13 septembre 2023 | tiré du site aplutsoc
https://aplutsoc.org/2023/09/13/conference-du-win-des-9-et-10-septembre-2023-compte-rendu/
Les moyens de communication modernes (mails et visios) ont fourni la base de fonctionnement du réseau durant cette période, notamment par la tenue de réunions publiques hebdomadaires en visio dédiées à l’actualité. Les événements surgis depuis 2019, notamment l’invasion de l’Ukraine par Poutine, ont créé un contexte de divergences d’appréciation qui aboutissent une prise de distance de la part des membres d‘Aplutosc qui avaient participé au WIN depuis sa création.
La période de création du WIN (réunions initiatrices en 2009-2011) correspond à la période où les fondateurs d’Aplutsoc (2015) étaient alors organisés au sein du groupe français Militant. En 2014-2015, des divergences partant principalement de l’appréciation des événements en Ukraine (Maïdan, authentique soulèvement démocratique populaire versus opération propulsée par l’impérialisme occidental qualifiée de « révolution Orange sponsorisée par Soros ») et comprenant aussi des divergences sur l’attitude à avoir vis à vis de la France Insoumise (une opération bonapartiste épousant les institutions de la 5eme République, anti-démocratique et anti-mouvement ouvrier par l’imposition de la structuration « gazeuse » laissant toute latitude au noyau dirigeant mais interdisant à la base du mouvement de se structurer et de s’organiser démocratiquement avec débats, votes et mandats, selon notre analyse, une variante de réformisme de gauche selon nos contradicteurs) ont amené à la scission de Militant. Ainsi Arguments Pour la Lutte Sociale (aplutsoc.org ) est née en tant que fraction publique au sein de Militant avant de devenir un organe indépendant avec son blog, son bulletin, ses initiatives politiques, son activité propre.
Ce rappel est important car, à ce moment là (2015), les fondateurs d’Aplutsoc ont estimé qu’il était possible et nécessaire de continuer à participer aux activités du WIN, tandis que Raymond Debord et ses associés se retiraient de ce cadre jugé inadapté pour eux, devenus champions de l’insertion dans « là où çà se passait » selon des formes inédites et prometteuses. La dernière fois où l’auteur de ces lignes a rencontré Raymond, dans une manif en 2022, ce dernier lui a annoncé qu’ils jetaient l’éponge dans LFI, face à l’impossibilité de s’organiser et de fonctionner dans le cadre des règles « gazeuses » et des foucades du noyau dirigeant regroupé derrière Jean-Luuuc.
L’arrivée de la guerre le 24 février 2022 a entraîné la nécessité d’une prise de position claire, car plus rien ne permettait au sein du WIN de s’en tenir à une politique du « pas de ligne stricte ni de moyens disciplinaires contraignants tant que l’allure générale des affaires courantes des uns et des autres va dans le sens du mouvement ».
Seuls deux secteurs associés au WIN ont clairement pris faits et cause pour la lutte du peuple ukrainien contre la guerre d’agression de Poutine : Oakland Socialist, basé à Oakland (Californie) et Aplutsoc. Nous avons aidé John Reimann et ses camarades à lancer l’Ukraine Socialist Solidarity Campaign qui construit la solidarité politique et pratique aux USA avec la lutte des Ukrainiens en combattant les tendances campistes et « pacifistes » au sein de la gauche US qui se révèle terriblement perméable à l’influence poutinienne sous le prétexte de combattre d’abord « notre propre impérialisme ».
Sous l’effet de cette différenciation politique, John Reimann, l’éditeur d’Oakland Socialist, a été marginalisé et écarté après quelques disputes, tandis que pour notre part, nous avons tenté de convaincre les camarades du WIN de la nécessité de prendre partie pour le peuple ukrainien et son droit à la liberté, donc son droit à l’autodéfense par tous les moyens nécessaires, contre l’impérialisme de Poutine. Eussions nous été pleinement anglophones que, nous aussi, nous aurions fini par prendre la mouche dans les querelles où la moutarde peut vous monter au nez.
Le fait de ne pas forcément saisir toutes les nuances et allusions dans les échanges verbaux, le fait de ne pas pouvoir toujours répondre du tac au tac, le fait de prendre du temps pour choisir nos mots et les exprimer du mieux possible en anglais (*), le fait que formellement sur le plan du libre débat, nous avons pu faire paraître en mars 2022 et en février 2023 nos tribunes exprimant notre position dans la revue du WIN, On The Brink, et enfin surtout, le fait que dans notre activité courante, ces échanges ne portaient pas à conséquence immédiate, chacun menant sa vie de son côté, font que nous n’avons pas jusqu’à la veille de cette conférence pris l’initiative d’une rupture.
