Le 21 mars 2018, soit cinq ans après avoir célébré le demi-siècle d’existence de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA)/Union Africaine (UA) – considéré dans la novlangue de l’UA comme « cinquante ans de succès » [1] –, 44 des 55 États membres de l’UA ont signé à Kigali l’Accord portant création de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), soit la création d’un « marché unique pour les marchandises et les services facilité par la circulation des personnes […], un marché libéralisé pour les marchandises et services », selon le texte dudit Accord.
Enthousiasme, absence de “piliers” et transnationales
L’enthousiasme médiatique ayant suivi la signature en mars 2018, à Kigali, de l’Accord de la ZLECAf par 44 États de l’UA (suivis de cinq autres signatures lors d’un sommet en juillet), a été néanmoins précédé de quelques critiques. Certes assez isolées dans un environnement politique, médiatique, intellectuel où se manifeste, peut-être bien plus qu’ailleurs, l’hégémonie du discours économique capitaliste, voire néolibéral – il suffit de faire une recherche sur internet de “zone de libre échange continentale”, ou de lire la presse économique panafricaine dont le pro-capitalisme est assez évident. Ainsi, démonstration a été faite, par ces quelques critiques, qu’en cas d’entrée en vigueur de cet accord les conséquences risquent, à cause des particularités de l’insertion de l’Afrique dans la civilisation capitaliste mondiale, d’être parmi les pires de la vague libre-échangiste en cours – certes qu’un bon accord de libre-échange (capitaliste), c’est-à-dire profitable aux classes populaires, est impossible.
« En cas d’entrée en vigueur de cet accord les conséquences risquent, à cause des particularités de l’insertion de l’Afrique dans la civilisation capitaliste mondiale, d’être parmi les pires de la vague libre-échangiste »
Malgré le report de quelques mois, par rapport à la date butoir auparavant fixée à la fin 2017, il a été relevé la précipitation avec laquelle le texte de l’accord a été élaboré, négocié, et soumis à la signature. Ce qui est explicable en partie par un certain mimétisme, et vaut au résultat de mériter les qualifications, non exagérées, d’« erreur » [2], de « folie » [3]. Les incohérences qui avaient déjà été relevées par certaines organisations de la société civile, pourtant favorables au processus, n’ont pas été corrigées [4].
Ce qu’illustre, par exemple, le fait d’avoir mentionné dans le Préambule que « Les Zones de libre-échange des Communautés économiques régionales (CER) servent de piliers à la création de la Zone de libre-échange continentale africaine », alors que les supposés piliers sont inexistants : aucune des CER ne peut déjà être considérée comme une zone de libre-échange. L’avis très partagé par les spécialistes est que l’East African Community (Burundi, Kenya, Ouganda, Rwanda, Tanzanie) est le processus le plus avancé, du fait d’avoir instauré la libre circulation des marchandises, un tarif extérieur commun. Mais cette CER n’est encore qu’au début du processus de constitution d’un marché commun régional.
Il y a par ailleurs le processus de la Tripartite Free Trade Area réunissant trois CER (Common Market for East and Southern Africa – COMESA –, East African Community – EAC –, Southern Africa Development Community – SADC), soit 27 États africains, allant de l’océan Indien à la rive méridionale de la mer Méditerranée. Signé, en 2015, par 22 États, et estimé, au départ, entrer en vigueur en 2017, cet accord n’a encore été ratifié, en ce mois d’août 2018, que par 3 États sur les 14 requis. Exception faite du Botswana, de l’Érythrée, de la Tanzanie et de la Zambie, tous ont cependant paraphé la ZLECAf. C’est comme si au lieu de servir de piliers à la ZLECAf, les CER envisagent, en cas de mise en œuvre de celle-ci, de s’en servir comme pilier. Il reviendrait ainsi à la toiture de servir de support … aux piliers. Ce qui laisse augurer d’une incapacité pour les États à dépasser le stade de la signature dudit accord.
Rappelant ainsi que s’il n’existe pas de ZLE régionaux, c’est parce qu’il n’y a pas, à proprement parler, beaucoup d’économies dynamiques et diversifiées – du point de vue du développement capitaliste –, productrices de marchandises appelées à circuler librement de Port-Louis à Tunis. En effet, la croissance du PIB moyen chantée au cours de la décennie a été tirée surtout par les matières premières brutes destinées à l’exportation, pour leur transformation hors d’Afrique. Ce que manifestent aussi les 12 à 15 % de commerce intra-africain [5].
