J’ai retranscrit ci-dessous un extrait d’un discours du premier ministre hongrois que je vais analyser avec vous afin de bien comprendre ce que ce magistrat ne comprend pas.
Pourquoi tous les pays européens n’appliquent-ils pas la recette du premier ministre de Hongrie ? Et pourquoi ce premier ministre hongrois ne réussira-t-il pas à appliquer sa propre recette d’un capitalisme « productif » pour sauver son pays du chaos économique spéculatif et du capitalisme « spéculatif » ? Ce sont ses propres expressions. Serait-ce que les gens sont trop imbéciles, trop avides, trop aveugles pour cesser de faire ce qui les mènes directement à la catastrophe économique ? Non, l’intelligence étant statistiquement équitablement distribuée de par le monde, la Hongrie n’en possède ni plus ni moins que sa part. L’explication de cette contradiction est ailleurs.
Premier constat : Le premier ministre de Hongrie a raison de souligner que le capitalisme spéculatif engendre la production « d’argent » inflationniste (monnaie, valeur de l’or, valeurs comptables et valeur boursière). Le premier ministre hongrois identifie ci-dessous que les valeurs comptables dépassent de vingt fois la valeur des marchandises et des valeurs réelles disponibles sur le marché mondial. Pour simplifier et pour le dire différemment – la demande – disposerait de vingt fois trop d’argent sur le marché mondial par rapport à – l’offre – c’est-à-dire aux biens et aux marchandises disponibles conséquence directe de la spéculation inflationniste.
Deuxième constat : Prenez note qu’au même moment deux tiers (2/3) de l’humanité ne dispose pas d’assez d’argent pour s’acheter de quoi manger, boire, se loger et s’habiller convenablement. Des millions de gens de par le monde vivent avec moins de 2 $ par jour alors qu’il y a vingt fois trop d’argent en circulation ! Étonnant non ? Comment expliquer cette distorsion des lois du marché libre et concurrentiel ? C’est que le marché capitaliste n’est pas libre et concurrentiel.
Troisième constat : Il est vrai qu’a une certaine époque le capitalisme « productif » (au cours des années cinquante et soixante du précédent millénaire notamment) engendrait moins de chômage et les différentes sociétés développées mettaient alors sur pied des services publics pour tous. L’économie était alors en expansion, mais tout de même soumise à des crises cycliques.
Alors pourquoi abandonner cette recette gagnante et se lancer dans la spéculation stérile et destructrice qui n’engendre que l’accumulation de montagne de frics de pacotille sans réelle valeur sur le marché ? (1 ) Pourquoi vingt fois trop de capital par rapport à la valeur des richesses produites disponibles ? En fait, pourquoi le capitalisme spéculatif ?
C’est que les lois du capitalisme sont des forces réelles et inéluctables qui ne dépendent pas du bon vouloir d’un banquier, d’un spéculateur, d’un premier ministre, d’un président, d’un « juif » sioniste ou d’un arabe milliardaire du pétrole, d’un méchant capitaliste ou de la volonté de Bill Gates ou de Warran Buffet. Ce sont de vrais lois sociales et macros économiques, de vrais forces, comme la loi de la gravité en physique, ou encore les lois de l’érosion géomorphologique.
Les lois qui régissent l’économie capitaliste ne sont pas :
a) la loi de la concurrence parfaite – la main invisible – surtout pas en société capitaliste monopoliste ou :
b) la loi de l’offre et de la demande – puisqu’il y a vingt fois plus d’offre de capital que de demande. Ces lois économiques inéluctables sont : i) la loi de la course au profit maximum ; ii) la loi de la baisse tendancielle des taux de profits ; iii) la loi de la paupérisation de la majorité et de l’accumulation d’immense richesse dans les mains d’une minorité de plus en plus restreinte et riche, minorité qui possède le capital et les moyens de production alors que l’immense majorité ne possède que sa force de travail pour survivre.
Qui fait fi de ces lois, qui ne les appliques pas et qui ne s’y soumet pas est balayé de la scène de l’histoire par le système économique, ça s’appelle un dépôt de bilan ou encore une faillite.
Le capitalisme spéculatif naît inexorablement du développement du capitalisme productif. À titre d’exemple, la Chine qui actuellement développe un capitalisme productif évoluera vers un capitalisme spéculatif (la tonte des coupons), elle se heurtera alors à la première puissance spéculative mondiale, celle qui émet ce trop plein d’argent – de dollars – ce qui lui permet de parasiter sur cette spéculation boursière mondiale, de se maintenir comme première puissance consommatrice de biens alors que c’est la société la plus endettée du monde.
La Hongrie n’est pas à même de renverser ces lois systémiques inéluctables pas plus que la Chine ou les États-Unis ne peuvent les faire. Voilà pourquoi l’impérialisme c’est la guerre, au sud Liban, en Palestine occupée, au Soudan, en Afghanistan, en Irak, en Birmanie, en Tchétchénie, au Pakistan, au Cachemire, au Népal, en Colombie, au Congo, au Yémen, en Somalie, etc. etc.
ANNEXE
Citation du premier ministre hongrois.
« Le processus le plus important que nous devions prendre en compte est que l’économie mondiale se dirige dans une nouvelle direction. Il semble que le capitalisme productif a un nouvel avenir et que l’époque du capitalisme spéculatif touche à sa fin. Nous savons tous que la raison principale de la crise économique qui étrangle le monde consiste en la chose suivante : une surévaluation régit le marché mondial. L’argent disponible dans le commerce mondial outrepasse plus de vingt fois le montant des valeurs réelles. Il s’en suit que toutes les valeurs réelles dans les livres de compte et les bilans sont surévaluées. Des bulles se forment, entraînant l’économie dans des crises successives. Hélas, ces crises ne s’arrêtent pas à la frontière hongroise. »
« Mesdames et Messieurs, la Hongrie ne peut réussir dans ce monde moderne en transformation rapide, qu’à condition de nous tourner vers le capitalisme productif et d’utiliser à notre avantage le processus global. Je veux dire par là que nous devons de manière croissante, et avec grande détermination, refouler la spéculation et nous orienter vers le capitalisme productif. Pour bien me faire comprendre, je n’ai pas besoin d’aller dans les détails : le capitalisme productif est lié au travail alors que le capitalisme spéculatif est lié à la spéculation. »
« Mesdames et Messieurs, le point clé est que nous pouvons opérer une telle différenciation. Je propose que lors de la mise en place de ce nouveau système économique, nous désignions comme spéculatives toutes les activités par lesquelles quelqu’un gagne de l’argent en nuisant à autrui. Et lorsque quelqu’un gagne de l’argent en créant une réelle valeur qui profite aux autres et à la société toute entière, alors cela peut être défini comme du travail. »
« Mesdames et Messieurs, je suis convaincu que ce n’est qu’avec ce type de capitalisme productif que nous pourrons créer dans les dix prochaines années 1 million de nouveaux emplois en Hongrie. »
(1) La valeur d’un bien ou d’un service correspondant à la quantité de travail nécessaire à sa production sociale, l’argent disponible devrait donc équivaloir à cette valeur, ce qui n’est pas du tout le cas sous le capitalisme spéculatif, ou si vous préférez sous l’impérialisme stade suprême du capitalisme.