Montréal, le 13 décembre 2008.
Dans le système actuel, il faut une motivation à toute épreuve pour se déplacer le jour du scrutin lorsqu’on sait que son vote compte
uniquement s’il va à la personne qui remporte le siège de la circonscription. Cette motivation a manifestement manqué à 2 448 612 personnes (42.67% des 5,7 millions d’électrices et électeurs inscrits), ce qui correspond à 730 477 abstentionnistes de plus qu’en 2007.
La baisse du taux de participation ne peut être dissociée des effets
néfastes du système en place. Ainsi, le 8 décembre 2008, seulement 1 690 226 personnes ont eu la représentation demandée, en votant pour les gagnantes et les gagnants de leur circonscription, alors que les votes de 1 549 915 personnes ont été ignorés.
Le nombre de votes « gagnants » étant resté à peu près le même
qu’en 2007, la différence se voit plutôt du côté des votes « perdants », qui eux ont diminué de 701 425 votes. Le mode de scrutin majoritaire étant toujours le même, cette baisse ne signifie pas que le système soit devenu équitable,mais plutôt que la certitude de perdre son vote aura
eu raison de ce qu’il restait de motivation civique.
Quant à la répartition des sièges entre les partis, les résultats démontrent à nouveau que le mode de scrutin majoritaire produit une
sur représentation des partis établis au détriment des plus petits
partis. Ainsi, le Parti libéral du Québec et le Parti québécois ont remporté plus de sièges que le pourcentage de voix qu’ils ont obtenu. Le PLQ occupera donc 53% des sièges alors qu’il a récolté 42% des voix. Comme toujours, l’effet contraire affecte les tiers partis. Ainsi, l’Action démocratique du Québec occupera 6% des sièges plutôt que les 16% des voix recueillies et Québec solidaire occupera moins de 1% des sièges malgré que ce dernier ait obtenu près de 4% d’appui. Quant au Parti vert du Québec, ses 70 685 votes ne lui auront donné aucun siège.
Si les 872 personnes qui ont fait la différence dans la circonscription de
Mercier n’étaient pas allées voter, l’Assemblée nationale ne réunirait pas
quatre, mais trois partis politiques.
Démonstration du poids inégal des votes selon les idées politiques qu’ils
expriment, le nombre moyen de votes nécessaires pour obtenir un
siège varie de 20 649 votes, pour le PLQ, à près de 6 fois plus pour QS,
soit 123 061 votes.
Dans 16 circonscriptions sur 125, moins de 1 000 voix ont fait la différence entre remporter ou perdre le siège. Dans 9 de ces
circonscriptions, la majorité a été de moins de 500 voix.
L’examen des résultats par région illustre aussi la répétition des
inégalités et des distorsions. Aucune région n’a obtenu une
représentation conforme à ce que sa population a demandé lors du
vote. Dans la majorité des régions, on assiste à la monopolisation du pouvoir par un parti au mépris d’un vote populaire pourtant diversifié.
Ainsi, les populations de Lanaudière et de la Côte-Nord seront représentées exclusivement par le PQ alors que ce parti y a reçu
respectivement 47% et 55% des voix. La même situation s’applique aux populations de Laval et de l’Outaouais, mais à la faveur du PLQ, même si celui-ci n’a récolté que 49% et 56% voix.
La presque totalité des sièges de la région des Laurentides et du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, seront occupés par le PQ alors que
celui-ci n’y a reçu que 44% et 47% des voix. Le problème se vivra également en Estrie et en Gaspésie-les-Îles-de-la-Madeleine, mais cette fois en faveur du PLQ, qui n’y a pourtant reçu que 43% et 51% des voix. L’île de Montréal n’échappe pas non plus au phénomène puisque le PLQ occupera 71% des sièges avec 53% des voix.
En Montérégie, le PQ a reçu 2 fois plus de sièges que le PLQ malgré que seulement 2.5 points de pourcentage les séparent au niveau des votes
exprimés. Pire encore, dans le Bas-Saint-Laurent, le PQ a obtenu
deux fois plus de sièges que le PLQ malgré que ce dernier ait reçu plus de voix.
Aux élections de 2008, 37 femmes se sont fait élire. S’il était intégré au palmarès établi par l’Union interparlementaire, le Québec, avec
son maigre 29,6%, se classerait au 24e rang. En occupant 70% des sièges, soit 88 sur 125, les hommes profitent d’une sur représentation de 25 sièges.
Nous sommes encore bien loin de l’égalité dans la représentation, et ce,
même si le conseil des ministres est paritaire.
Quant à la diversité ethnoculturelle, elle est encore gravement
sous-représentée à l’Assemblée nationale puisque seulement une
douzaine de personnes, issues de 8 communautés différentes, y siégeront. Alors que le Québec se targue d’accueillir des gens de plus d’une centaine de communautés ethnoculturelles, comment son Assemblée nationale, constituée à 90% de personnes d’une même origine, peut-elle espérer rallier toute la population et présenter une image inclusive de la société ?
« Ces chiffres illustrent tous à leur façon les nombreux défauts
du système actuel, défauts qui se répéteront tant que les partis au pouvoir empêcheront la mise en place d’un nouveau mode de scrutin de type proportionnel » de dire Mercédez Roberge, présidente du MDN.
Pour toutes ces raisons, le MDN considère que la population
québécoise ne dispose pas de l’Assemblée nationale qu’elle réclame, tant au point de vue des valeurs qu’elle porte que par le vote qu’elle a exprimé le 8 décembre2008.
Dans les prochains mois, le MDN donnera des ateliers à travers
le Québec, Il sollicitera de plus des rencontres auprès des membres de l’Assemblée nationale, ainsi qu’auprès de celles et ceux qui n’auront pas eu la chance d y accéder. En compagnie d’électrices et d’électeurs de leur circonscription, nous leur demanderons de poser un geste
ourageux, celui d’ accepter le changement et d’agir au nom des intérêts de la démocratie.