Objet : Commentaires sur les projets de règlements de mise en œuvre de la Loi sur les hydrocarbures
Madame,
Nous vous écrivons afin d’exprimer notre profond désaccord concernant les projets de règlements de mise en œuvre de la Loi sur les hydrocarbures publiés le 20 septembre dernier. Depuis des mois, les enjeux environnementaux monopolisent les médias et les nouvelles s’aggravent : dérèglements climatiques accompagnés d’ouragans, chaleurs extrêmes, sècheresses et incendies, épuisement des ressources hydriques, pollution de l’air qui fait déjà des victimes au Canada, fonte de la banquise, disparition de larges pans de régions côtières et déplacements de population qui affecteront des millions de personnes. On a du mal à chiffrer les coûts tellement ils seront exorbitants. Le parti Libéral, qui se préoccupe d’économie, devrait s’inquiéter de ces coûts astronomiques attendus. Les contribuables québécois doivent déjà payer des millions pour réparer les dégâts causés par les changements climatiques en Gaspésie ; un avant-goût de ce qui attend les États comme le nôtre. De plus, l’épuisement des ressources hydriques dans le monde et les risques de contamination de l’eau associés aux forages menacent le bien commun. Les observations suivantes devraient inciter nos élus à privilégier une vision « long terme » couvrant tout le territoire québécois, et à appliquer le principe de précaution :
Les conclusions scientifiques du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) 1 ;
Les appels à une transition énergétique urgente, réclamée par le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) 2 ;
L’Organisation météorologique mondiale, (OMM) 3, qui nous avise que « la concentration de CO2 dans l’atmosphère atteint des niveaux records… » ;
Les demandes urgentes du secrétaire général de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) 4 , qui appelle les États à cesser de subventionner les énergies fossiles et les invite à agir pour éviter la catastrophe ;
L’étude présentée par le National Geographic,5 qui confirme que la « Sixième extinction massive » est amorcée et qui s’interroge sur la survie de l’espèce humaine : « Les espèces disparaissent à un rythme alarmant... L’auteur Elizabeth Kolbert estime que cela soulève des questions quant à notre propre survie. »
À l’instar de la communauté internationale, les citoyens du Québec sont, avec raison, « alarmés » et non « alarmistes », comme le prétend monsieur Pierre Moreau6. Le gouvernement vaque à ses occupations comme s’il vivait dans un monde parallèle, ignorant l’actualité climatique et scientifique, indifférent aux menaces qui pèsent sur la biodiversité et le genre humain. Alors qu’en Chine, au Pakistan et en Inde7, les citoyens peinent à respirer dans la rue, le gouvernement québécois nous propose d’implanter ici une des industries à la source de cette problématique. On encourage une exploitation qui pourrait enrichir une minorité d’actionnaires, sans rappeler que cette dernière menace notre santé. En plus de contrevenir aux constats de la science, cette posture mine la vie démocratique des Québécois et alimente le cynisme à l’endroit de la communauté politique.
À la lumière des constats de la science, le climat doit être priorisé. Nous croyons que le ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles a le devoir de tenir compte des conclusions et des recommandations des institutions scientifiques mondiales crédibles, qui sonnent l’alarme depuis des décennies. Vous devez prendre tous les moyens possibles pour empêcher le développement de la filière des hydrocarbures, par quelque procédé que ce soit. Il est nécessaire d’interdire tous les procédés non conventionnels d’extraction des hydrocarbures, notamment la fracturation hydraulique. Cette mesure doit aussi exclure toute aide financière ou autre, susceptible d’encourager l’exploitation du pétrole ou du gaz naturel. L’argent des contribuables ne doit pas servir à soutenir une activité qui nuit à leur santé. Cela est inadmissible d’un point de vue citoyen. Il est donc impératif de retirer tous les permis vendus sans le consentement des citoyens, à l’industrie des hydrocarbures. Le climat et la biodiversité, comme la pollution, ne connaissent pas de frontières. Il ne fait alors aucun sens de mutiler des territoires sous prétexte qu’ils sont inhabités.
Alors que la planète court à sa perte et que l’avenir de nos enfants se trouve gravement compromis, le gouvernement du Québec doit mettre en place dès maintenant le Plan d’action sur la transition énergétique qu’on nous promet depuis maintenant trente ans. Les citoyens ont besoin de politiques énergétiques en rapport avec les constats climatiques scientifiques, qui tiennent compte de la protection de l’eau, de la biodiversité et des milieux de vie des citoyens.
Par conséquent, nous vous demandons de retirer complètement les projets de règlements de mise en œuvre de la Loi sur les hydrocarbures et d’abroger cette loi pour la remplacer par une autre, interdisant les forages au Québec. Aucune région ou territoire du Québec ne doit être sacrifiée.
Dans un même élan, nous invitons madame Isabelle Melançon, ministre du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, à prendre connaissance de nos arguments. Nous espérons que cette lecture l’incitera à « occuper » véritablement sa place au sein du Conseil des ministres et à veiller à l’application rigoureuse des lois qui relèvent de son ministère. Un devoir qui est malheureusement trop souvent négligé, pour ne pas dire ignoré, depuis de nombreuses décennies. Compte tenu des connaissances scientifiques actuelles, ce ministère dispose de tout l’argumentaire nécessaire pour interdire la filière des hydrocarbures qui ne tient pas compte des principes de la Loi sur le développement durable ; son silence sur la question est assourdissant.
Veuillez recevoir, Madame, nos salutations respectueuses.
Josée Gagnon, Jacques Tétreault, Marcel Gauthier, Chantale Gamache, Ellen Nutbrown, Jacqueline Fouron, France Mercille et Albert Geuzaine.
Membres de comités de la région Ouest / Montérégie /
Regroupement vigilance hydrocarbures Québec
Copie conforme :
Monsieur Pierre Moreau, (Ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles)
ministre@mern.gouv.qc.ca
Madame Isabelle Melançon, (Ministre du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques)
ministre@mddelcc.gouv.qc.ca
Monsieur Simon Jolin-Barrette, (Député de Borduas)
sjb.BORD@assnat.qc.ca
Chantal Soucy (Député de Saint-Hyacinthe)
Chantal.Soucy.SAHY@assnat.qc.ca
Monsieur Philippe Couillard, (Premier ministre du Québec)
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1) http://www.ledevoir.com/environnement/actualites-sur-l-environnement/507371/climat-les-engagements-des-etats-sont-nettement-insuffisants-constate-le-giec
2) http://www.ledevoir.com/environnement/actualites-sur-l-environnement/511769/climat-un-rapport-de-l-onu-donne-froid-dans-le-dos
3) http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1064264/quantite-co2-atmosphere-explose-dioxyde-carbone
4) https://www.usinenouvelle.com/article/les-gouvernements-doivent-stopper-les-subventions-aux-energies-fossiles-selon-angel-gurria-de-l-ocde.N609218
5) http://www.nationalgeographic.fr/environnement/lhomme-survivra-t-il-la-sixieme-extinction-massive
6) http://www.lepharillon.ca/rencontre-pierre-moreau/
7) http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1066029/intense-nuage-pollution-paralyse-nord-inde-pakistan
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