Édition du 10 septembre 2024

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Amérique centrale et du sud

Transition énergétique

Plus d’extractivisme en Amérique latine et au Nord qui dicte l’agenda du Sud

« Il n’y aura pas de transition anti-extractiviste si le pillage de l’Amérique latine et de l’Afrique continue », affirme l’auteur. Contrairement à certains responsables universitaires et politiques qui promeuvent ce prétendu drapeau vert, il souligne que la proposition laisse de côté le rôle nécessaire des communautés locales et, en bref, et donne le pouvoir aux entreprises et à des gouvernements sur les territoires et les corps.

5 septembre 2024 | tiré du site rebelion.org
https://rebelion.org/mas-extractivismo-en-america-latina-y-el-norte-marcando-la-agenda-del-sur/

La transition énergétique, telle qu’elle est présentée aujourd’hui, est loin d’être ce qui est compris et recherché par les communautés qui visent la justice sociale et environnementale dans nos territoires, à la fois en Amérique latine comme en Afrique. Dans cet article particulier, je vais me concentrer sur dans cinq aspects que je considère pertinents lorsque je réfléchis à des solutions pour faire face à la crise climatique. Je prévois à cet égard qu’aucune transition ne sera juste si elle approfondit l’extractivisme et, encore moins, si elle propose de nouvelles formes de sacrifices des corps et des territoires.

1- La simplification. La façon de définir la crise climatique et la manière dont sa solution est envisagée et présentée découle d’une première simplification. Pour différents acteurs, la cause de la crise climatique se réduirait à l’émission de gaz à effet de serre serre (GES). Bien sûr, je reconnais le rôle fondamental que jouent ces gaz à effet de serre, et des graves conséquences de leur augmentation dans l’atmosphère, telles que l’augmentation de la température moyenne, l’acidification des mers ou des changements dans le régime des précipitations, entre autres. Cependant, lC’est une simplication d’affirmer que les problèmes environnementaux se réduisent à ce seul facteur. Ainsi, des scénarios de désertification, de pollution, d’incendies, d’augmentation des maladies ou d’expulsion des communautés locales, par exemple, certaines des plus répandues, sont généralement laissées de côté ou contournés. Dans le même temps, des activités associées à une réduction des émissions de GES, causent des dommages irréparables. Par exemple, on favorise l’énergie nucléaire, les centrales hydroélectriques deviennent viables ou l’expansion des plantations forestières est proposée. Dans certains cas, les dommages causés par l’exploitation minière aux niveaux local et régional sont omis. Les conséquences de l’exploitation de l’uranium, de la construction de barrages avec leurs réservoirs et les inondations qu’ils provoquent, ou les monocultures qui détruisent la forêt ne sont pas pris en compte. De cette façon, on ignore les graves conséquences subies par les communautés, aujourd’hui et à l’avenir, par la transformation des territoires, la pollution, pour l’accès à l’eau ou la perte de production locale. Il n’est pas possible de promouvoir une transition juste qui augmente les destructions environnementales.

2- La technocratie. Le deuxième aspect. Cela a à voir avec la nature technique qui est donnée à cette transition. Je parle de la solution proposée par et pour les professionnels, à l’exclusion de tout une autre voix. Encore une fois, avec cela, je ne nie pas l’importance de l’expertise. Mais la transition énergétique, a d’abord un caractère politique et doit inclure la multiplicité des acteurs sociaux et elle ne peut pas être définie et délimitée uniquement par des techniciens. L’objectif démocratique, politique et équitable, c’est de travailler ensemble avec les communautés locales pour la prise de décisions régionales. Cependant, avec certains groupes, toute discussion profonde autour de es questions, diverses et dissonantes avec le discours dominant est empêchée. Qui peut alors discuter de la transition énergétique : L’expert ? L’entraîneur ? L’ingénieur ? L’entreprise ? Le fonctionnaire en service ? Bref, et dans ces démocraties limitées, les décisions sont prises quelque part dans le monde et ne sont jamais liés aux communautés locales et aux besoins régionaux, à leurs caractéristiques, à eurs particularités et à leurs besoins réels. Il n’y aura pas de transition démocratique lorsque les décisions excluent les femmes des communautés vivant dans les territoires.

3- L’électromobilité. Le troisième aspect. Il s’agit de la solution qui présente la transition comme se limitant à l’énergie. D’une manière générale, l’accent est mis principalement sur le l’électromobilité. L’objectif est de remplacer les véhicules qui utilisent de l’essence par d’autres qui utilisent de l’électricité construits avec du lithium, du cuivre et d’autres minéraux entrant dans la production de batteries. Cette substitution individuelle empêche, une fois de plus, de discuter et de problématiser des questions de fond. Par exemple, le fait que la proposition s’adresse directement aux pays à forte consommation d’énergie comme les États-Unis, la Chine, l’Europe et d’une poignée d’autres pays. Les stratégies collectives ne sont pas favorisées et on vise plutôt la consommation privée. De cette façon, les niveaux d’inégalité sociale entre les pays sont encore amplifiés. au sein de ces mêmes sociétés. Cette prétendue solution ne dit rien de la concentration des richesses, de la consommation excessive ou du fait qu’une poignée d’entreprises consomment plus d’électricité que des pays entiers. Par exemple les gouvernements et les entreprises promeuvent le projet minier Josemaria, qui consomme plus d’électricité que la province de San Juan au nom de la transition énergétique, pour l’extraction du cuivre. Ou que la société Aluar consomme l’équivalent de ce que consomme environ un million et demi de personnes, pour produire de l’aluminium. Quel est l’objectif de cette stratégie face à la La crise climatique ? Qu’est-ce qu’une transition énergétique qui priorise de garantir les taux de profit de certaines entreprises ? Il n’y aura pas de transition équitable pour résoudre la crise climatique lorsque les inégalités sociales sont amplifiées et les tissus communautaires sont détruits.

