En effet, l’industrie des carburants fossiles a toujours de grandes ambitions pour notre territoire. En plus des gaz de schiste dans la vallée du Saint-Laurent, il y a des projets de forage en Gaspésie et sur l’Île d’Anticosti ; et on lorgne les gisements de Old Harry sous les eaux du golfe Saint-Laurent. De plus, l’industrie veut que notre sol soit un point de transit pour les pétroles lourds des sables bitumineux albertains : transport par train-bloc jusqu’à Sorel-Tracy, puis par superpétroliers vers des ports lointains.
Il ne faut surtout pas oublier que TransCanada veut construire son mégapipeline avec un terminal à Cacouna, dans la « pouponnière » des bélugas. Plus d’un million de barils par jour traverseront 961 cours d’eau sur un trajet de 4600 km. Ce sera payant pour les compagnies albertaines, mais en cas de déversement, nous devrons nous débrouiller pour dépolluer nos rivières, comme nous l’avons appris à Lac-Mégantic.
Les municipalités peuvent gérer un désastre comme un incendie. Cependant, ni les gouvernements ni les pétrolières n’ont la volonté de faire les investissements nécessaires pour créer un système capable de gérer une crise en cas d’accident majeur. En septembre, un petit déversement de 100 000 litres de diesel léger aux Îles-de-la-Madeleine a posé un défi majeur ; deux mois plus tard, les autorités n’ont pas terminé de tout ramasser. Imaginons la catastrophe en cas de déversement majeur de pétrole lourd !!!
N’oublions pas que le deuxième rapport du BAPE (Bureau d’audiences publiques en environnement) au sujet de l’exploitation des gaz de schiste dans les basses terres du Saint-Laurent doit être déposé au plus tard le 28 novembre. On peut conclure que la déclaration de monsieur Binnion indique que la trêve est terminée !
Lors d’un voyage en Pennsylvanie, nous avons vu les problèmes que la fracturation hydraulique a causés à l’environnement et aux citoyens. Si une poignée d’individus font de l’argent, la majorité en a ras le pompon ! À tel point que lors des élections du 4 novembre dernier, plusieurs villes des États-Unis ont tenu un référendum où les électeurs devaient décider si oui ou non ils voulaient interdire la fracturation hydraulique sur leur territoire [2].
Le cas le plus significatif fut celui de Denton, une ville de 123 000 habitants au nord du Texas au-dessus des schistes de Barnett. C’est dans cette région que la fracturation hydraulique a débuté voilà presque vingt ans. Avec 275 puits fracturés, ses habitants en connaissent le pour et le contre ! Malgré les effets sur l’activité économique locale tant vantés par l’industrie, 58 % des électeurs ont voté pour interdire cette pratique. Monsieur Bruce Baizel résume très bien la situation : « Si, ici, au cœur de l’industrie pétrolière et gazière, on ne peut pas vivre avec la fracturation, qui le peut ? [3] » Certes, l’industrie s’empresse de contester la légalité de ce référendum, mais c’est un bon baromètre du ras-le- bol des gens qui ont vécu avec la fracturation.
L’industrie veut revenir en force dans notre région. Aux États-Unis, plusieurs états ont fait l’expérience des méfaits de la fracturation. Forts de leur expérience, aurons-nous le courage et la maturité de dire non aux chants des sirènes de l’industrie des carburants fossiles qui veulent nous attirer dans leurs filets gluants ?
Gérard Montpetit
La Présentation, Qc
13 novembre 2014