Édition du 3 décembre 2024

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Environnement

Bris de démocratie Lettre au gouvernement du Québec en tant que promoteur et protecteur du bien commun

Le 28 mars dernier, la députée de Vachon, Martine Ouellet, présentait une motion demandant que l’Assemblée nationale se prononce contre le passage du pipeline de pétrole Énergie Est au Québec suite à une récente étude du chercheur Guy Coderre, professeur au Centre national de formation en traitement de l’eau, concernant le bris d’un pipeline de pétrole à moins de 300 mètres de la rivière Saskatchewan Nord dans la province du même nom.

« L’étude constate qu’un tel bris de pipeline près du fleuve Saint-Laurent entraînerait des conséquences pires qu’appréhendées, pires qu’en Saskatchewan, pour Montréal et le fleuve Saint-Laurent. »i La motion visait, notamment, qu’il y ait débat portant sur le projet Énergie Est de Trans-Canada. Le pipeline envisagé traverserait le Québec de l’Ontario au Nouveau-Brunswick transportant du pétrole bitumineux dilué et enjambant de nombreux cours d’eau. Suite à la demande de madame Ouellet, le gouvernement a simplement stipulé qu’il n’y avait pas de consentement. En clair, cela signifie qu’il n’y a pas eu de débat sur cette question d’importance. Pourtant, plus de la moitié de la population québécoise s’oppose à ce projet controversé.ii
Il faut comprendre qu’ « il n’y a pas de plan B à la Communauté métropolitaine de Montréal en cas de déversement et seulement 3 stations de filtration sur 26 autour du fleuve Saint-Laurent ont une prise d’eau alternative. [S’il y a bris de pipeline,] ce sont donc 4 millions de personnes qui seraient privées d’eau potable pour une période indéterminée »iii. Il s’agit, à l’évidence, d’une question de santé publique, de protection des écosystèmes marins, autrement dit, du bien commun.

Par ailleurs, dans un contexte de réchauffement climatique, en très grande partie causé par l’impact des émissions de gaz à effet de serre libéré par l’exploitation et la combustion des énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz naturel), il est inconcevable qu’un gouvernement « démocratique »iv refuse catégoriquement de débattre d’un enjeu aussi crucial. Comment comprendre ce refus ? Le gouvernement serait-il à la solde d’intérêts privés, n’assumant pas son rôle de promoteur et de protecteur du bien commun ? Si non, pourquoi refuser d’en débattre ? C’est pourtant un minimum acceptable. Il me semble qu’il y a, ici, bris de démocratie. Même si le refus du gouvernement s’inscrit dans la légalité, dans le contexte actuel, est-ce légitime, éthique et socialement acceptable ? Permettez-moi d’en douter.

L’épineux projet Énergie Est mériterait non seulement un débat à l’Assemblée nationale, mais, à mon sens, la question des énergies fossiles devrait faire l’objet d’un débat de société. Nous ne pouvons plus jouer à l’autruche et faire comme si de rien n’était. Le temps est au discernement et à la perspicacité vis-à-vis des enjeux auxquels nous faisons face. Faire autrement relèverait de l’irresponsabilité, sinon de l’aveuglement. Faut-il rappeler les conséquences du réchauffement climatique tant aux plans environnemental qu’humain ? C’est maintenant que ça se passe. Et c’est maintenant que nous devons agir de façon responsable. Cette réalité n’est pas une question partisane. Elle doit être élevée au-dessus des divergences d’opinions politiques. Ce sont les conditions de vie dans notre maison commune qui sont en jeu. C’est pourquoi j’interpelle le gouvernement du Québec à enclencher un véritable débat de société sur la question du projet Énergie Est, mais, plus largement, sur celle des énergies fossiles, et à adopter des politiques qui favorisent le développement des énergies dites alternatives.

Nelson Tardif
Montréal
4 avril 2017

Mots-clés : Environnement Québec

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