Déjà en 2004, un rapport tirait la sonnette d’alarme constatant « une augmentation quasi constante des concentrations d’arsenic dans l’air ambiant depuis les dix dernières années, celles-ci atteignant en 2000 une moyenne annuelle de 1 041 ng/m3 comparativement à une moyenne de 164 ng/m3 observée en 1991. À titre de comparaison, les concentrations moyennes observées dans les villes québécoises se situent plutôt aux environs de 1 à 2 ng/m3. » La DSPu émettait les recommandations suivantes : « le groupe de travail propose donc aux autorités d’exiger à Minéraux Noranda de diminuer ses émissions de sorte que la concentration moyenne d’arsenic dans le quartier Notre-Dame soit ramenée sous une valeur moyenne de 10 ng/m3 (0,01 microgramme / m3). De plus, Minéraux Noranda devra s’engager à présenter rapidement au MENV (d’ici deux mois) un plan d’intervention identifiant l’échéancier et les interventions qui devront être réalisées pour atteindre un objectif de 3 ng/m3 dans le quartier Notre-Dame. » Des traces importantes de cadmium et de plomb avait aussi été relevées lors des mêmes études. Quinze ans plus tard, le problème demeure.
Au coeur du problème se trouve la Fonderie Horne, une entreprise presque centenaire qui arrive en tête pour le nombre d’avis de non-conformité à la loi sur la protection de l’environnement émis en Abitibi-Témiscamingue en 2018. Dans son bulletin annuel 2018 abordant les questions de « santé-sécurité, d’environnement et d’actions durables envers la communauté de Rouyn-Noranda », la compagnie prétends avoir investit des sommes considérables afin de « répondre aux plus grandes exigences au niveau du développement durable. » Pourtant, la réalité démontre que la compagnie n’est pas à la hauteur du défi que constitue le respect élémentaire de la santé de la population. Étrangement, à nul part la question des rejets de l’usine dans l’air n’est abordé dans ce rapport.
« L’automne dernier, la Direction publique ici en Abitibi-Témiscamingue a décidé de procéder à une analyse de l’exposition aux contaminants chez les enfants du quartier Notre-Dame [...] On voulait vraiment voir c’est quoi l’intoxication au plomb, au cadmium, mais aussi à l’arsenic chez les enfants et là on a procédé à des analyses de leurs ongles pour voir l’imprégnation qu’ils avaient à l’arsenic et on s’est rendu compte au printemps dernier, quand les résultats sont sortis, que les enfants de Rouyn-Noranda, du quartier Notre-Dame, avaient des concentrations d’arsenic quatre fois plus élevées, en moyenne, que les enfants-témoins du groupe d’Amos », a expliqué Émilie Lessard-Therrien lors de l’entrevue mentionnée plus haut.
La Direction de la santé publique de l’Abitibi-Témiscamingue a récemment publié un rapport qui visait à « mieux caractériser l’exposition à l’arsenic des résidents du quartier Notre-Dame » sur le sujet. En marge de la conférence de presse de dévoilement du rapport, son auteur, Frédéric Bilodeau, a expliqué que la présence de plusieurs contaminants créerait un effet synergique. « Le danger est juste plus élevé lorsqu’ils sont ensemble. Le problème aussi avec les normes c’est qu’elles sont fixées pour les contaminants individuellement. C’est sûr que face à un cocktail de contaminants, il faut être encore plus vigilant », précise-t-il.
Dans le communiqué de presse accompagnant le dévoilement de l’étude, il est mentionné que « les résultats d’arsenic mesurés dans les ongles des participants indiquent une concentration en moyenne 3,7 fois plus élevée que celle de la population témoin. Ces résultats préoccupent la DSPu parce que l’arsenic est un cancérigène reconnu. »
La DSPu recommande des mesures qui constitue une adaptation au problème mais ne va pas à la racine de la pollution : la Fonderie Horne. En effet, cette entreprise constitue l’origine de cette pollution. En effet, suite à une entente avec le ministère de l’environnement du Québec, la Fonderie peut émettre jusqu’à 67 fois la norme québécoise. Le ministre Charette n’a pas l’intention de rouvrir cette entente tant que la Direction de la santé publique n’aura pas prouvé qu’il y a des risques pour la santé. Nous ignorons ce que ça prends au ministre mais il est de toute évidence complice de cette situation. Ls fonderie « émet en moyenne 98 nanogrammes d’arsenic par mètre cube. Elle entend aussi investir 35 millions de dollars supplémentaires d’ici 2021. » Ce que le ministre ne dit pas, c’est que cette norme « acceptable » dépasse de près de 33 fois la norme québecoise.
Questionné sur le moment de l’atteinte de la norme provinciale d’émissions d’arsenic de 3 nanogrammes par mètre cube à la Fonderie Horne, le ministre a répondu « C’est une norme « qui n’est pas atteignable » pour une entreprise établie depuis aussi longtemps, soutient le ministre Benoit Charette. » Le ministre donne une petite tape sur les doigt à l’entreprise en exigeant des celle-ci qu’elle présente, dans les 60 jours, un plan de réduction des émissions sans préciser de cibles ni de normes à respecter. Ce qui fait dire à Valérie Fournier, co-porte-parole du comité Arrêt des rejets et émissions toxiques (ARET) « tant qu’il n’y aura pas de seuil, c’est l’entreprise qui va gérer sa propre baisse, car elle n’aura pas de contraintes. » De là à dire que le ministre est complice de l’entreprise et qu’il fait partie du problème… Ce qui fait dire à la députée solidaire de Rouyn-Noranda-Temiscamingue que « la CAQ s’achète du temps plutôt qu’agir. »
Au-delà des manœuvres, la CAQ, derrière ses discours fumeux sur son attachement au peuple du Québec, cache sa complicité avec les entreprises et les capitalistes et un jemenfoutisme quant aux conséquences pour les classes populaires. Ça en dit beaucoup sur l’absence de limites lorsque vient le temps pour ces laquais de se coucher devant les impératifs de profits du capital. Plus que jamais, il faut répondre que « nos vies valent plus que leurs profits » et appuyer les mobilisations de la population de Rouyn-Noranda.
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