Autrement dit, du point de vue capitaliste partagé par tous les États africains, des économies nationales productrices d’une diversité de marchandises auraient favorisé l’existence de ZLE régionales au sein desquelles, grâce à « une politique de redistribution significative » (J. Berthelot), les déséquilibres, les inégalités auraient été atténuées. Par exemple, entre l’Afrique du Sud – qui représente 61 % du PIB des 15 membres de la SADC – et ses partenaires communautaires comme le Botswana (2 % du PIB) ou la Namibie (1,8 % du PIB), sans parler des Pays dits les moins avancés (PMA) que sont le Lesotho (52,8 % de la population vivant dans l’extrême pauvreté) et le Malawi (59 % de la pop.) ; entre le Nigeria 75 % du PIB des 15 membres de la CEDEAO, dans laquelle le PIB de la Côte d’Ivoire est de 6 % (avec 22 % de la pop. vivant dans l’extrême pauvreté), au moins dix fois plus que ceux du Cap-Vert (20 % de la pop.), de la Guinée-Bissau (58 % de la pop.) et de la Gambie (12 % de la pop.), des PMA formant le peloton de queue (économique capitaliste) de cette CER.
Politique de solidarité qu’exigerait déjà la suppression des frontières au sein des CER, réductrice des recettes douanières intra-africaines déjà maigres des États, ne pouvant que s’aggraver avec l’éventuel saute-mouton que serait l’extension précipitée de cette suppression à toute l’Afrique. Surtout pour les États des PMA dont l’Afrique détient le plus grand contingent au niveau mondial. Regions Refocus et Third World Network Africa, estimaient, en 2016, qu’« À titre d’exemple, la libéralisation des tarifs entre les pays voisins du Nigeria et le Niger serait plus bénéfique au Nigeria (la première économie africaine) qu’au Niger qui a une capacité de production relative faible et des infrastructures limitées, etc. » [6].
Or rien n’est prévu de semblable à ce qui a été accompli, en guise de “solidarité”, par l’Union européenne dont s’inspire l’Union Africaine (sans en fait en avoir ni le sens de l’organisation, ni, par conséquent, les moyens) : « plus d’un tiers [du budget de l’UE] a été consacré aux Fonds structurels et au Fonds de cohésion, ce qui a grandement facilité le rattrapage des États membres moins développés de l’UE à 15 et encore plus des 13 nouveaux États membres d’Europe de l’Est depuis 2004 ». Ce qui est l’un des facteurs explicatifs, selon J. Berthelot, du commerce intra-européen représentant « deux tiers de son commerce total » [7] – sans toutefois que disparaissent les inégalités entre les économies de l’UE, se reflétant au niveau des classes sociales. La tendance étant même, depuis quelques années, à plus d’inégalités et de pauvreté au sein de l’Union européenne [8].
Par ailleurs, avec une telle liberté de circulation des marchandises, des transnationales d’origine extra-africaine – dont certaines sont déjà actives en Afrique et dominent l’économie dite africaine – plutôt que d’exporter vers l’Afrique des marchandises produites en Europe, par exemple, qui seraient soumises aux tarifs douaniers, elles sont censées s’installer dans des pays africains, y produire pour le marché africain dans le cadre des 90 % des produits à libéraliser en premier lieu, progressivement – les 10 % restant, dont les produits dits sensibles, le seront plus tard. La ZLECAf, en organisant la sacro-sainte compétitivité des économies africaines, est supposée attirer plus d’investissements directs étrangers (extra-africains) – en déclin entre de 2014 à 2016. Ce qui explique la réticence de quelques États, dont les dirigeants ne possèdent aucune fibre anticapitaliste, à signer ledit accord. D’autant plus que le protocole sur les Règles d’origine, fixant les critères par lesquels les marchandises seront considérées comme originaires de la ZLECAf, n’est pas encore établi.
“Trahison” par le Nigeria et “nationalisme” économico-social
Il en est ainsi du Nigeria, quasiment accusé de félonie, aussi bien par des nationaux que par des extra-nationaux. Par exemple, le Nigeria Trade Experts Forum, a rappelé que non seulement la ZLECAf s’origine du Plan d’Action de Lagos et du Traité d’Abuja, mais aussi que c’est au Nigeria, première économie de l’Afrique, qu’avait échu la Présidence du Forum de Négociation de la Zone de Libre-Échange Continental (ZLECAf) [9].
