En mettant en place une sorte d’odieux confessionnal dont l’objectif est non seulement de diviser le mouvement étudiant pour tenter de le briser, mais aussi de rendre illégitime toute forme de résistance active de la part des étudiants, en instituant un tribunal moral où ils sont à la fois juges et parties, la ministre de l’éducation et ses collègues du gouvernement se livrent à une violence morale absolument intolérable et indigne d’individus qui prétendent nous gouverner ! Ce tribunal moral constitue une caricature de justice incriminant d’une manière arbitraire tout un ensemble de faits qu’un esprit démocratique élémentaire devrait laisser au jugement, bien qu’imparfait, des véritables tribunaux.
Par ailleurs, le gouvernement ne peut se dégager de sa responsabilité en ce qui concerne la violence physique illégitime qui a été à maintes reprises depuis le début du conflit, exercée par des forces policières, mais aussi à présent par des milices privées, contre des étudiants, mais aussi contre de simples citoyens, ainsi que contre des journalistes et des enseignants.
En admettant qu’il soit rentable politiquement, le spectacle inquisitoire indigne auquel le gouvernement se livre, ne prépare aucunement une reprise des cours déjà des plus problématiques, alors que des enseignants pris en otages par la stratégie gouvernementale lancent des SOS, et que des élèves du secondaire se joignent maintenant au mouvement de grève !
Une gestion de crise irresponsable
Bien qu’ils doivent se soumettre à un certain devoir de réserve, les directions scolaires et leurs regroupements font de plus en plus le constat qu’ils ne sont plus en mesure de faire face à une gestion irresponsable de la crise par le gouvernement, laquelle a déjà causé des dommages irréparables au secteur postsecondaire. Transposée dans une salle de classe, la stratégie de la ministre de l’éducation face au mouvement étudiant aboutirait à un désastre ! Alors qu’elle se répand en injonctions moralisantes, la ministre de l’éducation semble très peu consciente de ce qui doit préoccuper fortement nombre d’enseignants : comment élaborer et mettre en œuvre une pédagogie pacificatrice de reprise des cours, comment rétablir un climat de classe favorable à l’étude après des semaines d’un conflit qui a divisé non seulement le mouvement, mais aussi le milieu étudiant ?
Face à l’échec d’un plan A dans lequel le gouvernement a tenté de forcer la reprise des cours en s’appuyant sur des décisions administratives ou des injonctions judiciaires, il est à craindre qu’un sinistre plan B ne soit en préparation, sous forme de décret ou de loi spéciale instrumentalisant le système parlementaire et judiciaire et d’autres institutions étatiques, pour contraindre à une rentrée en classe des professeurs et étudiants, sous la menace de sanctions judiciaires et financières, ainsi que policières et carcérales...
Afin de vaincre une jeunesse éveillée et inquiète face à son avenir, le gouvernement mise actuellement, avant de lancer son plan B, sur une division, un épuisement, une répression policière et judiciaire, ainsi qu’une diabolisation médiatique du mouvement étudiant, tout en effectuant une tentative désespérée de diversion avec son tribunal moral devant lequel la CLASSE, la FECQ et la FEUQ sont convoquées.
Le gouvernement pourrait pourtant immédiatement mettre fin à la crise avec une solution de la raison et de la responsabilité, celle d’un moratoire sur les droits de scolarité jusqu’aux prochaines élections ! À moins que cette crise ne soit devenue un instrument électoral, comme la tentative du premier ministre de piéger Madame Pauline Marois sur la question de “la violence et de l’intimidation”, pourrait le laisser présager ! Le gouvernement n’a pas démontré qu’il résiste à la tentation d’aggraver et d’instrumentaliser la crise scolaire dans un but électoral, c’est pourquoi la vigilance des citoyens est de mise, ainsi que la solidarité avec le mouvement étudiant.
Yves Claudé