Des militant.e.s pour les droits humains soutiennent les demandeurs et demandeuses d’asile guinéen.nes dans leur combat pour l’instauration d’un moratoire sur les déportations vers la Guinée.
MONTRÉAL, 7 décembre 2019 – Alors que la crainte de voir le Président guinéen Alpha Condé amender la constitution, ce qui lui permettrait de briguer un troisième mandat, exacerbe les tensions en Guinée, des militants pour les droits humains demandent au gouvernement canadien de reconnaître la dangerosité de la situation politique actuelle en Guinée et d’instaurer un moratoire sur les déportations vers ce pays d’Afrique de l’Ouest. Au moins 20 personnes sont mortes depuis le début des manifestations en octobre, celles-ci s’ajoutant au bilan de plus de 70 manifestants tués depuis 2015.
« Pourquoi Trudeau nous ignore-t-il ? Nous lui disons que le pays n’est pas sécuritaire et il fait la sourde oreille. C’est avec nos vies qu’il joue. Nous avons besoin d’un moratoire immédiatement ». a dit Mohamed Barry, demandeur d’asile et porte-parole de Guinéens unis pour le statut.
« Le Canada refuse en bloc nos demandes d’asile politique. Je suis fatigué de me présenter au centre de détention de Laval et de voir que des membres de la communauté guinéenne y sont toujours détenus ». a ajouté Mohamed Barry.
Dix ans après la répression violente d’une manifestation pacifique contre la junte militaire le 28 septembre 2009 à Conakry, au cours de laquelle au moins 150 personnes ont été tuées et plus de 100 femmes ont été violées et victimes d’autres formes de violence sexuelle par des membres des forces de sécurité, une culture d’impunité continue de servir en Guinée.
« La situation en matière de droits humains demeure fragile en Guinée et risque de se détériorer avec la recrudescence des tensions politiques à l’approche des élections présidentielles de 2020. Amnistie internationale est vivement préoccupée par la situation et continue de monitorer avec attention ce qui se passe dans le pays, puisque les autorités guinéennes ont largement échoué à remédier à la culture de l’impunité pour les violations des droits humains commises par les membres des forces de sécurité ». a déclaré Andréanne Pâquet, Directrice Mobilisation et Impact d’Amnistie internationale Canada francophone
« Les violences qui ont paralysé la Guinée n’ont rien de surprenant. La sanglante répression qui vise à contenir les contestations populaires n’est qu’une traduction de ce que sont la société guinéenne et le pouvoir politique, et ce, depuis l’indépendance en 1958. C’est-à-dire une société marquée par la généralisation de la tyrannie à tous les niveaux de la vie sociale, et un système politique organisé selon les logiques de la ponction et de la criminalité ». a ajouté Amadou Sadjo Barry, professeur de philosophie au CÉGEP de Sainte-Hyacinthe
« De nombreuses personnes issues de Guinée sont installées au Québec, travaillent ici, contribuent à notre économie et font partie intégrante de nos communautés. Nombre de Guinéennes et de Guinéens vivent dans la précarité, peinent à avoir un statut d’immigration permanent au Canada et risquent d’être renvoyé.e.s en Guinée. Pourtant, le contexte de persécution et d’atteinte aux droits humains dans ce pays est connu et bien documenté. Alors que ces personnes sont très bien intégrées ici, la menace de déportation vers l’incertitude et la violence les hante. Cette situation est intolérable et doit être dénoncée ». a dit le porte-parole en matière d’immigration de Québec Solidaire, Andrés Fontecilla, tout en appelant ses collègues aux niveaux provincial et fédéral à intervenir.
En 2019, Radio-Canada révélait que le Canada coopérait secrètement avec le régime guinéen pour dissuader les demandeuses et demandeurs d’asile de se rendre au Canada. Les deux pays entretiennent d’importantes relations économiques. Plusieurs compagnies canadiennes comme SEMAFO, SNC-Lavalin et Rio Tinto exploitent des gisements de minerai dans cette petite nation d’Afrique de l’ouest. Les Guinéens ne profitant que très peu des retombées économiques associées à la présence des minières canadiennes, la Guinée demeure un des pays au monde où l’indice de développement humain est le plus bas.
Source :
Guinéens unis pour le statut et le Centre des Travailleurs et Travailleuses Immigrants
Mise en contexte :
– Amnesty International | Guinée : Les voyants au rouge pour les droits humains à l’approche de l’élection présidentielle, https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2019/11/guinea-human-rights-red-flags-ahead-of-presidential-election/
– Human Rights Watch | Profil du pays : Guinée, https://www.hrw.org/fr/africa/guinee
– CBC, Distasteful Alliance : The Secret story of Canada’s fight against migrants
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