De son côté, un enseignant africain (non Nigérian) à Sciences Po (Paris) a parlé du chef de l’État nigérian, Muhammadu Buhari, en termes de « piètre grand frère », du « géant [économique] d’Afrique et de son ténébreux président [qui] ne semblent pas prêts à assumer, sous le fallacieux prétexte de se donner le temps de la réflexion et de poursuivre des consultations, sur le plan interne avec les milieux d’affaires » [10]. Réactions probablement émotionnelles, mais qui expriment aussi une certaine adhésion au néolibéralisme. Sans l’avoir voulu peut-être, cet intellectuel, se considérant sans doute comme panafricaniste, est arrivé à exprimer la condescendance libre-échangiste, voire néolibérale, à l’égard de certaines procédures dites démocratiques, en l’occurrence, la consultation par l’État de certaines structures de la société civile concernant une décision dont les effets impacteront, diversement, toute la société.
« La non compétitivité des petites et moyennes entreprises nigérianes face aux transnationales sera inévitablement facteur de faillite des entreprises, donc de pertes d’emplois, de croissance du chômage. »
Les forces économiques et sociales ayant fait pression, consultées ou soutenant l’attitude du chef de l’État nigérian sont, entre autres, l’Association des manufacturiers du Nigeria (MAN), la National Association of Nigerian Traders (NANTS). La MAN, particulièrement, redoute les conséquences d’une zone de libre-échange dans laquelle les entreprises nigérianes seront appelées à être en concurrence avec des transnationales d’origine extra-africaine qui se seront installées dans d’autres pays africains, surtout dans le voisinage immédiat, et dont les marchandises, en libre circulation – 90 % de produits, seuls 10 % seront protégés, temporairement – seraient meilleur marché sur le marché nigérian que celles produites par des Nigérian·e·s. Certains pays africains, à l’instar du Maroc [11], de l’Éthiopie, du Rwanda [12] se constituent déjà en hub pour des transnationales d’origine étrangère (européenne ou asiatique) s’intéressant au marché africain supposé prometteur.
Alors que, malgré le succès de certain·e·s de ses entrepreneur·e·s, dans la première économie d’Afrique en matière de PIB, le secteur manufacturier a été affaibli par l’extractivisme pétrolier : « There are three leading economies in Africa namely Nigeria which is worth some $406 billion, Egypt $332.3 billion and South Africa $294.1billion. However, in terms of manufacturing value added, South Africa at 25 per cent is the highest, followed by Egypt at 20 per cent and Nigeria with less than 5 per cent. Ghana is even more industrialized at 6 per cent manufacturing value added (MVA) [13] ».
Cette partie du capital nigérian est hantée par une intensification des faillites pouvant découler de la mise en concurrence. L’industrialisation par le capital privé national dont elle rêve risque de ne pas être réalisée. Elle n’est pas convaincue par la promesse d’une “intégration dans les chaînes de valeur” régionales, continentales, mondiales, faite aux petites et moyennes entreprises africaines, nigérianes en l’occurrence, par la technocratie de l’UA de la CEA, de la CNUCED – relayées par le ministre nigérian de l’Industrie, du Commerce et de l’Investissement avant la publication de la volte-face de son chef d’État –, le club des transnationales africaines, “AfroChampions”.
La présidence de ce club, par le Nigérian Aliko Dangoté (avec pour co-président le chantre néolibéral de la Renaissance Africaine, l’ex-président sud-africain Thabo Mbeki), activiste évident de la ZLECAf, exprime l’existence d’une divergence des intérêts au sein du capitalisme nigérian, voire africain. Divergence et concurrence étant aussi la norme au sein des capitalismes nationaux. Tout comme l’africanité de ces transnationales n’implique pas une autre moralité, au niveau national comme au niveau continental, voire dans le reste du monde pour les “African Globalizers”, que celle ordinairement cynique des transnationales originaires d’ailleurs.
La crainte exprimée par la MAN, la NANTS et d’autres est, en toute logique, partagée par des syndicats du travail, comme le Nigerian Labour Congress ayant aussi demandé au chef de l’État nigérian de ne pas signer la ZLECAf. La non compétitivité des petites et moyennes entreprises nigérianes face aux transnationales sera inévitablement facteur de faillite des entreprises, donc de pertes d’emplois, de croissance du chômage. Ce qui, par ailleurs, permettra de flexibiliser davantage le marché de l’emploi nigérian. Déjà que, selon le président du NLC : « 45% of the workforce in Nigeria operates as casual workers. 50% of the burden of casualization exists in the downstream oil and gas and banking sub sectors of the economy and some other work places. Casual workers in our workforce operate under very precarious conditions with near total denial of the benefits associated with permanent and decent work ».
