Ensuite, s’interroger. Pourquoi des victimes sont plus « importantes » que d’autres ? Pourquoi parle-t-on davantage de Paris plutôt que de Beyrouth ? En octobre dernier, donc en un seul mois, 714 Iraquiens sont morts dans des attentats. Pour plusieurs médias occidentaux, cette situation est « normale ». Pourquoi ?
Plusieurs questions demeurent sans réponse : pourquoi la France se dit-elle en état de guerre puisqu’elle est déjà aux premières lignes du conflit depuis plusieurs mois ? Qui seront les prochaines cibles des bombardements de la « coalition » menée par les États-Unis ? L’intelligentsia occidentale et son commandement pourront-ils reconnaitre que certains choix stratégiques n’ont fait qu’exacerber les animosités et suscité un grand nombre de menaces ?
Autre angle mort, qui définit qui est terroriste et qui ne l’est pas ? Pourquoi ne pas parler du rôle de la « Ligue mondiale des musulmans », établie en Arabie saoudite depuis les années 1960, et qui finance la destruction des mouvements nationalismes et de gauche dans le monde arabe ? Pourquoi occulter le rôle des États-Unis dans la montée des Moudjahidines en Afghanistan dont ont « hérité » les Talibans et Al-Qaida ? Qui va se souvenir du bombardement américain sur la Libye en 2011, qui a fait plusieurs dizaines de morts, tous des civils ? Qui a payé et qui continue de payer pour les « volontaires » étranges qui affluent vers Daech ? Pourquoi laisse-t-on la Turquie, un État membre de l’OTAN, attaquer les Kurdes qui combattent pourtant les extrémistes ?
Autre question sans réponse : pourquoi oblige-t-on des pays pauvres de se ruiner en les forçant à payer des dettes odieuses, comme ce qu’on a fait avec le Mali dans les années 1990 ? Le président de l’époque, Alpha Omar Konaré, voulait renégocier cette dette, mais on l’a envoyé promener. Konaré quitta ses fonctions. Le pays implosa. Al-Qaeda s’empara de Tombouctou, la deuxième ville malienne en importance. Par la suite, l’armée française est intervenue. On sait maintenant ce que tout cela a donné : un pays fragilisé, plein de désespérés…
Peut-on faire autrement ? Oui c’est vrai, il n’y a pas de solution miracle. Mais est-ce impensable de renvoyer les pétromonarchies du Golfe dans leurs cages dorées ou au moins les empêcher de lubrifier les réseaux de l’extrémisme tout en distillant un discours haineux ?
Beaucoup de questions peu de réponses.