Édition du 17 décembre 2024

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Syndicalisme

Projet de loi n° 74 : une menace pour l'autonomie universitaire, la viabilité des programmes et l'attractivité du Québec

MONTRÉAL, le 8 nov. 2024 - Dans un mémoire déposé cette semaine à la commission des relations avec les citoyens, la Fédération québécoise des professeures et professeurs d’université (FQPPU) tire la sonnette d’alarme. Le projet de loi n° 74 (PL74), récemment déposé par le ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration, pourrait déstabiliser le paysage de l’enseignement supérieur au Québec. Sous prétexte de mieux encadrer l’accueil des étudiant•es internationaux•ales, ce projet de loi confère au gouvernement de nouveaux pouvoirs décisionnels. Ces derniers menacent l’autonomie des universités et leur capacité à attirer des talents internationaux.

En effet, en donnant au gouvernement le pouvoir de bloquer l’accueil d’étudiant•es internationaux•ales souhaitant s’inscrire dans certains domaines de formation et certains établissements, le PL74 remet en question un principe essentiel : l’indépendance des universités. « Dans les faits, ce transfert de pouvoir risque de priver les établissements de leur autonomie, les empêchant indirectement de définir par elles-mêmes leur offre de formation », déclare Madeleine Pastinelli, présidente de la FQPPU. « Qui plus est, le Québec court le risque de renoncer à de précieuses perspectives internationales, qui nourrissent pourtant notre recherche et inspirent des solutions nouvelles aux défis de l’heure. Nous croyons fermement que le gouvernement a tout à perdre en s’ingérant ainsi dans des décisions qui devraient expressément relever de nos universités. »

Les trois grandes inquiétudes de la FQPPU :

Autonomie menacée

Le projet de loi centralise le pouvoir décisionnel entre les mains de l’État, écartant les universités des décisions qui affectent directement leur gestion. Cela limite la capacité des établissements à déterminer leurs priorités et à adapter leur offre de formation aux besoins locaux, nationaux et internationaux.

Viabilité des programmes fragilisée

Les universités, notamment celles en région, dépendent souvent des inscriptions d’étudiant•es internationaux•ales pour soutenir la viabilité de certains programmes. En restreignant leur accueil de manière discrétionnaire, le projet de loi risque de compromettre leur survie.

Attractivité du Québec en déclin

Avec des règles plus restrictives et un manque de transparence, le Québec pourrait perdre son statut de destination d’études prisée. Or, les chercheur•euses et étudiant•es internationaux•ales apportent une diversité et un dynamisme essentiels aux campus québécois. En limitant leur accès, le Québec enverrait un signal de fermeture qui pourrait affaiblir son attractivité à l’échelle mondiale.
Recommandations de la FQPPU

Pour garantir un avenir où les universités québécoises conservent leur indépendance et leur attractivité sur la scène internationale, la FQPPU recommande au gouvernement de modifier son projet de loi pour s’assurer au minimum de :

 Consulter la communauté universitaire avant toute décision affectant l’accueil d’étudiant•es internationaux•ales ;

 Réaliser des analyses d’impact pour évaluer les répercussions des restrictions, et établir des mécanismes de financement pour soutenir les programmes menacés ;

 Renforcer la transparence des critères d’admission pour préserver la réputation du Québec comme destination d’études.

La FQPPU, qui représente plus de 8 000 professeures et professeurs, réitère à cet égard sa volonté de travailler avec le gouvernement pour protéger l’autonomie et la gestion collégiale des institutions d’enseignement supérieur au Québec.

Un ministère réduit à peau de chagrin

Soulignons que le PL74 s’inscrit dans une tendance préoccupante, par laquelle le ministère de l’Enseignement supérieur est dépouillé de certaines responsabilités cruciales au profit d’autres ministères, pourtant déconnectés des priorités et des ambitions de la communauté universitaire. Cette logique rappelle en effet l’adoption du projet de loi n° 44, au printemps dernier, qui avait consacré la subordination des Fonds de recherche du Québec (FRQ) au ministère de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie. Le geste avait alors suscité une vague de contestation sans précédent dans la communauté scientifique. « Si nous voulons, au Québec, continuer à produire une recherche de haute qualité et à former les meilleur•es chercheur•euses, il est essentiel d’avoir un ministère de l’Enseignement supérieur non seulement fort, mais à l’écoute du milieu universitaire », affirme Madeleine Pastinelli. « Or, nous nous inquiétons de ce que ceux qui décident sont de plus en plus éloignés de la réalité du terrain, et qu’ils ne prennent même pas la mesure des conséquences bien réelles de ces transformations imposées. »

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