Le libre-échangisme ou le néolibéralisme n’ayant pas pour vocation la réduction de l’exploitation de la force de travail, une partie importante du patronat nigérian n’admettant pas de présence syndicale dans les entreprises, le risque est grand d’avoir plus de travailleurs/travailleuses pauvres, dans ce pays où déjà le nombre de personnes vivant dans l’extrême pauvreté (86,9 millions sur une population d’environ 197 millions) est devenu supérieur à celui de l’Inde (73 millions sur environ 1 milliard 340 millions) (World Poverty Clock Report). Ce qui, il faut le souligner, n’a pas attendu la ZLECAf, prouvant que le souci exprimé par le président de la MAN, pour « le bien-être de plus de 180 millions de Nigérian·e·s » [14] qui serait négativement impacté par la ZLECAf relève tout simplement de la démagogie nationaliste bourgeoise d’un représentant de la classe dominante d’un pays aux inégalités sociales ordinairement parmi les plus criardes en Afrique, d’un patronat national bafouant généralement de nombreux droits de celles et ceux qui produisent les richesses qu’il accumule.
Vers un dumping social et plus d’“afrophobie” ?
Par ailleurs, la zone de libre-échange c’est aussi, dans son volet “investissements”, la mise en concurrence des marchés du travail. Un marché du travail compétitif ou attractif étant celui où, entre autres, le coût de la force de travail est considéré par le capital comme raisonnablement bas, les obligations patronales et les protections sociales des prolétaires amoindries dans la mesure du possible. Ainsi, les États qui prétendent construire une Afrique solidaire se feront en même temps concurrence, pour avoir le marché du travail le plus attractif, pour offrir une flexibilité du travail pire, par exemple, que celle offerte par l’Éthiopie aux entreprises chinoises qui y ont délocalisé, en réaction à la montée des revendications de hausse salariale en Chine [15] : inexistence d’un salaire minimum national, une durée du travail rappelant le début du 19e siècle en Europe (jusqu’à 14 heures/jour, 7 jours/7), etc. Aujourd’hui, ce sont les prolétaires d’Éthiopie contre celles/ceux de Chine. Demain ça pourra être contre celle d’Éthiopie, la force de travail somalienne, si elle est considérée comme plus compétitive.
« La pratique dite du dumping social, nocive aux travailleurs/travailleuses, risque d’être courante dans la ZLECAf »
Cette mobilité du capital va, quasi certainement, coexister avec la libre circulation de la force de travail africaine (art. 14 du Protocole relatif à la libre circulation des personnes, au droit de résidence et au droit à l’établissement, adopté en janvier 2018), d’un pays à un autre, d’un marché national du travail à un autre, avec des pratiques semblables à celles ayant existé, voire existent encore dans l’Union européenne (source d’inspiration de l’Union Africaine), principalement le phénomène des “travailleurs détachés”. Une mobilité de la force de travail exprimant assez bien les fortes inégalités entre les économies de l’Union européenne, ainsi qu’entre leurs prolétaires [16].
Cette pratique dite du dumping social, nocive aux travailleurs/travailleuses, risque d’être courante dans la ZLECAf, comme le laisse penser l’intérêt exprimé par l’UA et le club “AfroChampions” pour la « libre circulation des travailleurs » même si l’article y relatif parle « d’aucune discrimination, conformément aux lois du pays ». Ce qui ne serait pas nouveau, eu égard, par exemple, à l’utilisation assez traditionnelle de la main d’œuvre enfantine, originaire des pays voisins, dans les grandes plantations ouest-africaines de cacao (dont l’exportation vers les chocolateries, hors d’Afrique, est monopolisée par des transnationales d’origine extra-africaine). Plutôt que de favoriser la solidarité entre force de travail salariée locale/autochtone et celle originaire d’ailleurs, elle risque de démultiplier des explosions d’« afrophobie » à la sud-africaine, cette mise à jour du chauvinisme populaire dont les manifestations étaient déjà dénoncées par Frantz Fanon à l’aube des indépendances nationales. La signature des protocoles de libre circulation peut ne pas être suivie d’effets, vu le laxisme habituel des États africains avec les engagements aussi bien nationaux qu’internationaux [17].
