Tout comme les excès d’alcool finissent par scléroser les états de conscience, ceux qui sont atteint de la fièvre pétrolière semblent incapables d’imaginer et de mettre en place des moyens efficaces pour effectuer la nécessaire transition énergétique afin de s’éloigner le plus rapidement possible des hydrocarbures. Ces moyens efficaces existent pourtant. Comme le rapporte le directeur du Sierra Club, Michael Brune, de plus en plus de villes aux États-Unis se tournent vers les énergies propres. Le prix de l’énergie solaire a chuté de plus de 50% et celui de l’éolien de 47% depuis les cinq dernières années1. Et plus il y aura d’utilisateurs, plus les prix continueront de baisser.
Le Québec est à la croisée des chemins. Les approvisionnements en pétrole conventionnel suffisent à combler nos besoins et sont au moins deux fois moins polluants que le pétrole en provenance des sables bitumineux. En développant des infrastructures pétrolières et gazières coûteuses sur son territoire, le Québec se condamne à être dépendant des hydrocarbures pendant des décennies à venir, avec le cortège de désastres environnementaux à large échelle qui les accompagnent et au détriment du développement des énergies vertes. Rappelons que le pétrole québécois, s’il y en a en quantité suffisante, est non-conventionnel.
Les obstacles à la transition énergétique ne sont ni technologiques, ni économiques. Le secteur des technologies propres est le secteur industriel qui croit le plus rapidement au Canada. En 2012 il comptait déjà plus de 800 entreprises qui embauchent des dizaines de milliers de travailleurs bien rémunérés, principalement des jeunes. Elles investissent cinq milliards de dollars en recherche et développement et génèrent des revenus de 11.3 milliards. Des études montrent que la valeur de leurs exportations pourrait augmenter à 32 milliards en 10 ans2. Selon la Banque mondiale, le marché des technologies propres s’élèvera à 6 400 milliards au cours des 10 prochaines années dans les seuls pays en développement comme la Chine et l’Inde3. Le Canada et le Québec possèdent les ressources pour se positionner avantageusement dans ce marché émergeant. Il n’y a pas d’opposition entre la croissance économique et la protection de l’environnement, à condition que nos gouvernements adoptent des politiques cohérentes afin de soutenir le virage vert.
En prolongeant sa dépendance aux hydrocarbures, le Québec ne fait que rater son rendez-vous avec la réalité du 21ème siècle. Les choix des gouvernements actuels, s’ils devaient se concrétiser, lègueront une lourde hypothèque aux générations futures car, comme le soulignait très justement le secrétaire d’état américain, John Kerry, « le réchauffement climatique est une arme de destruction massive »4. À cet égard, les projets de pipeline et de développement pétrolier et gazier au Québec et au Canada relèvent davantage de l’action terroriste que de la concertation internationale pour le maintien de la sécurité et pour un avenir viable.
Louise Morand
Comité vigilance hydrocarbures l’Assomption
Le 29 octobre 2014