Par Natalie Obiko Pearson
traduction Jacques Brisson
"Je ne pense pas que ce projet ira de l’avant - je ne le crois vraiment pas – à cause de la résistance que je constate sur le terrain", a déclaré Gregor Robertson dans une interview mardi au siège de Bloomberg à New York.
Kinder Morgan a menacé de se retirer du projet de 7,4 milliards de dollars, lançant un ultimatum au gouvernement fédéral et lui donnant jusqu’au 31 mai pour neutraliser l’opposition du gouvernement de Colombie-Britannique, celui-ci ayant promis d’utiliser « tous les outils nécessaires » pour bloquer le projet. Le premier ministre fédéral Justin Trudeau, qui a basé son programme économique et environnemental sur le pipeline, s’est engagé à ce qu’il soit terminé pour assurer l’acheminement du pétrole brut de l’Alberta vers les marchés asiatiques.
Le gouvernement canadien est "déterminé à ce que le gazoduc soit construit", a réitéré mardi le ministre fédéral des Ressources naturelles, Jim Carr, aux journalistes à Ottawa.
La voie législative demeure une option, a-t-il déclaré, sans élaborer. Le gouvernement fédéral et l’Alberta envisagent d’accorder un soutien financier au projet, ce qui pourrait presque tripler la capacité du pipeline qui aboutit à un terminal près de Vancouver.
"Je suis confiant qu’au final, il y aura une solution", a déclaré Carr.
Cette solution ne devrait pas être élaborée au dépend de l’opposition locale, selon Robertson, dont le mandat de dix ans en tant que maire prend fin en octobre prochain.
"Je ne pense pas que la résistance sur la côte ouest va s’estomper - je pense que cela ne fera que s’intensifier", a-t-il dit. "L’escalade me semble probable."
Un sondage de Nanos Research publié cette semaine indique que, même si six Canadiens sur dix veulent que le projet aboutisse, une proportion égale craint que le conflit ne remette en question le fonctionnement du Canada en tant que fédération. L’Alberta a menacé la Colombie Britannique de représailles commerciales alléguant que l’impossibilité d’écouler son pétrôle coûte au Canada environ 15 milliards de dollars par année.
Kinder Morgan Canada Ltd. n’a pas répondu à un message demandant des commentaires.
Pour Robertson, 53 ans, qui est à la tête d’une ville de 600 000 habitants où la moitié de la population prend le transport en commun, marche ou fait du vélo pour aller au travail, la question va bien au-delà du pipeline.
"Je pense qu’il y a une question beaucoup plus large ici", a déclaré Robertson. "Nous devons nous débarrasser des combustibles fossiles. La question est de savoir comment allons-nous mettre en œuvre cette transition. "
Le secteur pétrolier et gazier de l’Alberta « représente une si petite fraction de l’économie globale canadienne en termes de nombre d’emplois », tandis que l’économie de villes comme Vancouver et Toronto est basée sur des secteurs plus récents liés à la technologie et à l’innovation.
Selon les sondages, l’opposition la plus virulente au projet est concentrée à Vancouver et à Victoria. Plusieurs groupes autochtones ont également exprimé leur opposition. Toutefois, il y a un large soutien au projet en Colombie-Britannique en dehors des deux centres urbains.
Deux députés ont été arrêtés en mars pour avoir défié une injonction interdisant aux manifestants de perturber la construction des installations de Kinder Morgan près de Vancouver.
Quand on lui a demandé s’il était prêt à se faire arrêter pour bloquer le projet, Robertson a répondu : "Potentiellement".
"Mais je préférerais voir le débat se calmer et les discours plus posés prévaloir, ce qui explique pourquoi je ne l’ai pas encore fait", a-t-il dit.
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