« La colonisation doit soit prendre fin, soit aller de l’avant, sans tenir compte de la population locale. Ce qui signifie qu’elle ne peut progresser et prendre de l’ampleur que sous la protection d’une puissance qui ne dépend pas de la population locale, à l’abri d’un mur de fer que la population locale ne peut franchir… » -Vladimir Jobotinsky, Père de la droite sioniste, novembre 1923
« La puissance occupante ne pourra procéder à la déportation ou au transfert d’une partie de sa propre population civile dans le territoire occupé par elle. » -4e Convention de Genève 1949.
C’est avec ces deux citations lourdes de sens que débute le documentaire Le Mur de Fer présenté à Montréal au cinéma du Parc le jeudi 15 janvier 2009.(Diffusion organisée par PAJU-Palestinien et Juifs Uni) Ce documentaire produit en 2006 nous dépeint un portrait alarmant de la situation israélo-palestinienne des dernières décennies.
Le Mur de fer nous rappelle la violence structurelle et permanente d’Israël vis-à-vis de la Palestine et la constance avec laquelle Israël s’est approprié toujours de plus en plus de territoires palestiniens au détriment des droits les plus fondamentaux de la population locale. La politique de colonisation d’Israël qui dure depuis des décennies et qui est pour ainsi dire passée sous silence par la communauté internationale et les médias occidentaux est une menace directe et préméditée à la création éventuelle d’un État palestinien viable et autonome. Les politiques de colonisation sont à la base même du conflit et plonge le territoire dans un État d’apartheid où la ségrégation raciale est chose quotidienne, nous y reviendrons. Vous seront présentés dans le présent article les principaux points soulevés par ce documentaire.
La création en 1974 du parti de croyants fondamentalistes sionistes qui prétendent que dieu leur ordonne d’étendre les frontières d’Israël de la Jordanie à la mer, est à l’origine de la montée fulgurante et de la rigidité incroyable d’Israël vis-à-vis de sa politique de colonisation.
Le but fondamental de la politique de colonisation d’Israël qui connut une expansion impressionnante suite à la nomination d’Ariel Sharon comme ministre de l’Agriculture en 1977 est de créer des faits indiscutables et concrets sur le sol qui démontrent que le territoire est territoire d’Israël.
L’accord d’Oslo signé 1993 qui est une déclaration de principes incluant l’arrêt de l’expansion coloniale d’Israël n’a pas eu pas l’effet escompté. Il n’y eu aucun démantèlement de colonies. Ironiquement même, après la signature de l’accord d’Oslo, Israël prend un tournant radical qui amène l’augmentation de la taille et de la population des colonies. Au cours des 7 années suivant l’accord d’Oslo le nombre de colons en terre arabes augmente de 90%.
Les politiques de colonisation d’Israël sont un frein au processus de paix et visent à assurer une présence irréversible d’Israël en territoire palestinien. Les colonies sont un prolongement permanent des grandes villes israéliennes, comme des banlieues, ou des cités-dortoirs. Elles sont construites rapidement et avec une telle brutalité qu’il est difficile de même le concevoir. Les maisons, les villages, les fermes de Palestiniens sont détruits brutalement et les populations expulsées pour que se construisent ces banlieues ultras modernes et occidentales, exclusives aux populations juives. Les images des colonies et des villages palestiniens avoisinants présentés dans le documentaire démontrent l’ampleur des inégalités quant aux conditions de vie de ces deux peuples voisins. Des infrastructures, des routes sont construites entre les colonies et ne peuvent être empruntées que par les Juifs à moins d’autorisations spéciales extrêmement difficiles à obtenir, retirant ainsi au peuple palestinien l’un de leur droit les plus fondamentaux, la liberté de mouvement. Pire l’accès aux ressources de base est contrôlé et les ressources en terre palestinienne sont pillées sans égards. Les colonies n’ayant pas la plupart du temps de système d’égout adéquat, les eaux usées des colonies sont déversées sur les terres agricoles de la Palestine causant des dégâts écologiques et sanitaires sans précédent. L’accès à l’eau potable est également un enjeu. Malgré le fait que les deux peuples utilisent les mêmes sources et les mêmes infrastructures, les Palestiniens paient leur eau quatre fois plus cher alors qu’il en consomme cinq fois moins.
Ces mesures rappelant bizarrement la ségrégation américaine ou l’apartheid d’Afrique du Sud, semblent néanmoins passées sous silence dans la communauté internationale. On préfère semble-t-il se soucier de la sécurité d’Israël.
« Le peuple d’Israël constitue l’essence même du sionisme, sans la colonisation nous ne pourrons atteindre les objectifs du sionisme, c’est aussi simple que cela ».
En fait, il n’y a pas suffisamment de colons idéologiques pour que la colonisation ne s’effectue que par eux. Les Israéliens ne se bousculaient pas pour habiter les colonies. Ariel Sharon divisa donc la colonisation de sa dimension idéologique et politique. Les colons sont recrutés, les maisons y sont moins chères, des primes et des incitatifs financiers leur sont offerts pour migrer vers les colonies et ainsi peupler et s’accaparer des territoires arabes. En 2006, il y avait près d’un demi-million de colons juifs en terre palestinienne dont seulement 20% y était pour des raisons idéologiques. Les autres ont migré pour des raisons purement économiques participant ainsi innocemment au processus de pillage des terres palestiniennes.
Bien entendu, les grandes puissances de ce monde nous parlent de la sécurité d’Israël, de son droit à l’autodéfense, de la nécessité du mur entre la Palestine et Israël, contre les roquettes et les attentats-suicides. Et bien, l’établissement de 200 colonies ne peut être justifié par la sécurité, pas plus que la destruction de maisons, l’expropriation ou l’établissement d’un mur qui incorporent purement et simplement des territoires palestiniens au territoire israélien faisant ainsi ressembler la carte à un fromage gruyère, où certaines parties sont littéralement inaccessibles derrière un mur alors que d’autres sont contrôlées et interdites d’accès aux populations locales.
Si le mur avait vraiment été érigé par simple souci de sécurité, comment expliquer alors que la frontière entre Israël et la Palestine est d’environ 350 km alors que le mur lui s’étend sur 670 km. C’est simplement parce que ce fameux mur de "protection" zigzague en territoires palestiniens pour incorporer les colonies. Ayant pour résultat non seulement le vol des territoires palestiniens, mais aussi la séparation des populations locales entre elles.
Ce documentaire est donc fondamentalement une dénonciation féroce du processus colonial d’Israël et permet de saisir avec une grande exactitude les enjeux liés à la colonisation et au mur de fer. Il met en perspective d’une manière éloquente les injustices qu’entraine ce processus de colonisation tant sur le plan territorial qu’économique. Les images percutantes permettent non seulement de mieux saisir la réalité des deux parties en présence, mais également de réaliser à quel point nous sommes peu informés par les médias occidentaux de la réalité des choses. Ce documentaire permet donc un nouveau regard sur la situation qui ne nous est presque jamais présentée ni dépeinte dans les médias.
Vous pouvez trouver l’intégrale du Mur de Fer en version anglaise "Iron Wall" dans la section vidéo de Google. Il est également possible de se le procurer sur le site Iron Wall. http://www.theironwall.ps/ Un film à voir et à revoir !
Bon visionnement.