Édition du 17 décembre 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Luttes étudiantes

Gagner en condamnant ?

Ils ont d’abord compté sur l’épuisement. Ensuite, ils ont cherché à diviser avec le RPR déjà décidé, les batailles de mots touchant à la violence, et une rencontre centrée sur autre chose que le motif de la lutte. Maintenant, le climat est tel qu’on répète que le gouvernement doit absolument « s’assoir avec les leaders étudiants » alors qu’il n’est toujours pas question de discuter de la hausse. Tous ces détours ont fait perdre de vue un élément fondamental dans l’analyse du mouvement étudiant. Et ainsi, tout le monde est pendu aux lèvres de la CLASSE quant à sa position sur la violence. Un sujet imposé et sans lien avec ses revendications.

Pourtant, la condamnation de la violence n’est pas si déterminante parce qu’elle dénote une incompréhension profonde du mouvement. La confusion est telle que plusieurs acteurs sociaux alliés finissent maladroitement par jouer le jeu du gouvernement. Ainsi, nous voyons des chefs syndicaux intimer la CLASSE de « dénoncer la violence », et des personnalités affirmer que les négociations devraient se faire pendant notre retour en classe.

C’est oublier que la confrontation des dix dernières semaines n’est pas celle de la CLASSE et des fédérations contre le gouvernement, ni une lutte de leurs représentants pour convaincre l’opinion publique, mais bien celle d’un mouvement sur la question des frais de scolarité et des enjeux sociaux que celle-ci amène nécessairement.

La grève a été votée dans les associations locales. La CLASSE et les fédérations coordonnent certes à leur manière les actions et revendications nationales de ces associations, mais la puissance de la base du mouvement dépasse ces organisations. C’est le mouvement étudiant, à travers ses associations locales, qui donne la légitimité à leurs associations nationales d’être des interlocuteurs privilégiés du gouvernement. D’innombrables activités, actions et manifestations locales sont pensées et organisées par des groupes et des individus de leur propre initiative. Des milliers d’individus qui résistent à cette hausse et qui disent au gouvernement de refaire ses devoirs par rapport à l’accessibilité aux études et au rôle de l’éducation dans la société. De cette manière, ce sont des milliers de citoyen-ne-s qui s’expriment sur leurs attentes et leur vision de la société.

Tout en niant notre mouvement, le gouvernement éloigne la discussion des frais de scolarité. Mais si les associations nationales sont entrainées dans cette direction, il est important de se rappeler qu’elles n’ont pas de pouvoir sur les gens qui les composent. Et ceux-ci tiennent avant tout à parler de la hausse des frais et des enjeux sociaux qui s’y rattachent. Après tout ce chemin, il serait surprenant que le mouvement se démobilise tant qu’on n’écoute pas sa principale revendication.

Vanessa Gauthier Vela, étudiante à la maîtrise en science politique, UQÀM

François Marcil, étudiant à la maîtrise en histoire, UQÀM

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