Du 20 au 22 septembre 2010 se déroule à New-York, au siège des Nations unies, le Sommet mondial sur les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) dont le but annoncé est de "permettre une accélération des progrès en vue de la réalisation des OMD ". Car à seulement 5 ans de l’échéance, le tableau dressé par le dernier rapport de l’ONU de juin 2010 est pour le moins sombre. A ce stade, seul un OMD sur huit (" réduire de moitié, de 1990 à 2015, la proportion de la population dont le revenu est inférieur à 1 dollar par jour ") pourrait être atteint grâce à la Chine et l’Inde.
Certes, la crise économique mondiale est passée par là. Mais elle ne peut expliquer toute seule cette situation inacceptable où la majorité des êtres humains de la planète, très majoritairement basée au Sud, est privée de ses droits fondamentaux tels que le droit à l’eau ou à l’éducation, et plus généralement dépossédée de son droit à la vie. En effet, les " émeutes de la faim " et la crise environnementale existaient avant l’éclatement de la crise mondiale, dont l’entière responsabilité repose sur les pays riches du Nord.
Pour le réseau CADTM, les OMD étaient dès le départ voués à l’échec car ils ne sont pas contraignants pour les États, contrairement aux politiques dictées par le FMI et la Banque mondiale, dont l’application docile par les gouvernements du Sud conditionne les allègements de dettes et les nouveaux prêts. Or, ces deux Institutions financières internationales, contrôlées par les pays occidentaux du fait notamment de la répartition des droits de vote, sont utilisées comme « cheval de Troie » pour imposer les politiques néo-libérales servant en priorité les intérêts de leurs entreprises transnationales.
Plus fondamentalement, l’échec des OMD est intrinsèquement lié à la nature du système actuel : le capitalisme, incapable de satisfaire les besoins des peuples. Comment expliquer qu’en dépit de l’augmentation exponentielle des richesses mondiale, l’extrême pauvreté a doublé en Afrique subsaharienne entre 1981 et 2005 ? Cette question nous renvoie directement aux racines même du système actuel qui ne vise ni la réduction des inégalités ni le développement. Soulignons que l’éradication de la pauvreté est possible mais qu’elle ne peut qu’être le résultat d’un processus de développement réussi reposant sur une juste répartition des richesses.
Pour le réseau CADTM, un changement radical est donc nécessaire pour, d’une part, permettre aux États du Sud et du Nord de respecter leurs engagements de protection des droits humains tels que le Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) de 1966 (ratifié par 159 États) et, d’autre part, garantir le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes consacré par plusieurs textes internationaux dont la Déclaration de l’ONU sur le droit au développement de 1986. Ce changement passe inévitablement par l’annulation totale et sans conditions de la dette publique extérieure des pays en développement. La situation est d’autant plus urgente qu’une nouvelle crise de la dette du Sud est en préparation, comme conséquence de la crise économique mondiale. Le service annuel de la dette risque, par conséquent, d’accaparer une part encore plus importante des maigres budgets des pays du Sud, au détriment des dépenses publiques vitales pour le développement humain sur place.
En attendant une initiative internationale pour l’annulation totale et inconditionnelle de cette dette, les États doivent impérativement prendre des mesures de manière unilatérale. Ces mesures peuvent, en outre, s’inscrire dans le cadre du huitième OMD " Mettre en place un partenariat mondial pour le développement « qui prévoit de » Traiter globalement le problème de la dette des pays en développement par des mesures d’ordre national et international propres à rendre leur endettement viable à long terme ".
Les pays du Nord doivent donc au minimum :
– suspendre immédiatement le remboursement de la dette du Sud (avec gel des intérêts)
– auditer cette dette pour annuler la part illégitime (celle qui n’a pas profité aux populations) sans inscrire, comme l’a fait le Norvège en 2006, les montants annulés dans l’aide publique au développement (APD) pour la gonfler artificiellement. Soulignons que, malgré cette pratique, les pays de l’OCDE n’ont consacré en 2009 que 97,5 milliards d’euros à l’APD, soit 0,31 % de leur revenu national cumulé, bien loin des 0,7% promis depuis des années. Les flux financiers qui partent du Sud vers le Nord sont largement supérieurs à l’ « aide » des pays riches !
– verser des réparations pour la dette historique, écologique et culturelle qu’ils ont à l’égard du Sud
Ces mesures indispensables mais non suffisantes, fondées sur la justice et non sur une quelconque générosité du Nord, impliquent pour les pays du Nord de s’attaquer à leur propre dette publique en en suspendant immédiatement le remboursement pour donner la priorité à la coopération internationale et aux dépenses publiques dans les secteurs sociaux à l’échelle nationale.