Alors que la campagne de vaccination contre la COVID-19 bat son plein au Québec, le Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ) s’interroge sur une autre campagne contre laquelle il croyait le gouvernement de François Legault immunisé : celle des nominations politiques.
En 2017, l’opposition caquiste avait fait grand bruit en dévoilant une liste de quelque 80 nominations de personnes affiliées au Parti libéral effectuées par le gouvernement de Philippe Couillard depuis 2014. Elle vilipendait alors le processus de nomination en réclamant plus de transparence et de contrôle parlementaire.
Maintenant au pouvoir, la CAQ semble avoir troqué son attitude chevaleresque contre le même virus qui gangrenait alors le gouvernement Couillard. Coup sur coup, à deux semaines d’intervalle, elle favorise la nomination de Marie Grégoire comme présidente-directrice générale de Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ) et celle de Maka Kotto pour un poste de directeur général du Conservatoire de musique et d’art dramatique du Québec (CMADQ).
En démocratie, le gouvernement jouit d’une certaine prérogative pour procéder à des nominations qui récompensent, notamment, d’anciens députés, du personnel de cabinet ou des donateurs du parti. Si l’expertise de ces personnes faisait consensus auprès des administratrices et administrateurs des entités concernées, et aussi auprès des expertes et des experts de ces milieux, probablement que l’on ne trouverait pas grand-chose à redire.
Toutefois, et c’est là où le bât blesse, Mme Grégoire et M. Kotto ne font pas l’unanimité dans le sillage de BAnQ et du CMADQ. Leur parcours professionnel est certes plus qu’intéressant et enviable, mais cela ne fait pas d’eux les personnes les plus expérimentées pour présider et diriger deux des plus importantes institutions culturelles d’État du Québec. Ce pour quoi leur manque d’expérience pour occuper ces fonctions est lourdement décrié.
Que Mme Grégoire et M. Kotto présentent leur candidature pour piloter ces fleurons culturels n’est pas le nœud du problème. Il s’agit de personnes de talent dont le Québec aurait tort de se priver. Ce qui agace, c’est le parfum de favoritisme qui embaume le processus de nomination. Les avis des conseils d’administration (CA) de BAnQ et du CMADQ semblent destinés à demeurer en bordure du chemin, tandis que des pressions s’exercent sur eux pour favoriser d’autres candidatures.
En février, le SPGQ s’était montré stupéfié par les dangers et l’arbitraire en dotation que pouvait induire le projet de loi no 60 modifiant la Loi sur la fonction publique et d’autres dispositions. Il dénonçait, notamment, la porte ouverte à des candidatures dépourvues d’expertise adéquate pour occuper des postes requérant des qualifications pointues. Être une personne professionnelle travaillant pour l’État nécessite ces qualifications.
Certes, les nominations aux postes de présidente-directrice générale à BAnQ et de directeur général au CMADQ ne relèvent pas de ce projet de loi adopté en avril dernier. Toutefois, le constat demeure le même. Les CA des deux organismes ont fait un travail méticuleux et proposé des candidatures exceptionnelles. Pourquoi le gouvernement intervient-il ?
Assistons-nous à l’éclosion d’un variant où l’expertise et les qualifications ne sont plus des prérequis pour présider ou diriger nos organismes d’État, où l’on se moque du travail de leurs CA pour dénicher les perles rares ? Quoi qu’il en soit, vivement un vaccin pour s’en prémunir !
Line Lamarre
Présidente du SPGQ
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