conclut au renforcement d’une fonction publique parallèle composée de personnes consultantes dans l’appareil gouvernemental. Non seulement ces personnes coûtent souvent une fortune à l’État, mais plusieurs d’entre elles utilisent ses ressources (bureau, ordinateur, adresse électronique gouvernementale et services de secrétariat). L’effet démobilisant de la sous-traitance sur le personnel interne n’est pas à négliger, car 46,1 % des personnes sondées par le SPGQ le ressentent. La motivation s’avère pourtant névralgique pour la réussite et l’efficacité au travail, comme le suggère la littérature managériale.

« Pour tenter de juguler les effets pernicieux de la sous-traitance, une rencontre entre la présidence du SPGQ et des représentants du gouvernement s’est tenue au printemps 2022. Le SPGQ avait alors exprimé le souhait de créer, en collaboration avec le gouvernement, une table de réflexion et d’échange sur la sous-traitance. Les interlocuteurs patronaux s’étaient montrés intéressés par la création de cette table afin, entre autres, de se doter d’objectifs de réduction de la sous-traitance et d’un calendrier de travail pour y parvenir. La mise sur pied de cette table se fait toujours attendre », conclut le président du SPGQ.

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