Sauf que dix-huit mois après le début de la guerre, au regard de sa place centrale dans la conjoncture internationale, une réunion plénière visant à définir une position commune sur la marche du monde et la définition d’une action commune dans un cadre commun rendait incontournable le besoin de clarification. Nous renvoyons les lecteurs au document de réponse à Roger Silverman que Vincent Presumey et Olivier Delbeke ont cosigné. Voir ci dessous les documents.
La conférence s’est tenu à Londres et en visio, avec la participation de camarades en provenance de Grande Bretagne, d’Irlande – Nord et Sud, de France, du Danemark, de Suède, d’Allemagne, de Grèce, de Chypre, de Turquie, du Pakistan, du Sri-Lanka, d’Afrique du Sud, du Nigeria, des USA. Des camarades iraniens, indiens, namibiens ont envoyé des messages de salutations et des exposés sur la situation dans leur pays.
Outre les camarades affiliés au WIN, il y avait des camarades organisés dans Internationalist Standpoint, des représentants du groupe pakistanais The Struggle, séparé depuis quelques temps en deux fractions, l’une désormais affiliée à la LIS/ISL et pro-ukrainienne, et l’autre « orthodoxe grantiste » dénonçant la précédente comme pro-NATO.
Les documents de la discussion
- Sur la rivalité Chine / USA – Texte rédigé par Ed Bober et David Hemson (PDF en anglais)
- La Guerre en Ukraine, une approche internationaliste, texte de Roger Silveman ( PDF en anglais)
- Building The International, texte de Roger Silverman (PDF en anglais)
- La présentation faite par Olivier Delbeke sur l’Ukraine ( PDF en français/PDF en anglais)
- La conclusion finale au débat sur l’Ukraine par Olivier Delbeke (PDF en français / PDF en anglais)
- Le texte de réponse à Roger Silverman sur la construction de l’Internationale par Olivier Delbeke et Vincent Présumey (en français / en anglais)
Nous reviendrons prochainement dans d’autres textes sur les problèmes discutés avec les camarades du WIN, aussi bien sur la situation mondiale que sur la manière de s’organiser.
Dans les débats, notamment sur la construction de l’Internationale, des représentants du regroupement Internationalist Standpoint sont intervenus. Internationalist Standpoint (IS) est issu de la crise entre 2019 et 2021 du courant International Socialist Alternative lui-même issu d’une scission du CWI en 2019. Internationalist Standpoint a tenu sa conférence de fondation officielle en février 2023.
La plupart des affiliés du WIN, comme ceux d’IS, sont des (souvent vieux maintenant) militants formés dans le cadre du CWI, le courant international créé en 1974 comme projection du Militant britannique de Ted Grant. Marqués par les effets d’un certain centralisme qui se révèle peu démocratique mais surtout bureaucratique, ils gardent le traumatisme des expulsions dès qu’un désaccord surgit. Tous, WIN et IS, semblent déterminés à répudier la suppression des positions divergentes et contradictoires. C’est positif mais cela ne suffit pas encore à définir un régime d’organisation combinant libre discussion et modalités de décisions et action commune.
Ce sujet est vraiment déterminant pour l’avenir du mouvement révolutionnaire et nous entendons, nous aussi à Aplutsoc, y contribuer car son enjeu dépasse largement le cadre de la conférence dont nous rendons compte. De ce point de vue, le fonctionnement du WIN basé sur des textes non votés mais ayant quand même quelque valeur collective ne peut que buter sur un obstacle ou alors évoluer vers une pratique marquée par la roublardise… A un moment dans l’histoire, il faut voter et décider de ce que l’on fait ensemble, sans nécessairement tomber dans le travers du parti-fraction-secte basé sur la discipline pour tous sauf le chef et la direction inamovible.
Un représentant d’IS a évoqué la réunion internationale tenue à Milan les 15 et 16 juillet derniers, qui a rassemblé des courants d’extrême gauche de diverses traditions et affiliations. Il a souligné que cela pouvait être intéressant en termes d’échanges d’informations et d’idées mais que cela avait des limites si les divergences n’étaient pas surmontées ou surmontables. Ici la situation créée par la guerre de Poutine en Ukraine cristallise les problèmes du moment, même si elle ne constitue qu’une partie des questions brûlantes et immédiates de notre temps (changement climatique et menace d’effondrement de toute la biosphère, pandémie, famine, crise économique…).
La conférence a abouti à la mise en place d’un comité exploratoire des possibilités de collaboration et de rapprochement entre le WIN et IS.
OD, le 13-09-2023.
Documentation :
Retrouvez toutes nos publications antérieures se rapportant au WIN en visitant la catégorie WIN de notre site aplusoc
Notes :
* la barrière linguistique, le problème de la circulation des idées et des débats par delà les limites des aires culturelles de chaque fraction internationale issue de la longue et tortueuse histoire du mouvement trotskyste depuis 1938, constitue une question pratique et politique que le mouvement ouvrier et révolutionnaire doit prendre à bras le corps.
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