Contre la mise en concurrence des travailleurs/travailleuses, la surexploitation de la force de travail étrangère, devrait être instaurée, entre autres, une harmonisation panafricaine de la législation du travail, vers le mieux-disant. En parallèle du « traitement de la nation la plus favorisée » qui, concernant le commerce des services, stipule entre autres que « chaque État partie accorde, dès son entrée en vigueur, immédiatement et sans condition, aux services et fournisseurs de services de tout autre État partie un traitement non moins favorable que celui qu’il accorde aux services similaires et fournisseurs de services similaires de toute tierce partie » (art. 4 du Protocole sur le commerce des services).
Une égalité entre travailleurs/travailleuses par delà la différence des nationalités. Ce qui serait aux antipodes de la dynamique capitaliste néolibérale de la ZLECAf, dont le principe est mieux exprimé par ce passage du préambule parlant de la création d’ « un marché unique pour les marchandises et les services facilité par la circulation des personnes » – les personnes étant au service des marchandises et des services ne pouvant pas, malheureusement, se passer d’elles pour leur rendez-vous avec l’argent – que par ceux sur le « développement inclusif », le « bien-être économique et social de l’ensemble de la population africaine ».
Notes
[1] Union Africaine, Cinquante ans de succès : la voix de l’Afrique de 1963 à 2013 (contrairement à ce que peut laisser entendre le titre, il ne s’agit pas d’un livre bilan du demi-siècle mais d’un recueil des discours prononcés lors de la création de l’OUA et à l’occasion de son cinquantième anniversaire). Comme dans le roman de George Orwell, 1984, il est affirmé que « La guerre c’est la paix. La liberté c’est l’esclavage. L’ignorance c’est la force », l’Union Africaine affirme en quelque sorte que l’échec c’est le succès.
[2] Ndongo Samba Sylla, « La Zone de Libre Échange Africaine est une erreur », Maghreb Emergent, 17 février 2017, http://maghrebemergent.com/economie/69608-ndongo-samba-sylla-economiste-senegalais-la-zone-de-libre-echange-africaine-est-une-erreur- entretien.html
[3] Jacques Berthelot, « La folie de la zone de libre-échange continentale africaine (ZLEC) », Sol. Alternatives agroécologiques et solidaires, 25 juin 2017, http://www.sol-asso.fr/analyses-politiques-agricoles-jacques-b/
[4] Regions Refocus et Third World Network Africa, « La Zone de Libre Echange Continentale (ZLEC). Le processus et l’essence politique. Notions de base », Avril 2016, http://www.twnafrica.org/french/.
[5] À propos de l’estimation par la CEA du passage du commerce intra-africain à plus de 50 % en 2022, 35 milliards de dollars/an, en cas d’entrée en vigueur de la ZLECAf en 2017, N. Samba Sylla précise que ces chiffres « ont été obtenus en partant de données statistiques ne concernant que 16 pays africains (les 38 autres n’étant pas pris en compte) et avec des données sur les structures tarifaires qui remontent à 2004. Sans mentionner que le modèle économétrique qui a permis de générer ce chiffre repose sur des hypothèses assez incroyables : libéralisation totale des biens et des services en cinq ans, absence de chômage dans tous les pays africains… Ces chiffres ont le mérite d’exister mais n’ont aucune validité » (« La Zone de libre-échange africaine est une erreur »). Ils sont, malgré cela, repris par tous/toutes les adeptes de la ZLECAf, des gouvernant·e·s africains aux journalistes.
[6] Region Focus et Third World Network, op. cit.
[7] J. Berthelot, « La folie de la Zone… ».
[8] Cf. par exemple, Centre for Opportunity and Equality, Understanding the socio-economic divide in Europe, OECD, 26 january 2017, http://oe.cd/cope-divide-europe-2017 ; Lucas Chancel (coordinateur général), Rapport sur les inégalités mondiales 2018. Synthèse, World Inequality lab, www.wid.world.
[9] Nwiabu Lebgorsi Nuka Esq, « Nigeria Trade Experts Forum Position On the African continental Free Trade Area (afcfta) Agreement », The Nigeria Voice, March 28, 2018, https://www.thenigeriavoice.com.
