Émilie Laurin-Dansereau, conseillère budgétaire à l’ACEF du Nord de Montréal
La condition buccodentaire des Québécois et Québécoises est une des pires du Canada
Comment peut-il dire une telle chose alors qu’on sait que chaque année, des milliers de Québécois.e.s se privent de soins dentaires en raison du coût ? En effet, en 2016, plus du quart des Québécois.e.s se sont privés de soins dentaires faute de moyens financiers. Le Québec est d’ailleurs la province où les soins dentaires coûtent le plus cher.
Des études ont démontré que l’état de santé buccodentaire des Québécois et Québécoises, ainsi que leurs pratiques de consultation et d’adhésion à une protection via l’assurance sont moins favorables à une bonne santé buccodentaire que celles des personnes du reste du Canada. En effet, au Québec on retrouve
• plus de personnes édentées,
• plus de personnes portant des prothèses et des fausses dents,
• moins de personnes bénéficiant d’une assurance couvrant les frais dentaires,
• et moins de personnes ayant consulté sur une période de 12 mois (indépendamment du fait d’avoir ou pas une assurance).
Pourtant, une mauvaise santé buccodentaire a des impacts majeurs sur la santé globale. La bouche est la porte d’entrée vers tous les organes du corps humain. Une infection présente en bouche peut donc être transmise aux poumons, au cerveau, aux sinus, aux oreilles, à l’œsophage, à l’estomac, etc. Selon l’Ordre des dentistes du Québec, la carie et les maladies du parodonte sont au stade épidémique et constituent même une cause de mortalité chez les clientèles vulnérables.
Qu’attend le gouvernement pour agir ?
Chaque année, nous accompagnons des centaines de personnes avec leur budget. Parmi celles-ci, on retrouve un grand nombre de ménages à faible et moyen revenu pour qui l’accès aux soins dentaires est un enjeu majeur.
Dans les dernières années, les coûts des soins dentaires et les primes d’assurance ont augmenté plus vite que l’inflation. Rien n’indique qu’ils baisseront dans un avenir rapproché. Conséquence de cette situation ? Les adultes sont de plus en plus nombreux à se priver de soins dentaires. Sans surprise, les personnes à faible revenu sont les personnes qui souffrent le plus de problèmes buccodentaires et qui ont le moins accès aux soins de santé buccodentaire.
Le seul fait que des maladies systémiques puissent être causées ou reliées à des problèmes dentaires devrait forcer le gouvernement à considérer les coûts sociaux de la carie et de l’absence de mesures préventives. Quand les traitements ne sont pas effectués au moment nécessaire, les problèmes s’accentuent. C’est alors le système de santé qui devra en assumer la responsabilité.
Les intérêts du Québec ou les intérêts des Québécois.e.s ?
L’accès aux soins dentaires est le maillon faible du filet social en santé et ce, malgré qu’on sait que le manque de prévention et d’accessibilité engendre des coûts sociaux et médicaux importants. Si le gouvernement du Québec ne veut pas participer au régime fédéral, il doit de manière urgente ajouter les soins dentaires au panier de soins couverts par la RAMQ. Ce serait relativement économique si l’on tient compte de ce que ça coûte de soigner des maladies plus graves, comme les problèmes cardiaques, les ACV ou le diabète qui peuvent être causées par les maladies buccodentaires. Le mauvais état de santé buccodentaire est un problème de santé publique. Les maladies buccodentaires sont fréquentes, la morbidité est importante alors que des traitements préventifs et curatifs simples existent.
Non, le régime de soins dentaires ne fonctionne pas très bien. Suffit d’en parler aux milliers de Québécois.e.s qui ont mal aux dents pour le savoir. L’argument de la défense des champs de compétences semble n’être qu’un prétexte pour justifier l’inaction. Tous les individus devraient être égaux dans l’accès aux services de santé et ça inclut les soins buccodentaires. C’est une question de justice sociale.
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