Tiré de https://www.survivalinternational.fr/actu/13928
18 Avril 2024
Photo :Dans le parc national de Kahuzi-Biega, site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, des gardes et des soldats brûlent les maisons des Batwa afin de chasser ce peuple autochtone du parc, sa terre ancestrale. © KBNP
Des enquêtes de terrain réalisées par des chercheurs et chercheuses de Survival dans des communautés autochtones en Afrique et Asie ont permis de mettre au jour des cas répétés de torture, de viols et de meurtres à l’intérieur et autour de sites classés au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Le rapport mentionne six sites classés au patrimoine mondial occupant des terres volées à des peuples autochtones, incluant les trois exemples suivants.
Zone de conservation de Ngorongoro, Tanzanie
Dans cette célèbre destination touristique, on assiste aujourd’hui à des opérations de “sécurité” destinées à intimider les communautés autochtones et à la suspension des services de base, le gouvernement tanzanien mettant en œuvre son projet d’expulser des milliers de Massaï des terres sur lesquelles ils vivent depuis des générations. L’UNESCO a explicitement soutenu ces expulsions. Un leader massaï ayant témoigné auprès de Survival a déclaré : “Le soutien de l’UNESCO sert à nous expulser. Nous vivons dans la maladie et l’incertitude.”
Parc national de Kahuzi-Biega, République démocratique du Congo
Ce parc national a été ajouté à la liste des sites classés au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1980. En 2019, les autorités du parc, avec le soutien de l’armée congolaise, ont lancé une campagne visant à expulser de la forêt tous les Batwa qui étaient revenus sur leurs terres ancestrales l’année précédente. Elles ont mené des attaques extrêmement violentes contre des villages batwa et perpétré de nombreuses atrocités amplement documentées. L’UNESCO a encouragé une approche basée sur la force et la militarisation, et a pressé le gouvernement congolais d’“augmenter l’étendue et la fréquence des patrouilles” et d’“évacuer les occupants illégaux”. Les Batwa ont énormément souffert de ces attaques, mais ont déclaré : “Nous vivons dans la forêt. Lorsqu’ils nous voient, ils nous violent. Ceux d’entre nous qui mourront mourront, mais nous resterons dans la forêt.”
Parc national d’Odzala-Kokoua, République du Congo
Ce parc a été ajouté à la liste des sites classés au patrimoine mondial de l’UNESCO en 2023, en dépit des violations des droits humains, largement documentées, qui y ont été commises, incluant notamment des cas de viols et de torture. Un homme baka ayant été expulsé de la forêt a déclaré à Survival : “Nous avons besoin de la forêt. Nos enfants ne connaissent plus les animaux ni les plantes médicinales traditionnelles. Aujourd’hui, les Baka vivent sur le bitume.”
Deux hommes baka issus d’une communauté expulsée pour laisser place au parc national d’Odzala-Kokoua.
Le parc a été ajouté à la liste des sites classés au patrimoine mondial de l’UNESCO en 2023. © Fiore Longo/Survival
Survival demande à l’UNESCO de :
– cesser de soutenir les violations des droits humains des peuples autochtones commises au nom de la conservation ;
– supprimer de sa liste des sites classés au patrimoine mondial tout territoire sur lequel sont perpétrés des atrocités et des abus à l’encontre de peuples autochtones et autres communautés locales ;
– promouvoir un modèle de conservation basé sur la pleine reconnaissance des droits des peuples autochtones.
Survival lance une journée d’activisme en ligne pour marquer la publication du rapport ; nous invitons le public à
partager une nouvelle vidéo et à utiliser le hashtag #DecolonizeUNESCO. La vidéo sera disponible sur la page Instagramde Survival.
La directrice de Survival au Royaume-Uni, Caroline Pearce, a déclaré aujourd’hui : “L’UNESCO a joué un rôle clé dans la légitimation d’un grand nombre d’Aires protégées parmi les plus célèbres en Afrique et en Asie, et a largement ignoré les atrocités, pourtant bien attestées, commises sous sa supervision. Ce que l’organisation appelle “sites classés au patrimoine naturel” sont très souvent les terres ancestrales de peuples autochtones leur ayant été volées. Ces peuples y sont aujourd’hui interdits d’accès et subissent des campagnes d’intimidation et de terreur. La complicité de l’UNESCO va au-delà du silence : elle soutient activement des gouvernements et des actions qui violent les droits des peuples autochtones. Elle doit retirer le statut de site classé au patrimoine mondial à tout territoire où de telles exactions se produisent.”
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