4- Les entreprises monopolisent les iniatives. Qui est derrière tout cela, derrière cette manière de configurer la transition énergétique ? En premie lieu, les États-Unis et la Chine. et puis, l’Union européenne et en particulier l’Allemagne, dont le rôle de premier plan a été évident avec la rébellion serbe contre à l’extraction du lithium. Les États africains, dans diverses régions de l’Asie et l’Amérique latine se voient imposés cette orientation. Par exemple, dans le cas de notre région, l’Argentine et le Chili apparaissent également sur cette carte, car ils permettent le pillage territorial de leur territoire par les entreprises à la recherche de lithium et du cuivre, entre autres minéraux.

Derrière les États, il y a les grandes entreprises qui occupent une place centrale. Elles opèrent et déterminent le comment et le quand de la transition énergétique. Puis les sociétés minières apparaissent, avec un cadre stratégique et un quadrillage très clair de différentes parties du monde. Rappelons que dans le cas de l’Argentine, les entreprises de différents pays tels que le Canada, les États-Unis, la France, la Corée, la Chine et l’Australie, entre autres se font de plus en plus nombreuses. Outre les sociétés minières, les entreprises de l’automobile jouent un autre rôle très important. Ainsi, des entreprises telles que Volkswagen ou Toyota jouent un rôle fondamental qu’il faut comprendre pour voir comment elles envisagent la transition énergétique. Enfin, il est essentiel de reconnaître le rôle des groupes financiers, dont lle rôle est essentiel dans cette triade. À cet égard, cela est illustré dans la lettre dans laquelle Larry Fink, PDG de BlackRock, annonce à ses actionnaires qu’ils vont entrer dans le secteur des énergies vertes. Et avec BlackRock, le groupe Vanguard apparaît, le Deutsche Bank et HSBC Bank, entre autres.

Les États mentionnés, avec la triade minière-automobile-financière, sont les grands promoteurs de l’extractivisme que nous subissons dans nos pays. Par exemple, dans le cas particulier de l’Argentine, l’extraction du cuivre, du lithium et de l’hydrogène vert font partie de grands projets teintés de cette couleur.

En Argentine aujourd’hui, cette esquisse est indissociable d’ un important Régime d’incitation à l’investissement (RIGI) ou avec le grandes annonces de BHP et de Lunding Mining avec Josemaría. Les transitions ne seront pas pour les peuples et les communautés mais pour les entreprises, les États et les institutions financières qui les définissent.

5- Multiplication des extractivismes. L’extractivisme des entreprises qui s’enrichissent grâce à l’extraction des hydrocarbures a été et est toujours une catastrophe pour nos pays. Aux formes conventionnelles d’extraction de pétrole et de gaz, ont été ajoutées le développement de la fracturation hydraulique et de l’exploitation offshore, stratégies non conventionnelles qui élargissent les modes de prédation. Cependant, et sans préjudice à la nécessité impérieuse de mettre fin à la production et à la consommation de énergies fossiles, la transition énergétique ne peut pas endosser dans la poursuite de la décarbonisation, d’autres formes tout aussi néfastes en terme social et environnemental. Toute liste autour de ces sujets le montre clairement. Le lithium qui menace d’assécher la Puna, l’exploitation minière du cuivre à San Juan et Catamarca, le nickel, qui multiplie les pillages au Guatemala, au Brésil ou en Indonésie, en Afrique et le cobalt, l’Aluar susmentionné avec le barrage de Futaleufú à son service (symboles des dernières dictatures en Argentine). La liste est interminable. Il n’y aura pas de transition anti-extractiviste si le pillage de l’Amérique latine et de l’Afrique continue.

Parfois, on nous présente souvent l’étrange dichotomie entre le déni total d’une crise et le changement climatique (comme le font Javier Milei, Jair Bolsonaro ou Donald Trump), ou l’acceptation d’une transition organisée par les entreprises au nom de la décarbonisation mondiale. Ici, j’ai écarté les deux options. Et il y a beaucoup qui choisissent de sortir par cette supposée alterntive et qui suivent un chemin différent. Le parcours historique de l’Amérique latine et l’Afrique l’exigent. La seule transition vers le bien-être social et environnemental en est une qui rejette toute option dans laquelle les pays et les communautés sont des zones et des corps sacrifiés.

Source : https://agenciatierraviva.com.ar/transicion-energetica-mas-extractivismo-en-america-latina-y-el-norte-marcando-la-agenda-del-sur/

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