[10] Francis Kpatindé, "Le Nigeria rate le jour du marché commun », Le Monde, 25 mars 2018, https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/03/23/le-nigeria-rate-le-jour-du-marche-commun_5275640_3212.html. Dans cette critique faite à l’État nigérian et à son président au nom du panafricanisme, on peut aussi lire : « En choisissant de faire cavalier seul, le Nigeria fragilise par ailleurs l’UA et, surtout, la Cédéao, dont la force d’attraction, on l’a vu avec les récentes demandes d’adhésion du Maroc et de la Tunisie, va bien au-delà de la frange occidentale du continent. Privée du poids politique, économique, démographique et diplomatique du Nigeria, l’Afrique occidentale court le risque de se voir reléguée aux seconds rôles au sein de l’UA face à une Afrique boréale et une Afrique orientale qui émergent plus unies et plus solides du conclave de Kigali ». À quoi se réfère t-il pour parler d’une unité de l’Afrique du Nord (« boréale ») dont l’UMA est souvent considérée comme quasi inexistante, explication en partie des « demandes d’adhésion » évoquées ? En dehors du Nigeria, les autres États non signataires n’appartiennent-ils pas à l’Afrique orientale supposée avoir émergé « plus unie et plus solide » ? Il semble par ailleurs que ce panafricaniste pense aussi l’intégration en termes de concurrence entre sous-régions africaines.
[11] Omar Aziki, « Maroc : tremplin pour les conquêtes néocoloniales de l’Afrique », 19 novembre 2017, http://www.cadtm.org/Maroc-tremplin-pour-les-conquetes.
[12] Lily Kuo, « Why is China investing so heavily in a Small landlocked African country with few natural resources », Quartz, 22 novembre 2016, https://qz.com/africa/827935/rwanda-is-a-landlocked-country-with-few-natural-resources-so-why-is-china-investing-so-heavily-in-it/. Cf. aussi Aboubacar Yacouba Barma, « Automobile : le premier véhicule Volkswagen “Made in Rwanda” est sorti d’usine », La Tribune, 28 juin 2018, https://afrique.latribune.fr/entreprises/industrie/automobile/2018-06-28/automobile-le-premier-vehicule-volkswagen-made-in-rwanda-est-sorti-d-usine-783383.html (avec photo de Paul Kagame posant, avec d’autres, à côté du véhicule “Made in Rwanda”).
[13] Nigerian Labour Congress, « Address of NLC President at the 2018 May Day Celebration », https://www.nlcng.org/speeches-of-the-president/address-of-nlc-president-at-the-2018-may-day-celebration/. Cf. aussi, Chinedu Bosah, « ENL Dockworkers and Dangote Truck Officers Continue the Struggle for Compensation », Socialist Nigeria, 29 march 2018, http://www.socialistnigeria.org/print.php?text=3586.
[14] Cité par Kayode Ogunwale, « Organised private sector maintains withdrawal from AfCFTA », Oracle News, July 4, 2018, https://oraclenews.ng/organised-private-sector-maintains-withdrawal-from-afcfta/.
[15] À l’occasion du Forum Africa 2017, en décembre 2017 à Charm el-Sheik (Égypte), il a été question de 85 millions d’emplois que la Chine créerait en délocalisant en Afrique, en réaction aux revendications salariales en hausse en Chine, cf., par exemple, « La Chine propose la création de 85 millions d’emplois en Afrique », Témoignages.re (La Réunion), 13 décembre 2017, https://www.temoignages.re/international/monde/la-chine-propose-la-creation-de-85-millions-d-emplois-en-afrique,91798, et « Interview exclusive avec Helen Hai, CEO de ‘Made in Africa Initiative’ », Financial Afrik, 10 août 2018, https://www.financialafrik.com/2018/08/10/interview-exclusive-avec-helen-hai-ceo-de-made-in-africa-initiative/. Pour le moment, c’est une infime partie des entreprises chinoises qui envisagent délocaliser hors de Chine et du voisinage régional.
[16] Bertrand Bissuel, « Travailleurs détachés : les chiffres s’emballent en France », Le Monde, 5 février 2018, https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/02/05/travailleurs-detaches-les-chiffres-s-emballent-en-france_5251933_3234.html. Le détachement concerne aussi, néanmoins des originaires de France, par exemple.
[17] Cf, par exemple, Ken Ukahoa (Secretariat President of NANTS), « The recent ‘Quit notice’ issued by Ghanian Government to Nigerian Traders », 27 juillet 2018, www.nants.org.
Jean Nanga est militant du CADTM en Afrique, il collabore régulièrement à la revue Inprecor.
Un message, un commentaire ?