Édition du 18 juin 2024

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Éducation

Des services professionnels insuffisants dans les écoles de Montréal

De nombreux élèves en difficulté sans aide pendant que professionnels et enseignants sont épuisés

Montréal, le 11 mars 2010. – Le manque de services professionnels dans l’ensemble des écoles des commissions scolaires de Montréal, francophones comme anglophones, devient de plus en plus critique alors que des milliers d’élèves ne reçoivent pas l’aide dont ils ont besoin pendant que de nombreux professionnels et enseignants sont littéralement épuisés, étant dépassés par la situation.

Tel est le sombre portrait qui ressort d’une vaste consultation menée en décembre dernier par la Fédération des professionnelles et professionnels de l’éducation du Québec (FPPE-CSQ) auprès de ses membres et dont les résultats pour la région de Montréal ont été rendus publics aujourd’hui par le président de la Fédération, M. Jean Falardeau. Il était accompagné de la présidente du Syndicat des professionnelles et professionnels du milieu de l’éducation de Montréal (SPPMEM), Mme Sophie Massé, de la présidente du Syndicat des professionnelles et professionnels de commissions scolaires de l’ouest de Montréal (SPPOM), Mme Diane Jacques, et de la secrétaire du Conseil exécutif du Syndicat des professionnelles et professionnels des services éducatifs de la région de Montréal (SPPSERM), Mme Linda Schwartz.

Des élèves qui souffrent en silence

Le président de la FPPE-CSQ soutient qu’aucune commission scolaire sur le territoire de Montréal n’échappe au triste constat d’une grave insuffisance des services professionnels.

« D’une commission scolaire à l’autre, on dénonce le manque de professionnels : psychologues, orthophonistes, psychoéducatrices et psychoéducateurs, animatrices et animateurs à la vie spirituelle et à l’engagement communautaire, conseillères et conseillers d’orientation. Celles et ceux qui sont en poste dénoncent le fait qu’ils sont littéralement débordés par les demandes à satisfaire et qu’ils interviennent uniquement auprès des cas les plus urgents, laissant de côté d’autres élèves en difficulté qui souffrent en silence », explique M. Jean Falardeau.

Des écoles embourbées dans un cercle vicieux

M. Falardeau ajoute que, dans certains cas, l’attente est tellement longue avant qu’un élève puisse recevoir de l’aide professionnelle, qu’il arrive que certains passent au secondaire alors qu’ils n’ont toujours pas été rencontrés.

« La situation est alarmante partout. Il suffit de lire les réponses de nos membres à notre consultation pour constater que les histoires d’horreur sont nombreuses et que malheureusement, ce sont les élèves qui en paient le prix. Un prix qui se concrétise par des échecs scolaires multiples et par la tentation, tôt ou tard, de décrocher de l’école. Nos écoles montréalaises, comme celles de partout ailleurs au Québec, sont littéralement embourbées dans un cercle vicieux pour ce qui est de l’aide aux élèves en difficulté. En effet, les professionnels ayant à peine assez de temps pour s’occuper des cas les plus lourds, délaissent les autres. Ces derniers, en principe aux prises avec des problèmes plus légers, finissent également par devenir complexes puisque leurs difficultés s’aggravent avec le temps, augmentant d’autant les cas prioritaires et urgents », relate le président de la FPPE-CSQ.

L’avenir de plusieurs élèves mis en péril

M. Falardeau n’hésite pas à parler de véritables drames qui se vivent dans les écoles.

« Certains élèves doivent attendre plusieurs mois, sinon des années, avant d’être évalués et une fois que cela est fait, il n’y a pas de ressources pour assurer le suivi et les aider. Leurs parents ont la satisfaction de connaître le problème, mais l’insatisfaction de savoir qu’on ne peut le régler. On dit que le ridicule ne tue pas, mais dans ce cas-ci le ridicule est en train de mettre en péril l’avenir de nombreux élèves faute de recevoir les services auxquels ils ont droit », déclare M. Falardeau.

Une situation qui risque de s’aggraver

Pour sa part, la présidente du SPPMEM, Mme Sophie Massé, insiste pour mentionner que ce cafouillis ne pourra pas durer indéfiniment.

« Nous vivons un double drame. Celui des élèves laissés à eux-mêmes, mais également celui des professionnels en surcharge de travail, épuisés et fatigués moralement de constater leur éternelle incapacité de suffire à la tâche malgré tous leurs efforts et leur volonté d’y parvenir. Dans ce contexte, il est évident que si rien n’est fait pour augmenter les ressources professionnelles, plusieurs vont abandonner le réseau public d’éducation avant longtemps, alourdissant d’autant la tâche de celles et ceux qui resteront », prévient Mme Massé.

Un manque de ressources qui contribue au décrochage scolaire

De son côté, la présidente du SPPOM, Mme Diane Jacques, n’a aucun doute que le phénomène inquiétant du décrochage scolaire est directement lié au manque de services professionnels.

« La ministre de l’Éducation et les membres de son gouvernement peuvent bien prétendre vouloir lutter contre le décrochage scolaire, mais aussi longtemps qu’ils demeureront les bras croisés sans réagir au manque de ressources professionnelles dans nos écoles, leurs efforts ne donneront pas les résultats escomptés. Les faits démontrent que les élèves qui ont besoin d’aide professionnelle sont de plus en plus nombreux dans nos écoles, alors que les ressources n’augmentent pas et diminuent même dans certains cas. On fait exactement le contraire de ce qu’il faudrait faire pour aider ces élèves », déplore Mme Jacques.

Une situation semblable à l’éducation aux adultes

Finalement, la secrétaire du Conseil exécutif du SPPSERM, Mme Linda Schwartz, mentionne que ce n’est pas en étant une journée par semaine dans une école qu’un professionnel dispose du temps nécessaire pour accompagner efficacement les élèves en difficulté.

« Les professionnels sont de moins en moins en mesure d’intervenir directement auprès des élèves. De plus en plus, ils sont obligés d’intervenir indirectement en conseillant les enseignants sur les actions à prendre. C’est malheureux, mais ils n’ont pas le choix puisque le temps à leur disposition en regard du grand nombre de besoins ne leur permet pas d’agir autrement. Et la situation est la même à l’éducation aux adultes », conclut Mme Schwartz.

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