Édition du 12 novembre 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Environnement

Qui défend réellement Anticosti à l'Assemblée nationale ?

Les défenseurs de la protection environnementale de l’île d’Anticosti semblent avoir maintenant un nouvel allié objectif : le premier ministre du Québec. Mais personne n’est naïf.

Cette étonnante prise de position en défaveur de l’exploitation pétrolière sur Anticosti par Philippe Couillard ne vient certainement pas occulter son préjugé favorable pour l’exploitation des hydrocarbures en général et la multiplication des pipelines, y compris dans d’autres milieux naturels tout aussi valables qu’Anticosti. Et le parti de Pierre Karl Péladeau est aujourd’hui sur la sellette pour ne pas avoir prévu de clause de retrait pour le gouvernement lors de la signature de l’entente, selon La Presse.

S’il est possible de connaitre les détails de l’entente entre des partenaires privés, c’est la moindre des choses qu’on sache si une telle clause existe aussi pour notre gouvernement. M. Couillard, je vous demande encore une fois de dévoiler l’entente liant les Québécois aux pétrolières.

Si le premier ministre se rend à la raison et décide d’adopter sur ce dossier les positions raisonnables que nous défendons depuis des années avec nos alliés écologistes, nous n’allons certainement pas cracher dans la soupe. Mais, jusqu’à maintenant, il se garde bien de rendre public le contrat liant le gouvernement à l’entreprise Pétrolia, ou encore d’annoncer qu’il mettra fin aux forages prévus cet été. L’opposition libérale à Anticosti doit aller au-delà de tonitruantes déclarations, surtout avec les révélations de ce matin.

L’entente signée par le gouvernement Marois liant Québec et ses partenaires financiers prévoirait des clauses de retrait pour ces derniers, mais pas pour Québec ! L’entente prévoirait aussi que le gouvernement serait le seul responsable de la facture si tous les partenaires financiers exerçaient leur droit de retrait. Le chef de l’opposition officielle doit être inconfortable ce matin... C’est son parti qui a mis le gouvernement dans cette position !

Ce débat nous révèle donc plus que jamais le visage interchangeable des têtes dirigeantes des trois plus grands partis. Comme le PQ, la CAQ a pris le sujet au vol pour défendre Pétrolia. Les souverainistes du PQ joignent ainsi leurs voix aux nationalistes de la CAQ et reprochent au gouvernement d’avoir blessé les pauvres dirigeants et actionnaires de Pétrolia et de Junex... Le portrait a de quoi faire sourire.

Plus globalement, si on regarde les investissements gouvernementaux dans la filière hydrocarbures, sans parler de contournement des lois environnementales, le portrait n’est guère rose. En juin 2015, Investissement Québec a créé le Fonds Capital Mines Hydrocarbures. On parle de 1 milliard $ en fonds publics qui permettra à Investissement Québec d’investir dans les phases les plus risquées des projets d’exploration. Cela veut dire utiliser l’argent des Québécois pour maintenir la valeur en bourse de compagnies comme Pétrolia ou Junex. Vont dans le même sens l’appui libéral à l’exploration du gisement Old Harry, à l’oléoduc Énergie Est, au projet Haldimand ou Galt et les subventions puisées à même le Fonds vert pour des multinationales.

La stratégie de Québec solidaire n’est pas de plaire aux Pétrolia, Junex et Suncor de ce monde. À l’Assemblée nationale, nous sommes le seul parti à vouloir garantir l’intégrité écologique d’Anticosti depuis le début. Car l’autre parti qui s’y est mis, le PLQ, n’a toujours rien fait de concret pour cela. Nous martelons depuis des mois que le gouvernement doit révéler l’entente secrète qui le lie à Pétrolia et annuler la fracturation hydraulique prévue cet été. En forçant le gouvernement Couillard à agir de façon cohérente, nous pourrons obtenir des gains concrets dans d’autres dossiers environnementaux.

Au-delà de la question d’Anticosti, pour Québec solidaire, il est urgent de prendre la voie d’une transition énergétique et de désinvestir dans les hydrocarbures. Au Québec, nous avons des instruments économiques, comme la Caisse de dépôt et placement qui à elle seule, dispose de 9 milliards $ en placements fossiles. Si Québec est cohérent avec ses intentions de réduction des GES, la CDPQ devrait investir ailleurs.

Un autre gage d’avenir est d’investir dans le transport collectif. Le Québec est champion dans l’industrie de fabrication de trains et d’autobus. Des grands noms de cette industrie sont chez nous. En utilisant seulement 10% des investissements prévus par Québec pour les infrastructures sur 10 ans, cela permettrait de créer autour de 40 000 emplois directs dans toutes les régions ! Sautons dans le train, et non le pétrolier, avant qu’il ne soit trop tard.

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